"La consommation médicale va augmenter et l'assurance maladie obligatoire va continuer son repli"

Jean-Claude Seys, banquier devenu assureur, fondateur du groupe mutualiste Covéa qui réunit MMA,Maaf et GMF, se lance dans une nouvelle aventure. A 71 ans, il crée l'Institut Diderot. Inauguré lundi 19 octobre, cet organisme de recherche et de prospective pluridisciplinaire a vocation à contribuer au débat public sur des sujets comme l'avenir de l'automobile, de la bioéthique ou des nanotechnologies. Son conseil d'orientation est composé de quatorze personnalités d'horizons divers dont Ali Benmakhlouf, Rony Brauman, Claudie Haigneré, Claudine Cohen, Etienne Klein, Louis Schweitzer. Pour La Tribune, Jean-Claude Seys revient sur l'un de ses sujets de prédilection en tant qu'assureur : le système d'assurance santé français.

- La Tribune : En 2000, Claude Bébéar a créé l'institut Montaigne. Dix ans plus tard, vous créez l'institut Diderot. Que comptez-vous apporter de neuf avec ce "think tank" ?

- Jean-Claude Seys : Quelle que soit l'activité, il n'est pas bon qu'il y ait un acteur unique. En France, on compte 450 sociétés d'assurances. Qu'il y ait dix, onze ou vingt "think tank", cela n'a rien d'excessif. Ensuite, nous n'avons pas exactement le même positionnement. Les thématiques développées par l'institut Montaigne ont un caractère plus concret que les nôtres. Notre mission est d'abord intellectuelle. Nous ne cherchons pas à avoir une approche extrêmement spécialisée des sujets abordés. Nous ne souhaitons pas non plus nous contenter d'une vision à court terme et locale, mais bien au contraire porter un regard plus universel sur les problèmes abordés.

- Ne pensez-vous pas que la crise a porté un coup rude au capitalisme tel que nous l'avons vécu ces dernières décennies ?

- Le capitalisme est enterré tous les cinq ans. Les commentateurs ont un défaut majeur, il leur faut toujours annoncer le paradis ou l'enfer. Pour les médias, comme pour les économistes, annoncer qu'une crise serait moyenne, cela n'intéresserait personne. Cette crise n'est pas celle du capitalisme, qui est extrêmement solide et robuste dans toutes ses dimensions. Qu'une forme de capitalisme financier ait été provisoirement atteinte, c'est une évidence. Cela dit, ses cendres ne sont pas encore froides, que déjà tout repart. Et pour cause : il n'y a aucune substitution possible. Donc, le capitalisme n'a pas été tué et vous pourrez à nouveau annoncer sa mort dans trois ou quatre ans.

- Comment voyez-vous l'avenir ?

- L'année dernière, j'étais d'avis que la crise ne serait pas aussi catastrophique qu'on l'avait annoncé. Aujourd'hui, je pense que la reprise ne sera pas aussi brillante ni aussi rapide qu'on l'annonce. Techniquement, on cesse d'être en crise quand on commence à remonter. Vous étiez à 100, vous êtes tombé à 90, quand vous repassez à 91, c'est la reprise. Pour autant, vous êtes encore à - 9. Ensuite, il y a ce grand débat qui divise les économistes : quelles seront les conséquences de l'inondation de monnaie à travers le monde ? Selon la théorie classique défendue par un certain nombre d'économistes, dont Denis Kessler, cela ne peut générer que de l'inflation. C'est tout à fait possible, mais est-ce si certain que cela ? Pour d'autres économistes, en réalité, cet argent devrait s'orienter d'abord sur les actifs, entraînant leur inflation plus que celle des prix à la consommation. C'est possible. J'y crois un peu. Mais, troisième point, en cas de réelle reprise - c'est-à-dire quand le PIB mondial aura retrouvé son niveau de 2007 et donc effacé les pertes de 2008 et de 2009 - il n'y aucune raison que les matières premières et le pétrole en particulier ne se remettent pas à flamber. D'où l'importance de raisonner aussi à long terme. Il y a deux ans, en juin, on nous annonçait une catastrophe, le pétrole à 200 dollars. Trois mois après, la dégringolade commençait, on est retombé à 46 ; maintenant on s'est fait à l'habitude qu'il soit entre 60 et 75 dollars... mais qu'est-ce que cela va donner dans deux ans ?

- L'institut Diderot a-t-il vocation à conduire une réflexion économique sur tous ces sujets, à produire des travaux universitaires ?

- L'idée de base est de s'emparer d'un certain nombre de sujets que nous considérons comme importants et complexes, et d'essayer d'amener des individualités compétentes dans leur domaine à une réflexion collective pour voir si, justement, cette approche collective va produire quelque chose de différent des approches un peu trop fragmentaires que nous avons aujourd'hui.

- Vous prônez une approche pluridisciplinaire ?

- Oui, une approche collective : chaque discipline étant représentée par un ou deux spécialistes.

- Comment formaliserez-vous cette réflexion ?

- Il y aura différents niveaux. Premièrement, nous travaillons pour nous-mêmes, pour aider ceux qui contribuent à faire émerger cette pensée synthétique, systémique et un peu visionnaire. Deuxièmement, nous allons produire des travaux pour le public sous forme de colloques une fois par an et de publications.

- La structure juridique de l'institut Diderot - un fonds de dotation - vous permet de solliciter une contribution financière de vos clients sociétaires. Un euro par personne vous permettrait de récolter 10 millions d'euros. Est-ce une piste que vous envisagez ?

- Pas pour l'instant. Nous ne voulons rien faire sans être à peu près sûrs de notre efficacité. Nous sommes partis d'idées un peu théoriques ; nous voulons prouver que cela marche. En fonction des premiers résultats, nous augmenterons ou réduirons la voilure et, le cas échéant, ferons appel au public ou à d'autres sources de financement. Nous voulons d'abord tester. En tout cas, ce fonds de dotation est arrivé au bon moment ; nous avons été les premiers à déposer un dossier. Pour une fois, les pouvoirs publics ont eu une idée vraiment géniale. Le fonds de dotation fonctionne comme une fondation, mais avec la souplesse des associations et un statut fiscal relativement incitatif. Certains ont même écrit que les entreprises gagneraient de l'argent avec cette formule. N'exagérons rien : quand on verse 100 euros à un fonds de dotation, 35 sont tout de même pris sur les fonds propres, simplement, cela rend réalisables des choses qui ne le seraient pas autrement.

- Pour l'heure, est-ce Covéa qui finance l'institut Diderot ?

- Ce sont les quatre mutuelles : MMA, MAAF, GMF et AM.

- Vous accueillerez d'autres sociétés, d'autres entreprises du secteur de l'assurance ou d'un autre secteur?

- D'autres sociétés d'assurances peut-être pas, mais d'autres entreprises, d'autres collectivités, pourquoi pas ? Simplement, nous ne pouvons pas faire comme les financiers : nous ne cherchons pas l'argent avant d'avoir prouvé. Nous voulons prouver avant de chercher de l'argent.

- Si vous voulez apporter des preuves, comment aller vous procéder ?

- Nous cherchons à produire des documents de synthèse sur un certain nombre de sujets de société. Deux terrains nous intéressent particulièrement. D'abord, ce qu'on pourrait appeler la civilisation de l'automobile. Nous vivons une société qui est le fruit de l'automobile. Tout en découle : l'habitat, les loisirs. D'où cette question : en quoi l'évolution de ce moyen de transport va impacter cette civilisation ? Deuxième sujet, quelles vont être les conséquences sociétales du développement des technologies de l'information et de la communication (TIC). Dans son usage grand public, Internet a quinze ans. Au regard de ce que durent les civilisations, c'est très peu. Pourtant, on observe des modifications énormes liées au TIC. A mon avis, ces conséquences sociétales seront à peu près aussi importantes que celles générées par l'automobile au cours du XXe siècle.

- Comment allez-vous "recruter" les experts qui vont se pencher sur ces sujets ?

- Chacun de nos membres a un cercle relationnel extrêmement riche de gens toujours prêts à coopérer et ce, je le précise, gracieusement.

- Evoquerez-vous les problèmes de management, l'une de vos passions ?

- Nous n'y avons pas pensé encore, mais c'est vrai, ce ne serait pas mal. Encore que, moi, je sois assez pessimiste sur la capacité d'améliorer les choses.

- Selon vous, peut-on expliquer la multiplication de suicides dans une grande entreprise juste par des méthodes de management critiquables ?

- Premièrement, l'honnêteté oblige à ne pas donner un avis sur des questions qu'on ne connaît pas vraiment de l'intérieur. Deuxièmement, le management est devenu infernal et, quand cela marche, c'est toujours un miracle. Peut-être y a-t-il des gens qui ont du talent, cela doit exister, je pense surtout qu'il y a des gens qui ont de la chance. Quand, pour gérer une grande entreprise, vous devez prendre en compte tout ce qu'on vous demande, avec des pouvoirs publics qui exigent qu'il n'y ait pas de problème... On a l'impression que ceux qui ont légué le plus au management du pays, ce sont les caporaux et adjudants de l'armée d'autrefois : pas de tête qui dépasse, pas de problème, je ne veux entendre parler de rien... Or les objectifs qui sont assignés aux dirigeants sont redoutables. Il faut mettre tout le monde d'accord sur l'éthique, régler les problèmes sociaux, écologiques dont on ne tenait pas suffisamment compte auparavant. Les problèmes économiques traditionnels sont dans le même temps devenus extrêmement difficiles à résoudre avec l'ouverture des frontières, l'instabilité des relations économiques internationales, des monnaies, des marchés. De même les problèmes classiques industriels et techniques avec des technologies qui évoluent de manière fantastique. Cela en fait des considérations ! Et on dit au manager : il faut que ça marche, il faut gagner des sous, il faut que tout le monde soit heureux. C'est vraiment devenu extrêmement difficile. Cela dit, c'est vrai, certains managers sont désinvoltes et inconscients de toutes ces dimensions. On a célébré les grands gourous de "l'equity" au cours des dix dernières années qui arrivaient dans l'entreprise dont ils ne connaissaient rien, ni l'histoire, ni le métier et qui disaient : "vous allez voir ce que vous allez voir." Le management déplorable qui en a suivi a souvent abouti à des échecs, même pour eux. Si vous achetez une entreprise sur la base de 10% de rentabilité du capital, et souhaitez passer à 20%, pour revendre le double, ce n'est pas tenable sur la durée, mais peu importe puisque vous laisserez votre successeur gérer cela. Ce constat vaut pour les reprises par des fonds spécialisés, mais on a vu aussi des patrons traditionnels faire preuve de désinvolture, des consultants un peu trop imprégnés de culture internationale qui se promènent avec leur boîte à outils....

- Les très grandes entreprises ne sont-elles pas plus difficiles à manager ?

- Il est certain que la taille, notamment la dimension mondiale, internationale des entreprises a contribué à cette dégradation du management en introduisant beaucoup de contraintes à caractère économique et financier. Il y a également une dimension dont on parle peu : les différences culturelles. Quand on aborde les autres cultures, il existe des déphasages qu'on ne parvient pas à maîtriser Cela pose d'énormes problèmes.

- Pourtant, dans le monde mutualiste que vous connaissez bien, la course à la taille est une tendance forte. Et vous n'y avez pas échappé...

- Vous m'avez posé la question sur la qualité du management. Ce n'est pas la taille en elle-même qui rend le management encore plus difficile, mais la complexité qu'elle peut induire. Par exemple, qu'une entreprise d'assurances mutuelle en France fasse un milliard ou dix milliards d'euros de chiffre d'affaires, cela change sa taille, mais pas nécessairement la complexité de ses activités. C'est en revanche le cas quand vous passez au niveau international ou quand vous changez de métier. Pourquoi AIG, la plus belle société d'assurances dans le monde, a bu le bouillon ? Parce 300 personnes dans une petite filiale à Londres pratiquaient un métier que personne ne comprenait.

- Comment se prémunir contre ce risque ?

- On ne peut pas être présent dans le monde entier sans atteindre un certain degré de complexité, mais on n'est pas obligé d'en ajouter en faisant des métiers qu'on ne connaît pas : l'achat de réhausseurs de crédit américains par des institutions financières françaises qui n'y comprenaient rien est l'exemple caricatural de ce qu'il ne faut pas faire

- AIG ayant failli, est-il légitime que cet assureur continue à exercer son activité comme si de rien n'était ?

- Le premier problème qu'on doit poser est celui de la responsabilité des entreprises. En France, c'est quelque chose de nouveau, mal connu, mal apprécié. Ce n'est pas le cas aux Etats-Unis. Quand un actionnaire américain mécontent attaque une entreprise de son pays, il peut obtenir un dédommagement, ce qui est assez ahurissant dans la mesure où c'est la collectivité des actionnaires qui va payer des actionnaires. Sur un plan conceptuel, c'est très bizarre. Là, si on casse AIG, qui va être pénalisé ? Les actionnaires et le personnel, qui n'ont aucune responsabilité dans la faillite de l'entreprise.

- Les actionnaires n'ont-ils pas leur part de responsabilité ?

- Dans le capitalisme américain, les vrais capitalistes sont les managers. Les actionnaires leur font crédit en apportant des capitaux et sont rémunérés sur les résultats. Quel est l'actionnaire américain qui a son mot à dire ? Les fonds de retraite veulent être informés de manière parfaitement honnête, tous en même temps, mais ils ne veulent pas prendre part à la décision. Les actionnaires délèguent totalement aux managers. C'est pourquoi ces derniers peuvent se voter les bonus que l'on connaît. Quand vous assistez aux assemblées générales, les actionnaires individuels ne sont jamais d'accord sur les bonus. L'actionnaire, c'est un créancier à risque, ce n'est pas le dirigeant de l'entreprise ; c'est une vue totalement erronée. En France, c'est un peu moins vrai, même si le modèle américain progresse.

- Ne comptez-vous pas aborder à l'Institut Diderot, des sujets liés à l'assurance et à la protection sociale, comme le déficit de la sécurité sociale ?

- Nous ne pouvons pas traiter tous les sujets et beaucoup de monde se penche déjà sur celui-là. En fait, pour qu'un problème soit résolu, il faut le comprendre, vouloir prendre des décisions adaptées et le pouvoir. Pour des problèmes tels que le système de santé ou le financement des retraites il n'y a pas de problèmes de compréhension : il y a pléthore de travaux de qualité. Il manque la volonté, qu'essaient de promouvoir des "think tanks" et des lobbies et la capacité, qui appartient aux pouvoirs publics. Dans la mesure où nous nous plaçons au niveau "du comprendre" nous ne pourrions être utiles. Mais nous aborderons des sujets de toute nature, par exemple les nanotechnologies. Avec une approche originale puisqu'il s'agira d'en analyser les conséquences en terme de civilisation. Le développement des nanotechnologies va-t-il changer la face de l'industrie ou le rapport des forces entre les différentes économies au plan mondial ? Nous ne sommes pas un « think tank » au sens habituel du terme, puisque nous ne sommes au service d'aucun groupe social ou politique.

- Vous êtes tout de même issu d'un groupe mutualiste... Défendez-vous l'idée d'un mutualisme européen ?

- La France a une bonne tradition de ligne Maginot. En matière d'assurance, les mutuelles représentent un moyen de résister à la pression étrangère qui est extrêmement efficace. Mais, pour conquérir les marchés internationaux, la forme mutuelle est un handicap. Le Gema [groupement des entreprises mutuelles d'assurance] souhaite la création d'un statut de mutuelle européenne. Nous préconisons plutôt une Sgam [société de groupe d'assurance mutuelle] européenne, c'est-à-dire la réunion des entreprises et non pas la réunion des sociétaires. Ce n'est déjà pas si facile de gérer des sociétaires au niveau national, en gérer au niveau international avec les différences de cultures, c'est impossible.

- Le déficit de la sécurité sociale vous inquiète-t-il ?

- Il n'y a qu'une seule vraie solution, mais il n'est pas sûr qu'on puisse la mettre en place : c'est la croissance. Un taux de croissance de 3% permettrait par exemple au pouvoir d'achat des retraités d'augmenter ce qui compenserait la baisse du taux de remplacement des retraites. Mais depuis 1998, la croissance globale de la France est de 14%, ce qui ne fait pas 1,4% par an en moyenne. C'est là le vrai problème des retraites, du chômage, des déficits publics... A cause de toutes nos contraintes, de tous nos blocages, on ne parvient pas à embrayer la vitesse supérieure. Pourtant, 3% ce n'est pas non plus hors d'atteinte. Il n'y a pas si longtemps que cela, la France était le 9ème pays au monde en termes de PNB par tête, elle est maintenant 38ème.

- Qu'est-ce qui est en cause ?

- Toutes les rigidités. Je ne vais pas vous refaire le rapport Attali... Mais la pierre angulaire de nos problèmes, c'est la capacité financière et on ne peut l'obtenir que dans le développement. La première solution est d'assurer un certain développement économique pour financer la retraite et la Sécurité sociale. Mais pour la Sécurité sociale, ce qui va finalement se passer, résultera de l'absence de décision. La consommation médicale va augmenter et l'assurance maladie obligatoire va continuer son repli car dans dix à vingt ans, la totalité de ses moyens sera captée par les affections de longue durée. Il faudra bien que les Français se débrouillent par ailleurs.

- Selon vous la Sécurité sociale ne couvrira plus que les gros risques dans l'avenir ?

- Oui, cela va se passer ainsi, cela ne peut pas se passer autrement dans la mesure où personne ne prendra de décision...Qu'on le veuille ou non, l'absence de décision mène à cela.

- Mais le coût des complémentaires santé va s'envoler. Comment feront les assurés ?

- Ils s'habitueront.

- Les consommateurs ne seront-ils pas contraints de choisir entre épargner pour leur retraite ou payer une complémentaire santé ?

- Je pense qu'on va devenir plus performant et plus intelligent. Aujourd'hui, les complémentaires sont traitées comme des supplétifs. Elles interviennent là où la Sécurité sociale leur demande de le faire et dans la proportion qu'elle leur indique. Et, en permanence, la position publique, c'est "alignez-vous, faites ce qu'on vous dit", sinon on vous supprime ceci ou cela...De ce fait, les complémentaires ne sont pas très performantes, parce qu'elles ne peuvent littéralement pas l'être. La valeur ajoutée de l'assurance maladie complémentaire est nulle, cela consiste à savoir calculer la différence entre 100 et 70. Il faut dépasser ce stade et, nous le revendiquons en permanence.

- Que proposez-vous ?

- Les mutuelles n'ont pas le droit d'avoir accès au dossier individuel de santé. Elles ne connaissent pas la pathologie des malades. Elles ne peuvent donc pas intervenir auprès des assurés, les conseiller...Si l'on veut avoir une vue intelligente, il faut pouvoir, à travers des médecins - et non des administratifs - suivre la situation des malades. Il faut ensuite faire des actions de prévention adaptées. Enfin, il faut orienter les malades soit sur des établissements de soins qui pourraient appartenir aux mutuelles complémentaires, soit vers des réseaux de soins partenaires. La mutation de la chirurgie hospitalière vers la chirurgie ambulatoire aurait été infiniment plus rapide si on avait eu notre mot à dire. La France a été le dernier pays à le faire. Pourquoi ? Parce qu'il fallait remplir les hôpitaux, parce que leurs budgets en dépendaient.

- Des réseaux mis sur pied par les complémentaires, cela existe déjà. Vous avez créé Santéclair. N'est-ce pas efficace ?

- Le poids des lobbies reste fort. Santéclair avait par exemple lancé une opération sur les audioprothèses qui avait conduit à réduire de 30 à 50% leur coût. Dans un premier temps, un fabricant avait donné son accord. Le temps que nous proposions aux autres fabricants d'intégrer notre réseau, le premier était revenu sur sa décision ! La même chose s'est produite pour les patchs anti-tabac avec les laboratoires, parce qu'en réalité, on vit dans un monde d'oligopoles et il y a des ententes partout.

- Que faudrait-il pour que ce type de démarche soit une réussite ?

- Pour qu'un réseau de santé puisse négocier véritablement avec un prestataire de soins, il faut représenter 20-25% de son chiffre d'affaires. En dessous de 20%, vous ne pouvez rien lui demander.

- Combien d'assurés un réseau doit-il représenter pour garantir un niveau d'activité suffisant aux prestataires ?

- A mon avis, il faudrait une dizaine de millions de personnes. Santéclair en représente 5 millions.

- Santéclair est déjà une plate-forme commune à MAAF, MMA et Allianz (ex-AGF), pourquoi ne pas conclure d'autres alliances ?

- Il y a des problèmes de chapelle entre des organismes de nature différente, des mutuelles santé, des institutions de prévoyance, des assureurs... Mais cela va se faire parce que, si les complémentaires ne veulent pas purement et simplement être nationalisées, de fait ou de droit, il faut impérativement qu'elles se développent dans la gestion de la santé ce qui passe soit par des achats d'établissements soit par des accords avec des réseaux et là, la taille est absolument essentielle.

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