Hongrie - Espagne : l'UE accusée de faire "deux poids deux mesures"

L'Union européenne subissait mardi des critiques en interne pour avoir fait preuve de mansuétude concernant le déficit public espagnol et décidé à l'inverse de sanctionner la Hongrie pour son dérapage budgétaire, une première.
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Réunis mardi à Bruxelles, les ministres des Finances des 27 ont voté le gel temporaire de 495 millions d'euros du fonds de cohésion destinés à Budapest, a annoncé la ministre danoise des Finances, Margrethe Vestager. L'Eurogroupe a pris cette décision en raison de l'incapacité répétée de la Hongrie à revenir dans les clous du pacte budgétaire, soit 3% de déficit public. Toutefois, pour ménager les pays qui trouvaient l'UE trop sévère, un compromis a été trouvé. La sanction sera ainsi levée "immédiatement" si la Hongrie présente des mesures correctives d'ici le 22 juin, a déclaré la ministre.

Le front européen s'est fissuré

A l'occasion des débats qui ont précédé ce vote, le front européen s'est en effet fissuré, a indiqué une source diplomatique européenne, certains pays de l'Est souhaitant laisser plus de temps à Budapest pour agir. "Nous devons traiter tous les pays de la même façon", a déclaré la ministre autrichienne, Maria Fekter, or "nous n'avons pas adopté de sanctions contre l'Espagne". "Par rapport à la pression mise sur la Hongrie, j'ai l'impression qu'il y a deux poids, deux mesures", a-t-elle regretté en marge de la réunion avec ses homologues européens. Lundi soir, les ministres des Finances de la zone euro ont en effet accepté d'assouplir l'objectif de réduction du déficit budgétaire de l'Espagne en 2012, à 5,3% du PIB contre 4,4% prévu à l'origine, tout en insistant sur la nécessité pour Madrid de revenir à 3% en 2013.

"Nous ne sommes pas spécialement cléments envers un pays et durs envers un autre", a réagi Amadeu Altafaj, le porte-parole du commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, au cours d'un point de presse, rappelant que la Hongrie devait corriger ses déficits dès 2011 et n'avait "pas fait d'efforts suffisants". A l'inverse, le délai pour l'Espagne a été fixé à 2013 et le pays s'est "fermement engagé" à le respecter, a-t-il dit. "Il n'y a pas de raison de considérer qu'il y a des victimes du système", a insisté le porte-parole. "C'est la cinquième fois que la Hongrie est en procédure de déficit excessif, c'est le champion absolu de la procédure, d'où le fait qu'elle soit la première visée", a souligné de son côté un diplomate européen.

Un autre diplomate interrogé par l'AFP a insisté par ailleurs sur le fait que la décision concernant la Hongrie lui laissait un délai de six mois pour éviter le gel des fonds de cohésion. Un porte-parole de la représentation hongroise a même jugé que son pays avait jusqu'à "la fin de l'année" pour convaincre ses partenaires, soit le temps restant avant que la sanction n'entre en vigueur le 1er janvier 2013. Le gel d'aides européennes a été proposé par la Commission européenne, excédée par la situation de Budapest dont le déficit dépasse régulièrement les seuils autorisés en Europe depuis 2004.

La proposition d'une taxe sur les transactions financières toujours sur la table

La réunion de mardi a par ailleurs permis de faire un état des lieux des positions des uns et des autres concernant la proposition de la Commission européenne de créer au niveau des 27 une taxe sur les transactions financières. L'idée est défendue par neuf Etats européens emmenés par l'Allemagne et la France, mais plusieurs de leurs partenaires y sont fortement opposés, comme la République tchèque ou la Suède. Le ministre suédois Anders Borg, dont le pays a brièvement expérimenté une telle taxe dans les années 1980 avant d'y renoncer pour cause de fuite des capitaux, a jugé que l'initiative était "difficile à accepter" et ne serait "pas bonne pour la croissance européenne". Mais le ministre allemand Wolfgang Schäuble s'en est fait à nouveau l'avocat, soulignant que "si l'on savait à l'avance ce qui est possible ou non, le monde n'aurait pas été créé". "Nous prendrons le temps nécessaire pour obtenir l'accord le plus large sur ce principe", a déclaré son homologue français François Baroin.

Le fait que neuf pays européens soient prêts à aller de l'avant leur permet théoriquement de mettre en place cette taxe grâce au mécanisme de coopération renforcée, mais il leur faut au préalable démontrer qu'un accord à l'unanimité est impossible au sein de l'UE, ce qui laisse augurer de longs débats. La présidence danoise a d'ores et déjà prévu d'y consacrer six réunions, mais ne compte pas boucler le dossier d'ici fin juin.

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