Le verdict est tombé : au terme d'une longue journée où l'annonce du nouveau gouvernement a été reportée plusieurs fois, le secrétaire général de l'Élysée Pierre-René Lemas a annoncé le nom des 34 personnalités qui travailleront sous l'égide du Premier Ministre Jean-Marc Ayrault. Il se compose de 34 ministres, dont 17 femmes, ce qui correspond à la parité promise par François Hollande.
Le président de la République et son Premier ministre ont composé un gouvernement susceptible de servir toutes les chapelles socialistes. Le numéro deux du gouvernement est Laurent Fabius, avec lequel François Hollande a eu pendant longtemps des relations houleuses. Il hérite du portefeuille du Quai d'Orsay dans cette première équipe gouvernementale où la première secrétaire du PS Martine Aubry est la grande absente. Elle a annoncé dans la matinée qu'elle ne participerait pas au gouvernement pour se consacrer à la campagne des législatives à la tête du PS.
Pierre Moscovici, qui était directeur de la campagne de François Hollande, devient ministre de l'Economie et des Finances. Michel Sapin, qui était donné pour Bercy, prend finalement en main le ministère du Travail, de l'emploi et du dialogue social. Jérôme Cahuzac hérite quant à lui du Budget, comme ministre délégué rattaché à ce grand ministère de l'Economie et des Finances.
Vincent Peillon, qui entre pour la première fois dans un gouvernement, à la troisième place dans l'ordre protocolaire, est chargé de l'Education nationale, la grande priorité du chef de l'Etat. La "hollandaise", Marisol Touraine, prend en charge, sans surprise, les Affaires sociales et la Santé.
Enfin, la guyanaise Christiane Taubira, ex-candidate à la présidentielle en 2002 pour les radicaux de gauche, qui n'a pas répété l'expérience en 2012, est récompensée en devenant Garde des Sceaux. Les Verts obtiennent finalement un seul ministère, récupéré par la secrétaire nationale de Europe-Ecologie-les Verts, Cécile Duflot, au poste de ministre de l'Egalité des territoires et du Logement.
Des attentes et des déçus
Dès l'annonce, les réactions n'ont pas manqué sur la composition du gouvernement. Ainsi, la FNSEA, le principal syndicat agricole français, s'est réjoui de la nomination de Stéphane Le Foll au portefeuille de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. "C'est un bon choix. Nous avons un bon connaisseur de la scène européenne et des questions agricoles", a déclaré Xavier Beulin, qui représente ce syndicat marqué à droite.
Les syndicats de police, eux, ont déclaré attendre du nouveau ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, des réponses au malaise policier qui s'est exprimé récemment par des manifestations à la suite de la mise en examen d'un gardien de la paix pour homicide volontaire.
"Le ministre prend son poste dans une période critique", a déclaré dans un communiqué Nicolas Comte, secrétaire général d'Unité police SGP-FO (premier syndicats de gardiens de la paix) "au moment même où une crise morale sans précédent frappe la maison police".
Autre ministre qui suscite des réactions positives : Nicole Bricq, la ministre de l'Ecologie. France Nature Environnement (FNE), fédération regroupant 3.000 associations environnementales, estime que le choix est un "gage de sérieux" et salue le retour de l'énergie dans le périmètre du ministère de l'Ecologie, estimant qu'il n'était "pas possible d'envisager une transition écologique sans une transition énergétique solide".
Les restaurateurs, quant à eux, ont fait savoir qu'ils regrettent que le tourisme n'ait pas un ministère dédié. Dans un communiqué, l'Umih, le principal syndicat du secteur, "félicite" la nouvelle ministre mais l'organisation patronale rappelle qu'elle milite "pour la création d'un ministère du Tourisme dédié", qui "engloberait toutes les problématiques du secteur" des cafés, hôtels, restaurants et discothèques et "qui pourrait avoir ainsi une vision transversale répondant aux principaux enjeux du secteur : attractivité de la France, aménagement du territoire, économie locale, petites entreprises, etc."
Les réactions politiques
Candidat déçu au poste de ministre, Jean-Pierre Chevènement, le candidat à la présidentielle de 2002 qui s'est rangé derrière François Hollande en 2012, a exprimé sa déception. "En n'associant pas le Mouvement Républicain et citoyen (MRC), composante républicaine de la majorité présidentielle, le rassemblement est inachevé", écrit dans un communiqué le parti du sénateur de Belfort. Autre déçue du casting gouvernemental : Corinne Lepage. Celle qui n'a pas réussi à obtenir 500 parainnages pour se présenter à l'élection présidentielle, puis qui s'est ralliée à François Hollande, espérait certainement une récompense. Elle en a été pour ses frais, comme elle l'a confié sur Twitter. "Gouvernement #Ayrault : le rassemblement promis dans la campagne ,c'est pour quand?"
Côté PS, Martin Malvy, le président de la région Midi-Pyrénées, s'est félicité de la composition du gouvernement. "C'est une équipe qui saura redresser la France, donnant une claire priorité à la jeunesse, au dialogue social, à la ré-industrialisation, mais affichant aussi la volonté de reprendre le chemin de la confiance et de la coopération entre les collectivités locales et l'Etat", a-t-il déclaré. Claude Bartolone, le président du Conseil général de Seinte-Saint-Denis, se montre tout aussi satisfait. "François Hollande a tenu son premier engagement de campagne : composer un gouvernement marqué par la parité totale et par le renouvellement(..)"
A droite, peu de réactions immédiates lors de la soirée. Jacques Myard, député UMP des Yvelines, parle d'une "véritable armée mexicaine". "A l'évidence au lieu d'avoir une équipe ramassée et soudée pour agir avec cohérence, François Hollande et Jean-Marc Ayrault tentent d'acheter la paix entre les forces centrifuges de la gauche socialiste. Voilà leur première mesure d'économie: 34 ministres, sans compter les secrétaires d'Etat à venir, une véritable armée mexicaine!"
Chasse Pêche Nature et Tradition condamne, quant à lui, la "faible place laissée à la ruralité", qui "ne reçoit que peu d'intérêt, d'autant plus qu'elle semble être mise sous la tutelle de la verte Cécile Duflot, cheftaine d'un parti anti-rural", fustige le parti.
Les 18 ministres de plein exercice du gouvernement de Jean-Marc Ayrault :
Ministre des Affaires Étrangères : Laurent Fabius
Ministre de l'Education : Vincent Peillon
Garde des Sceaux : Christiane Taubira
Ministre de l'Économie, des Finances et du Commerce extérieur : Pierre Moscovici
Ministre des Affaires sociales et de la santé : Marisol Touraine
Ministre de l'Égalité, des Territoires et du Logement : Cécile Duflot
Ministre de l'Intérieur : Manuel Valls
Ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie : Nicole Bricq
Ministre du Redressement productif : Arnaud Montebourg
Ministre du Travail, de l'Emploi et du Dialogue social : Michel Sapin
Ministre de la Défense : Jean-Yves Le Drian
Ministre de la Culture et de la Communication : Aurélie Filippeti
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche : Geneviève Fioraso
Ministre des Droits des femmes et Porte-parole du gouvernement : Najat Vallaud-Belkacem
Ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire : Stéphane Le Foll
Ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique : Marylise Lebranchu
Ministre de l'Outre-mer : Victorin Lurel
Ministre des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative : Valérie Fourneyron
Les 16 ministres délégués :
Ministre délégué au Budget : Jérôme Cahuzac
Ministre déléguée à la réussite éducative : George Pau-Langevin
Ministre délégué aux relations avec le Parlement : Alain Vidalis
Ministre déléguée à la justice : Delphine Batho
Ministre délégué à la ville : François Lamy
Ministre délégué aux affaires européennes : Bernard Cazeneuve
Ministre déléguée aux personnes âgées et à la dépendance : Michèle Delauney
Ministre déléguée à l'artisanat, au commerce et au tourisme : Sylvia Pinel
Ministre délégué à l'économie sociale et solidaire : Benoît Hamon
Ministre déléguée à la famille : Dominique Bertinotti
Ministre déléguée aux personnes handicapées : Marie-Arlette Carlotti
Ministre délégué au développement : Pascal Canfin
Ministre déléguée chargée des Français de l'étranger et de la francophonie : Yamina Benguigui
Ministre délégué aux transports et à l'économie maritime : Frédéric Cuvillier
Ministre déléguée aux petites et moyennes entreprises, à l'innovation et à l'économie numérique : Fleur Pellerin
Ministre délégué aux anciens combattants : Kader Arif