Quand la cour des comptes enterre la retenue à la source de l'impôt

Le conseil des prélèvements obligatoires (rattaché à la Cour des comptes) entend clore des années de débat sur l'instauration d'une retenue à la source de l'impôt: celle-ci ne présenterait aujourd'hui pas beaucoup d'intérêt.
Didier Migaud, président de la Cour des comptes. Les sages soulignent que la retenue à la source, en vigueur dans la plupart des grands pays industriels, y a été instaurée pour faire rentrer plus rapidement les recettes fisales dans les caisses des administrations. Photo : Reuters

Voilà un rapport qui a le mérite d'être clair, puisqu'il entend mettre fin à des années de débats récurrents, de polémiques plus ou moins techniques. Dans un document rendu public ce jeudi, le conseil des prélèvements obligatoires, organisme rattaché à la Cour des comptes, explique pourquoi, de son point de vue, l'instauration d'une retenue à la source ne présente plus d'intérêt en France. En revanche, une imposition l'année n, plutôt que n+1, avec un an décalage, permettrait d'améliorer la situation de nombre de contribuables. La retenue à la source a pour avantage théorique d'éviter au contribuable un certain nombre de formalités fiscales, et lui permet d'encaisser chaque mois un salaire net d'impôt, dont il dispose réellement. En théorie. Car "au regard de la complexité de l'impôt sur le revenu en France"; il paraît difficilement envisageable de permettre au contribuable de "disposer d'un revenu véritablement net d'impôt". Pour le dire très simplement, il croirait avoir payé tout son impôt, alors qu'en réalité, le fisc se rappellerait à lui en fin d'année, lui demandant une rallonge substantielle. Ou, à l'inverse, le salarié-contribuable paierait trop, accumulant une créance sur l'administration fiscale.

Une technique d'abord au service des administrations

La magistrants de la rue Cambon le soulignent, la retenue à la source, en vigueur dans la plupart des grands pays industriels (la France est le seul pays de l'OCDE à ne pas la pratiquer, avec la Suisse et Singapour..), y a été instaurée non pas pour faciliter la vie des contribuables, mais pour faire rentrer plus rapidement les recettes fisales dans les caisses des administrations. Aujourd'hui, le sujet n'est plus d'actualité: avec la mensualistion de l'impôt (72% des contribuables l'ont choisie), le fisc encaisse rapidement les recettes attendues..
Le Conseil des prélèvement obligatoire (CPO) constate "que les avantages sont réels mais que les inconvénients existent et que la balance en l'état actuel peut être plutôt en faveur des inconvénients que des avantages", a déclaré son président Didier Migaud , en présentant le rapport. "Seuls deux arguments subsistent en sa faveur", affirme le rapport. Il présente un avantage pour les personnes subissant une chute importante de leurs revenus, en raison par exemple d'une perte d'emploi ou d'un divorce, car il permet un ajustement rapide de l'impôt. Et il a une plus grande réactivité aux réformes fiscales.
"D'autres mesures permettent probablement de se rapprocher de cet objectif à moindre coût pour le contribuable, pour les entreprises et pour l'administration", estime Didier Migaud . "Sa pertinence pourrait être réexaminée s'il était décidé de procéder à une réforme profonde de l'imposition des ménages". Autrement dit, une "révolution fiscale" telle que préconisée par l'économiste Thomas Piketty, qui simplifierait drastiquement l'impôt. Mais nul ne la propose aujourd'hui: François Hollande a mis beaucoup d'eau dans le vin de sa réforme fiscale, renvoyant à une échéance lointaine la fusion de l'impôt de le revenu et de la CSG. C'est qu'en matière fiscale, les transferts de charge sont à manier avec précaution: le gagnants se taisent, les perdants savent au contraire se faire entendre.

Commentaires 5
à écrit le 17/02/2012 à 18:43
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Prélevé à la source, l'impôt ne permettrait malheureusement plus de jouir des astuces de fiscalité (niches, vous avez dit niches ?) et surtout, que faire des fonctionnaires embauchés pour le calcul, l'envoi et le recouvrement de l'impôt ? Toujours p...

à écrit le 17/02/2012 à 8:59
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De nombreux pays pratiquent la retenue à la source et en sont très satisfaits. On ne voit pas pourquoi ce ne serait pas applicable en France.

le 17/02/2012 à 11:12
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Poser la question, c'est y répondre : tout simplement parce que ...c'est la France!

le 17/02/2012 à 13:37
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Cela ne peut s'appliquer en France pour la bonne et simple raison qu'en France tout est bordélique, les calculs effectués seraient faux pour les 3/4: qui sait encore compter en France ? Certains se retrouveraient plumés et perdants pendant que d'a...

le 17/02/2012 à 22:47
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Ne pas oublier que le fort de taux de bancarisation est une exclusivité française. On peut prélever sur le compte bancaire courament en France, plus difficile à l'Etranger sur des comptes rarement existant. En plus, on peut avoir un système très opaq...

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