Travail illégal, travailleurs sans-papier : les propositions du gouvernement

Le ministre du Travail Xavier Darcos a donné ce jeudi les teneurs d'un plan contre le travail illégal, dont les grandes lignes avaient déjà été évoquées dimanche dernier. Pour tenter de trouver une solution à la grève des travailleurs sans-papiers qui perdure depuis six semaines, le ministre de l'Immigration Eric Besson a par ailleurs détaillé mercredi une nouvelle circulaire d'attribution de cartes de séjour temporaires.

Le ministre du Travail Xavier Darcos a ciblé ce jeudi les quatre priorités d'un "plan national" contre le travail illégal pour 2010-2011 : travail dissimulé, emploi d'étrangers sans titre de travail, recours frauduleux à des statuts spécifiques (comme l'intermittente ou les stages) et fraudes transnationales.

Par ailleurs, cinq secteurs d'activité seront particulièrement visés : hôtels-restaurants, BTP, services aux entreprises, spectacle, travail saisonnier et agriculture.

Le ministre s'exprimait à l'issue d'une réunion de la Commission nationale de lutte contre le travail illégal réunissant administrations et organisations syndicales concernées. La plupart des mesures de ce plan avaient été dévoilées dès dimanche dernier.

Des sanctions supplémentaires

Au chapitre des nouvelles sanctions, le ministre a confirmé la menace de fermeture administrative des entreprises fonctionnant avec du personnel non déclaré.

L'indemnité due en cas de perte d'emploi du fait de son caractère illégal sera fixée à six mois de salaire, y compris pour les étrangers sans titre de travail pour laquelle elle est actuellement d'un mois, a précisé le ministre.

Les donneurs d'ordre n'agréant pas leurs sous-traitants pourront désormais encourir des sanctions pénales et une inévitabilité aux appels d'offre, et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 prévoira une extension de la remise en cause de leurs charges sociales.

Enfin 150 agents supplémentaires seront affectés en 2010 à l'inspection du Travail. Le ministre a fixé "des objectifs à atteindre" comme "augmenter d'au moins 5% le nombre de procès-verbaux en 2010" qui se sont élevés à 8.764 en 2008, et "récupérer 120 millions d'euros au moins au titre du travail dissimulé" à travers les redressements de cotisations sociales par l'Urssaf, qui s'élevaient à 108 millions d'euros en 2008.

Le ministre a souhaité à l'occasion de cette réunion séparer le dossier du travail illégal de celui des travailleurs sans papiers, dont 5.500 sont en grève depuis plus de six semaines.

Les onze syndicats et associations soutenant le mouvement des sans-papiers en grève ont également dénoncé jeudi "l'amalgame" entre les deux dossiers. "L'essentiel du travail dissimulé ne concerne pas les travailleurs sans papiers. Et ceux qui sont [des travailleurs sans papiers] n'aspirent qu'à cotiser. Une grande partie des travailleurs sans papiers cotisent, paient leurs impôts et ne sont donc pas en situation de travail non déclaré", expliquent les signataires parmi lesquels la CGT, CFDT, FSU, Solidaires, Unsa, la Ligue des droits de l'homme, RESF, et la Cimade.

Nouvelle circulaire Besson

Concernant les sans-papiers, le gouvernement a détaillé mercredi une nouvelle circulaire d'attribution de cartes de séjour temporaires à des salariés sans papiers, afin de répondre au mouvement de grève actuel. La circulaire fait notamment suite aux plaintes des onze syndicats et associations soutenant le mouvement, en bute à l'"arbitraire préfectoral" dans les dossiers de régularisation qu'ils défendent.

Après plusieurs réunions avec les syndicats et s'être aperçu lui-même qu'il y avait "deux poids, deux mesures", le ministre de l'Immigration Eric Besson a accepté une harmonisation.

La loi sur l'immigration, votée après la présidentielle de 2007, a introduit une possibilité de régularisation par le travail dans les secteurs dits "en tension" et à condition d'avoir une embauche ferme. Selon la circulaire, peuvent prétendre à une régularisation les salariés sans papiers embauchés avant juillet 2008 justifiant de leurs "capacités d'intégration".

Ils doivent ainsi avoir "au moins cinq ans d'ancienneté de séjour en France", un "contrat de travail CDI ou CDD d'un an ou plus" et "douze mois ou plus de travail dans l'entreprise", sous-entendu déclaré à l'Urssaf. La régularisation restera subordonnée à la situation de l'emploi examinée dans la région.

Parmi les "avancées" saluées par les syndicats et associations, les intérimaires, nombreux parmi les grévistes, pourront faire reconnaître des périodes d'activité discontinues. En revanche, la question des travailleurs algériens et tunisiens reste en suspens, de même que les dossiers de nounous ou aides à domicile travaillant au noir. Interrogé sur le sort de ces femmes, Eric Besson a renvoyé sur "une appréciation au cas par cas laissée aux préfets".

L'économie peut-elle fonctionner sans les immigrés ?

Pour protester contre le sort fait aux travailleurs sans-papiers, un collectif s'est créé autour une idée de boycott économique. "Et si le 1er mars 2010 les immigrés s'arrêtaient de travailler et de consommer pendant 24 heures ?" Ce projet d'action a récemment pris de l'ampleur sur le Net (www.lajourneesansimmigres.org ; un blog et une adresse Facebook ont également été créés).

La présidente du collectif à l'origine de l'initiative, Nadia Lamarkbi, s'est inspiréd'un mouvement de protestation mené aux Etats-Unis par les Latinos-américains en 2006. "Ce retrait de la vie économique vise à montrer que les immigrés sont une richesse au sens propre et figuré, des éléments de l'économie et de la société", a-t-elle déclaré. "C'est notre manière de réfléchir sur la place des immigrés et de leurs descendants en plein débat instrumentalisé sur 'l'identité nationale' et de réclamer le respect".

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