Luc Chatel fait le choix d'un aménagement prudent du lycée

Le ministre de l'Education, Luc Chatel, a détaillé ce jeudi la réforme du lycée, axée sur une meilleure orientation et un rééquilibrage des filières.

Cela aura pris presque un an au gouvernement pour parvenir à une réforme du lycée qui ne mette pas le feu aux poudres. Ce matin, lors de l'inauguration du salon européen de l'Education, Porte de Versailles, le ministre de l'Education nationale a détaillé le projet dont le chef de l'Etat avait annoncé les grandes lignes il y a un mois. Cette réforme, qui sera soumise au Conseil supérieur de l'éducation le 10 décembre, entrera en application à partir de 2010 pour la classe de seconde.

Loin de vouloir "faire table rase du passé", cette réforme vise avant tout à "corriger les dysfonctionnements" du système actuel tout en étant comprise par les lycéens et la communauté éducative. D'où une architecture générale préservée (y compris les horaires globaux d'enseignement que ce soit pour les lycéens ou les professeurs), à l'inverse du projet avorté de Xavier Darcos. La réforme comprend sept grands "points d'entrée".

Une meilleure orientation des élèves et un rééquilibrage entre les filières

"Un étudiant sur sur deux échoue à la fin de sa première année à l'université parce qu'il a été mal orienté ou mal préparé à l'enseignement supérieur", selon Luc Chatel.

Ainsi, pour lutter contre l'effet "gare de triage" et les trop nombreux redoublements, la seconde, généralisée, devient une véritable "seconde de détermination". Si certaines disciplines conservent leur format actuel (langue vivante 3, langues anciennes, EPS), l'élève devra opter, au lieu des trois heures hebdomadaires d' "enseignement de détermination", deux "enseignements d'exploration" de 1h30. L'un deux portera obligatoirement sur l'économie. "La crise a révélé le besoin de davantage de notions connues de tous en économie. Au moins une fois dans leur vie, tous les élèves doivent avoir été sensibilisés à l'économie", a déclaré le ministre.

L'élève de seconde choisira son deuxième "enseignement d'exploration" entre plusieurs spécialité telles que biotechnologies, méthodes et pratiques scientifiques, arts, conception de produits industriels, sciences médico-sociales, etc..., si tant est que son établissement les propose toutes et là, rien n'est moins sûr. La langue vivante 2 redevient obligatoire.

La classe de première sera elle plus généraliste qu'aujourd'hui avec un tronc commun de 15 heures incluant français, histoire-géographie, EPS, éducation civique et langues vivantes. Et surtout, le parcours choisi (L, SE ou S) ne sera pas "irréversible", des stages de remise à niveau devant faciliter les passerelles d'une filière à l'autre.

"Les changements de série seront beaucoup plus faciles au cours ou en fin d'année," a assuré Luc Chatel, qui veut reconnaître le "droit à l'erreur" des lycéens. Ces "stages-passerelles", pendant les vacances, permettront de passer d'une série à l'autre, d'autant plus facilement qu'en première est créé un "tronc commun" avec "un même contenu, les mêmes horaires et un même programme", a-t-il expliqué.

Enfin, la terminale laissera plus de place aux enseignements spécialisés. Les TPE sont maintenus en seconde et première, ce qui satisfait les syndicats. Mais le maintient des SES en option, réduite à 1h30, a déjà fait bondir l'Apses (Association des professeurs de sciences économiques et sociales), qui a appelé à manifester les 24 novembre et 2 décembre. Le ministère argue que cet enseignement d'exploration, proposé en deux thématiques (sciences économiques et sociales ou économie appliquée et gestion) est obligatoire alors qu'auparavant, "seulement" 43 % des élèves de seconde choisissaient cette option. Mais cette obligation ne vaudra pas pour tous : des sortes de dérogations sont déjà prévues, notamment pour les élèves de L qui souhaiteraient remplacer l'économie par du latin, du grec, une langue vivante 3 ou les arts….

L'un des objectifs de la réforme est ainsi de rééquilibrer les filières : de "respécialiser" la filière S avec un renforcement du niveau en sciences, mais surtout de revaloriser la L en en faisant une section internationale plus préparée à l'enseignement supérieur. Cette dernière comportera notamment un cours de "littérature en langue étrangère" et un enseignement portant sur le "droit et les grands enjeux du monde contemporain" préparant aux études juridiques et études politiques.

Apprentissage des langues

L'apprentissage des langues est mis en avant par la réforme. Tout lycéen devra "au terme de sa scolarité maîtriser deux ou trois langues de communication". Les programmes et horaires, communs aux différentes séries, sont renforcés (entre 4 heures et 5h30 par langue). La filière L bénéficiera par ailleurs de cours en langue étrangère.

Accompagnement personnalisé et soutien scolaire

Grande nouveauté, dans la veine de ce qui se fait déjà en primaire et au collège, tous les lycéens bénéficieront de deux heures d'accompagnement personnalisé "adapté" à l'élève (soutien, approfondissement), lié à la dominante de la filière et assurée par les enseignants.

Les élèves pourront bénéficier de stages (pendant l'année et les vacances) de remise à niveau (pour éviter les redoublements) ou "passerelle" (pour changer de voie), mais aussi d'un tutorat pendant toute leur scolarité.

Autonomie des lycées

Les lycées ont vocation à gagner en autonomie, notamment pour organiser les deux heures d'accompagnement personnalisés.

Vie lycéenne

C'est l'une des parties les moins abouties. Tout sera fait pour " favoriser la responsabilisation des lycéens" mais certains arbitrages ne sont pas encore rendus (rôle des différents conseils, élections…).

Face à cette réforme, ce n'est pas l'enthousiasme chez les syndicats, qui attendent toujours que soit aussi précisée la rénovation de la voie technologique. Si certains, comme le SE-Unsa et le SGEN-CFDT estiment ces propositions intéressantes, la plupart regrettent son manque d'ambition et craignent que son application, qui nécessite selon eux des moyens supplémentaires, risque d'être problématique, dans un contexte de suppressions de postes massifs. Les nouvelles compétences demandées aux enseignants devront être prises en compte dans leur formation, en cours de réforme elle aussi.

Quant aux enseignants, ils risquent de se satisfaire encore moins des propositions de revalorisation de carrière en cours de négociation (deux scénarios leur ont été proposés ces derniers jours) qui sont déjà jugées insuffisante.

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