Le Medef, l'Afep, Louis Gallois et les autres...

Fait très rare, la discrète Association française des entreprises privées (Afep) a fait ouvertement parler d'elle en publiant dans le "JDD" un appel solennel en faveur d'un choc de compétitivité de 60 milliards d'euros. Dernier épisode d'une bataille que livrent toutes les composantes du monde patronal contre le gouvernement depuis la rentrée, alors que l'UMP est provisoirement aux abonnés absents en attendant d'élire son président.
Louis Gallois; Copyright Reuters

Les pigeons, les moineaux, les gros poissons? Le bestiaire est certainement loin d?être épuisé pour caractériser ces acteurs du monde patronal qui, depuis plus d?un mois, harcèlent le gouvernement sur ses projets économiques et fiscaux. Dernier épisode en date, l?appel solennel lancé Dimanche 28 octobre dans les colonnes du "Journal du Dimanche" par les quelque 80 entreprises réunies au sein de l?Association française des entreprises privées (Afep) en faveur d?un "choc de compétitivité  de l?ordre de 60 milliards d?euros étalés sur cinq ans". Les "pigeons", eux, quelques semaines plus tôt, se révoltaient contre le projet du gouvernement de considérablement augmenter la fiscalité sur les plus values de cession d?une entreprise. A priori, aucun rapport entre les deux mouvements.

Le monde patronal supplée dans l'opposition au gouvernement une droite aux abonnés absents

Et pourtant, il y en a un. Exactement comme en 1997 quand Lionel Jospin est devenu, par surprise, le Premier ministre de cohabitation de Jacques Chirac à la suite d?une dissolution ratée, la droite est, en  2012, aux abonnés absents, entièrement occupée à se reconstruire et à se trouver un nouveau leader. Le monde patronal la supplée alors dans son opposition à une majorité socialiste en place. On se souvient des moulinets et de la très étudiée agit-prop d?Ernest Antoine Seillière, alors président du Medef, contre la première loi des 35 heures en 1998. C?est cette guérilla que l?on revit depuis l?arrivée de la gauche socialiste au pouvoir au printemps dernier. Mais cette fois, il n'y a pas que le Medef qui se rebiffe. Ou plutôt, le monde patronal ne parle plus d?une seule voix. Les temps ont changé. Il y a un problème de leadership au sein de la communauté des chefs d?entreprise que Laurence Parisot n'arrive plus à incarner. Et pour cause, cette communauté est totalement éclatée. Quoi de commun entre un patron d?une start up engageant ses propres deniers dans son entreprise et le patron d?un cador du CAC 40 ?  Les intérêts des "pigeons" sont rarement les mêmes que ceux des "gros poissons". D?où la multiplication des initiatives. "C?est exact, mais à la différence du mouvement des pigeons, le Medef n?a pas eu besoin de courir derrière l?initiative de l?Afep, précise un cadre de l?organisation patronale. L'appel de l?Afep dans le "JDD" a été fait en accord avec le Medef, qui avait été prévenu en amont, précise cette source. C?est une classique opération de démultiplication de la parole".

La répartition des rôles entre l'Afep et le Medef

Et ce d?autant plus que le Medef se trouve actuellement engagé dans un important round de négociation avec les syndicats, sur les nouvelles règles devant encadrer le marché du travail. Or, cette négociation avance lentement. Non seulement en raison de divergences entre les syndicats et le patronat. Schéma classique. Mais aussi, plus problématique, en raison de bisbilles à l?intérieur même de la délégation patronale, composée de représentants de l?Upa (artisans), de la CGPME et du Medef. Les deux premières reprochant à la troisième de ne pas tenir assez compte de la réalité des petites entreprises, notamment sur la question du contrat de travail unique qui pourrait venir remplacer l?actuel CDD.

Dans ce contexte, Laurence Parisot, qui veut parvenir à un accord pour éviter que l?Etat reprenne la main, cherche à ne pas commettre l?irréparable vis-à-vis du gouvernement. Elle a d?ailleurs rendez-vous mercredi 31 octobre avec Michel Sapin, ministre du Travail, pour un tour d?horizon de la situation. Et la signature relativement rapide de l?accord sur le contrat de génération doit être interprétée comme un geste d?apaisement. Il était donc préférable de laisser la discrète Afep agir. Il est rare que ce club des plus grandes entreprises se mette en scène, préférant une efficace action de lobbying. Mais l?Afep a tenu à faire monter la pression, alors que le gouvernement semble vouloir déjà prendre ses distances avec le futur rapport de Louis Gallois sur la compétitivité, en préférant étaler les décisions sur cinq ans, comme l?a rappelé François Hollande ce lundi 29 octobre, plutôt qu?en créant "un choc" immédiat. En d?autres termes, l?Afep est venue soutenir l?actuel commissaire général à l?investissement qui fût l?un des siens quand il dirigeait EADS.

Compétitivité, choc ou processus?

Reste que dans le camp patronal, tout le monde n?est pas sur la même longueur d?ondes s?agissant de la nécessité d?un "choc". Louis Schweitzer, l?ancien patron de Renault (et ancien directeur de cabinet de Laurent Fabius à Matignon), rappelle depuis plusieurs jours qu?en Allemagne,  "le processus a pris dix ans". De fait, les voix s?élèvent pour expliquer qu?il est très difficile d?imposer un nouveau choc à une France qui va connaître en 2013 un record de 30 milliards de nouveaux prélèvements ou d?économies, soit 1,5 point de PIB. Or, l?Afep propose une baisse des cotisations sociales patronales de 30 milliards d?euros sur deux ans, via, notamment, un transfert vers la TVA qui serait portée à 21% (contre 19,6% actuellement). De quoi peser sur la consommation des Français, seul moteur (fragile) de la croissance dans l?Hexagone. Le débat n?est pas clos?
 

Commentaires 10
à écrit le 05/11/2012 à 10:55
Signaler
Bonjour. Une adresse pour ce faire une idée du salaire des patrons. Il faut additionner tout cela et voir ce que cela représente vis à vis des 30 milliards demandés, édifiant ! http://www.journaldunet.com/economie/magazine/salaires-patrons/bernard-...

à écrit le 05/11/2012 à 10:35
Signaler
« Un choc de 30 milliards d'euros» En France les entreprises sont déjà exonérées de charges sociales à hauteur de 60 Mds Euros dont 30 Mds Euros de charges de Sécurité Sociale par an. En France les entreprises perçoivent 240 Mds Euros d'argent p...

à écrit le 29/10/2012 à 20:13
Signaler
C'est vrai que la consommation on s'en fout...surtout avec la balance commerciale qui est la nôtre. A la limite, si le pouvoir politique avait comme priorité de faire manger tous le monde et de ne plus avoir de mecs dans la rue, alors au moins ce ser...

à écrit le 29/10/2012 à 18:56
Signaler
On ne produit que parce que l'on compte vendre, qu'il s'agisse de s'équiper ou de consommer. La consommation qui baisse incite à moins produire, donc appauvrit, ce qui fait baisser la consommation, et déprime l'économie. N'oublions pas la leçon de 29...

le 29/10/2012 à 19:39
Signaler
Voilà un raisonnement inopérant, hors de la réalité. Un raisonnement illusoire pour énarque pétri de certitudes fausses issues des thèses farfelues de ce pauvre Keynes. Par définition, aucun producteur ne sait à l'avance si sa production sera consomm...

à écrit le 29/10/2012 à 18:36
Signaler
La consommation ne peut pas être un moteur de croissance. La consommation n'est qu'une conséquence de la croissance. Pour le dire plus trivialement, à destination de ceux qui ne comprendraient pas, la consommation, on s'en fout ! Eh oui, c'est peut-ê...

le 29/10/2012 à 19:41
Signaler
je crois que c'est plutot de votre commentaire que l'on se moque et non de la consommation. Le mieux est certainmenet d evous laisser a vos idees simples...

le 29/10/2012 à 19:59
Signaler
Le message de DRRW permet de prendre la mesure de la crise et pourquoi il va être très difficile d'en sortir, le temps de remettre à l'endroit tous ces petits cerveaux égarés par les mensonges collectivistes, keynésiens et socialistes.

à écrit le 29/10/2012 à 18:19
Signaler
Schweitzer n'a pas attendu pour délocaliser Renault en rachetant DACIA ! S'il ne l'avait pas fait, s'il n'avait pas pris des partcipations dans NISSAN, ou en serait Renault aujourd'hui ? Dans les choux ! On parle de compétitivité. Les gens n'y compre...

à écrit le 29/10/2012 à 17:54
Signaler
Oui en Allemagne le processus à pris 10 ans mais que faisions-nous? Vous chantiez!! Et bien dansez maintenant!!!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.