Les ostéopathes réclament une plus grande réglementation de leur formation

Malgré l'encadrement des pratiques de la profession, les écoles d'ostéopathie obtiennent facilement l'agrément. Elles sont aujourd'hui trop nombreuses et surtout de qualité très inégale. Les jeunes diplômés, dont le nombre a doublé en quatre ans, ont de plus en plus de mal à s'installer.
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Il y a un mois, les étudiants ostéopathes manifestaient dans toute la France pour protester contre? leur trop grand nombre. Etonnant ? La profession se retrouve aujourd?hui confrontée à un paradoxe. Longtemps hors la loi, elle pouvait s?attendre à une meilleure reconnaissance et un meilleur encadrement après la loi de mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui autorise la pratique de l?ostéopathie sous certaines conditions. Or c?est presque le contraire qui est en train de se produire, avec un trop grand nombre d?écoles de qualité inégales et, conséquence, l?arrivé sur le marché du travail de trop jeunes diplômés parfois mal formés.

De bac + 3 à bac + 6

Comment en est-on arrivé là ? Tout d?abord, les textes d?application de la loi de 2002 qui réglementent les conditions d?exercice et de formation n?ont été publiés qu?en? 2007. L?objectif était qu?une commission composée de divers personnalités qualifiées (kinésithérapeutes, ostéopathes, région, préfet?) agrée toutes les écoles alors en activité. Une première série de quatorze écoles ont ainsi été agréées en 2007. Mais la machine s?est ensuite emballée. Par manque de "précisions" peut-être, les services du ministère de la Santé ont fait ensuite peu de cas des avis formulés par cette commission, même négatifs, explique Philippe Sterlingot, président du syndicat français des ostéopathes (SFDO). Et quand des rejets ont été notifiés, ils ont été à quasiment à chaque fois, par manque de précisions, contestés avec succès par les écoles qui ont ainsi créé une jurisprudence.

Une enquête de l?inspection générale des affaires sociales (IGAS) aurait rendu au ministère de la santé un rapport critique sur le sujet en 2010 mais il n?a jamais été rendu public. Résultat ? "Nous comptons aujourd?hui 49 écoles - bientôt 53 ? de qualité très hétérogène, qui vont de l?excellence à la médiocrité. Certaines valident leur formation à bac + 3, d?autres à bac + 6, sachant que l?OMS recommande au minimum Bac + 5. Certains diplômés sont dépourvus de formation pratique", déplore Philippe Sterlingot.

Du coup, les diplômés arrivant sur le marché sont de plus en plus nombreux. On compte aujourd?hui 14.500 ostéopathes dont la moitié sont "exclusifs" (environ 40% étant aussi kinésithérapeutes et 10% médecins). En 2007, ils étaient à peine 8.000. Sachant que les écoles en diplôment chaque année 2.500, le "stock" va continuer à grossir, puisque cette profession est jeune et que les départs à la retraite sont encore rares. A ce rythme, les 20.000 pourraient être atteints en 2020, craint le SFDO, à moins que la baisse des demandes d?inscription dans les écoles observée cette année se poursuive. Les jeunes diplômés ont donc de plus en plus de mal à exercer. "C?est un vrai problème économique ! Les zones où les jeunes peuvent s?installer sont rares et certains ne facturent pas plus d?une quarantaine d?actes par mois, cinq ans après leur installation. Cent trente professionnels ont stoppé leur activité sur les six derniers mois", constate Philippe Sterlingot. Selon l?Union fédérale des ostéopathes de France (UFOF), entre 2008 et 2009, les ostéopathes auraient subi en moyenne une baisse de leurs bénéfices de 12%. Un comble quand on sait que les formations coûtent en moyenne 7.000 euros par an.

Conventions universitaires

Pour éviter une dévalorisation accrue du métier, les syndicats professionnels montent donc actuellement au front pour alerter les futurs étudiants et ?uvrer pour un meilleur encadrement. "L?idéal serait que ne subsistent que 5 à 10 écoles au plus. A titre d?exemple, le Royaume-Uni n?en compte que 8. Actuellement en France, seule une dizaine ont obtenu en janvier une certification professionnelle (RNCP), ont signé des conventions Erasmus, proposent suffisamment de stages pratiques et disposent d?équipes pédagogiques d?expérience", indique Philippe Sterlingot.

Dans ces conditions, la profession muscle sa communication et son lobbying afin que le ménage soit fait dans les formations et que ces dernières soient revalorisées. Elle espère surtout que paraisse bientôt le texte en préparation qui doit, dans le cadre de la loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires) de 2009, porter de 2.660 heures (3 années d?études) à 3.520 heures le nombre minimal d?heures de formation (4 ans). A plus long terme, la profession espère que se mette en place une formation de niveau master (bac + 5), notamment via des conventions universitaires, ce qui permettrait aux étudiants d?effectuer des stages en milieu hospitalier voire de poursuivre en doctorat. En attendant, le SFDO s?est lancé dans une campagne de recours contre une trentaine d?agréments accordés un peu trop facilement.

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