C'est vers une très faible révision de la prévision de croissance pour 2013 que le gouvernement se dirige. Jean-Marc Ayrault a annoncé mardi soir son intention de «réduire un peu » l'hypothèse de 1,2% formulée au début de l'été. Le gouvernement aurait l'intention de retenir un chiffre proche de 1%. Une révision correspondant à l'épaisseur du trait... Ce chiffre n'est pas encore confirmé par Bercy, mais s'il l'était, le gouvernement se situerait bien au-delà de la moyenne des prévisions des conjoncturistes indépendants : le « consensus forecast » retient le chiffre de 0,5%.
L'exécutif a donc fait le choix de ne pas bouleverser ses prévisions initiales, afin de ne pas remettre en cause les premières ébauches du budget 2013. Une révision plus prononcée aurait contraint à ajuster à la hausse l'effort budgétaire -évalué par la Cour des comptes autour de 33 milliards d'euros-. Le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, avait déclaré qu'une révision de 0,1 ou 0,2 point de la croissance impliquerait un trou dans le budget d'environ 1 à 2 milliards d'euros. Mais, au-delà, le déficit à financer peut être plus important, l'impact d'une très faible croissance étant plus que proportionnel.
Eviter un débat sur les engagements européens
Surtout, afficher un taux de croissance de 0,5% aurait contribué à relancer le débat sur la politique économique et les engagements européens : peut-on vraiment multiplier les hausses d'impôts pour parvenir à 3% de déficit public, quand l'économie est à l'arrêt, ou presque ? Le risque n'est-il pas de la précipiter dans la récession ? Une façon de ne pas atteindre l'objectif de consolidation budgétaire.
Un économiste très écouté par François Hollande, Philippe Aghion, estimait ainsi, début juillet, dans une interview à La Tribune, que l'objectif d'un déficit public ramené à 3% du PIB en 2013 n'était pas tenable avec une croissance sensiblement inférieure à 1%.Selon une note publiée ce jeudi par les économistes de Natixis, vouloir à tout prix parvenir à 3% de déficit en 2013 amputerait la croissance de 0,9 point. La France serait alors en récession en 2013 (-0,2%).
Un budget sincère?
En retenant le chiffre de 1%, le gouvernement va donc s'épargner ce débat. Mais il n'en évitera pas un autre : celui sur la sincérité du budget. Pour avoir dénoncé pendant des années le manque de sincérité des projets de budget présentés par la droite, Jérôme Cahuzac a toujours dit sa volonté de coller aux réalités économiques. Aujourd'hui, cela risque d'être plus difficile. Le débat aura donc lieu sur la « bonne » prévision. L'économiste Karine Berger, élue députée PS en juin, s'apprête ainsi à défendre une prévision gouvernementale qui serait au dessus de consensus. « Les conjoncturistes qui tablent sur 0,5% de croissance en 2013 ne connaissent pas les choix de politique économique » souligne-t-elle. « Il est possible de ramener le déficit à 3% du PIB de différentes façons. Soit en impactant fortement la croissance, soit en prenant les mesures les plus neutres possibles. En outre, le choix qui a été fait de mettre en place rapidement les contrats d'avenir aura un effet positif sur l'activité. C'est une manière de soutenir la demande, qui montre effectivement des signes d'affaiblissement ».