Jean-Yves Le Drian, l'homme qui voulait devenir à tout prix ministre de la Défense

Rarement un politique a autant souhaité être nommé ministre de la Défense. Ce proche de François Hollande s'y est préparé depuis des mois. Deux dossiers chauds l'attendent : le budget et la recomposition industrielle.
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Ce n'est finalement que justice que Jean-Yves Le Drian (64 ans) soit nommé ministre de la Défense. C'est lui qui a fait tout le "job" dès le début de la campagne de François Hollande, qui lui avait confié ces questions stratégiques. C'est encore lui qui est allé depuis le début de l'année à Washington, Londres et Bruxelles, notamment, pour expliquer aux alliés de la France les orientations en matière de défense du candidat Hollande. Il a également maintenu un lien avec tous les ambassadeurs à Paris, qui le souhaitaient pour préciser encore et encore la stratégie de la France en matière de défense. Enfin, c'est lui qui a minutieusement préparé en lien avec les Américains le sommet de l'Otan, qui se tient dimanche et lundi à Chicago, et auquel se rend le président de la République.

C'est peut-être d'ailleurs en partie pour cela que Jean-Yves Le Drian, un proche de François Hollande depuis une trentaine d'années, a été finalement nommé ministre de la Défense. Car l'échéance du sommet de l'Otan était si rapprochée que tout autre que lui aurait eu dû mal à se mettre à niveau pour discuter avec les alliés à Chicago. Pour s'emparer de l'Hôtel de Brienne, le patron de la région Bretagne s'était préparé depuis septembre dernier. "Il a bossé comme un fou", explique un membre d'un petit groupe, qui se retrouvait autour de lui pour discuter des dossiers de la défense. Son expertise lui a finalement permis de repousser des candidats par défaut, à l'image de Laurent Fabius à la bagarre jusqu'au bout avec Pierre Moscovici pour le Quai d'Orsay. Pour une fois, celui qui voulait être ministre de la Défense, a été nommé contrairement à beaucoup d'autres... qui au bout de quelques mois se sont finalement passionnés pour ce ministère si particulier et pour ces hommes, qui risquent leur vie sur les théâtres d'opération extérieure. Déjà en 2007, cet élu de Bretagne, qui soutenait Ségolène Royal, avait été pressenti pour devenir le ministre de la Défense.

Il arrive dans un ministère inquiet

Jean-Yves Le Drian, qui n'avait gardé que ses fonctions de président du conseil régional de Bretagne, arrive dans un ministère inquiet en raison des coupes budgétaires, qui lui sont claironnées depuis quelques mois. Jean-Yves Le Drian est un pragmatique. Vingt ans plus tôt il avait mené une bagarre intense et courageuse en tant que secrétaire d'Etat à la Mer (1991-1992) pour convaincre et faire accepter à la CGT une première réforme du statut des dockers, où le syndicat était toute-puissant. C'est aussi avec beaucoup de réalisme et au-delà de son intérêt d'élu de Bretagne (député-maire de Lorient) qu'il avait soutenu le changement de statut de la DCN, encore arsenal, initié au début des années 2000 par la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie.

Deux dossiers chauds attendent Jean-Yves Le Drian, le budget et la recomposition industrielle. Confronté à une situation économique inextricable en France, la Défense n'échappera pas à de nouvelles économies. Mais peut-elle être une variable d'ajustement ? Non, a juré François Hollande mais "il y aura des efforts à faire, la situation de notre économie et de nos finances publiques nous y contraint. Il y va de notre indépendance même. La défense y contribuera dans les mêmes proportions que les autres missions de l'Etat".

Un chemin des économies difficile

Faut-il toutefois rappeler que les dépenses dans la défense entretiennent une filière industrielle d'excellence en France - qui paie ensuite des impôts... à l'Etat - tant au niveau de l'emploi très qualifié et de l'innovation. Le ministère de la Défense, à travers l'activité de la Direction générale de l'armement (DGA), a investi 10,7 milliards d'euros dans l'industrie au titre des programmes d'armement et de la recherche en 2011. Le chemin des économies est difficile d'autant que "le contexte international n'autorise aucune faiblesse", comme le rappelle lui-même François Hollande. La situation en Iran, la course à l'armement en Asie-Pacifique et l'instabilité du Proche-Orient ne lui facilite évidemment pas la tâche. L'influence de la France dans le monde tient surtout par son effort soutenu dans le temps dans les moyens de sa défense, notamment dans les domaines nucléaire (dissuasion), technologique (ventes d'armes complexes) et opérationnel (capacité à mener des opérations extérieures de grande envergure).

En matière de recomposition industrielle, Jean-Yves Le Drian va devoir ferrailler contre l'influence de la maison Dassault, dont François Hollande souhaite limiter l'influence. "Je n'entends donc déléguer à quiconque cette responsabilité de tracer l'avenir de ces grands groupes industriels de défense et certainement pas à des intérêts privés ou financiers à qui le gouvernement sortant s'est trop souvent plié. (...) Les coopérations industrielles avec des partenaires européens seront encouragées, car elles sont gages de succès futurs". La maison Dassault est clairement dans le viseur.

Pour y voir clair, François Hollande va utiliser la bonne vieille ficelle du Livre blanc. Ce document va définir "les enjeux stratégiques" de la France, expliquait il y a peu de temps encore le candidat, qui souhaitait que soit entreprise "au plus tôt la rédaction d'un Livre blanc de la défense", suivie d'une Loi de programmation militaire avec deux objectifs : répondre aux menaces identifiées et dimensionner nos équipements aussi précisément que possible à ces enjeux.
 

Commentaires 3
à écrit le 17/05/2012 à 11:37
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Bon, puisqu'il faut quelqu'un pour ouvrir un commentaire, voici le mien : Bof

à écrit le 17/05/2012 à 11:28
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Brest, première ville de France par le nombre de fonctionnaires, du fait de la présence notamment de la marine. Les productifs de la région (pêche et lait) vont devoir bosser encore un peu plus. La Bretagne qui a voté massivement à gauche ne pourra d...

le 17/05/2012 à 17:13
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CQFD, la peche bretonne (criée, transformation, ...) est plus développée sur Lorient, Le Guilvinec, Douarnenez, et Concarneau que Brest. Allez au moins faire un tour sur wikipedia avant de poster... Kenavo

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