Pourquoi la France perd (ou gagne) en compétitivité selon les classements

La France a perdu deux places dans le classement des pays les plus compétitifs réalisé par le Forum économique mondial. Or, selon un autre indicateur elle a gagné une place cette année. Petit point de méthodologie pour s'y retrouver dans tous ces comparatifs.
Marina Torre

Deux places en moins, ou une place en plus? Selon les classements, la France est plus ou moins compétitive. Le dernier en date, celui du Forum économique mondial (le famaux WEF, qui réunit chaque année le gratin des décideurs à Davos), classe le pays au 23e rang mondial, loin derrière le bon élève indéboulonnable, la Suisse. Depuis l'an dernier, quand elle se faisait sortir du "top 20", la France a perdu deux rangs selon cet indicateur très suivi par les investisseurs et publié par le centre de recherche économique du Forum, situé à Genève. Problème: quelques mois auparavant, dans la ville voisine de Lausanne, l'Institute for Management Development publiait son propre classement, lequel indiquait que la France avait au contraire "gagné" une place, passant au 28e rang mondial.

  • Méthodologie, critères, visées

Pourquoi de telles divergences? Évidemment parce que la méthodologie, les critères pris en compte par ces classements diffèrent, en particulier parce que leurs objectifs ne sont pas les mêmes. L'indice de l'Institute for Management Development étant établi par une école, il se focalise surtout sur les éléments que ses concepteurs jugent utiles aux futurs cadres dirigeants qu'il forme. De son côté, le centre de recherche en charge du "Global competititiveness index" du Forum économique mondial affiche se concentrer sur les manières "d'identifier les entraves à la croissance de façon à ce que les stratégies pour atteindre un progrès économique durable puissent être développées". Un objectif forcément sujette à débat.

  • Les 12 "piliers" du WEF

Pour la méthodologie, le WEF indique se fonder sur 110 critères répartis en douze "piliers" : institutions, infrastructures, environnement macro, santé et enseignement primaire, enseignement supérieur et formation professionnelle, efficacité du marché du travail et efficacité du marché des produits, évolution des marchés financiers, maturité technologique, taille du marché, niveau de sophistication des affaires et de l'innovation. Chacun de ces critères est doté d'une pondération spécifique.

  • Chacun son classement...

Il existe bien d'autres classements, s'appliquant à des régions, secteurs ou domaines particuliers comme celui sur la compétitivité dans les pays de l'OCDE, celui sur l'industrie du cabinet Deloitte, celui sur le tourisme. Rares sont donc les "think tank" et les grandes organisations qui ne proposent par leur propre indicateur d'attractivité économique. Outre-Atlantique, la Fondation "Heritage" et le Wall Street Journal publient par exemple un "indice de liberté économique", dont l'intitulé même laisse entrevoir l'orientation idéologique.

  • ...chacun sa critique

Et puisque ni leurs cibles, ni leurs auteurs, ni leur conception ne sont totalement neutres, ces classements font régulièrement l'objet de vives critiques. Surtout de la part des gouvernants dont le pays a été déclassé ou bien par les organisations concurrentes. Au-delà de la remise en question de la définition même de "compétitivité", le choix des critères et surtout leur pondération font l'objet de remises en cause constantes. Dans son propre rapport, l'OCDE pointe par exemple les différences de conception entre certaines notions utilisées telles que les "producteurs nationaux" ou bien encore l'évolution des sous-indicateurs utilisés pour calculer ces indices, comme par exemple ceux qui mesurent les échanges internationaux.

  • Problème statistique

Sont remises en cause, notamment, le principe même des méthodes de calcul choisies. Pour Stéphane Grégoir, doyen de la faculté et de la recherche à l'EDHEC et auteur de plusieurs études sur la question:

La compétitivité est une notion qui recouvre de nombreuses dimensions qu'il est difficile de réduire à une seule dimension synthétique. (...) Les différences de rangs affichées peuvent être associées à ces choix et il est peu pertinent de les commenter. Que dire de la différence de rangs entre le 17ème et le 22ème lorsque l'indice change de 0,05 point? Il faudrait pouvoir illustrer la robustesse des rangs obtenus en modifiant un seul poids sur une des variables considérées et faire l'opération un grand nombre de fois. L'image floue qui en résulterait permettrait d'avoir une idée de la qualité d'information apportée.

  • Alors, que retenir de ces classements?

Enfin, la modification régulière des critères continue de faire tiquer. Le centre de recherche du Forum économique répond à ces critiques. "La méthodologie est restée stable depuis 2006, même s'il y a eu de petits ajustements", explique Oliver Cann, porte-parole du WEF. "Ces changements concernent l'exclusion ou l'inclusion d'un petit nombre d'indicateurs, la réorganisation de certains piliers", ajoute-t-il. Il s'agit en particulier des questions relatives aux infrastructures, à la maturité technologique et au degré de sophistication des affaires. Depuis l'an dernier, trois changements ont été réalisés. Mais "en dépit de ces ajustements (…) l'analyse de la performance d'un pays sur la période 2006-2013 reste possible pour identifier des tendances", assure le porte-parole.

Dès lors, que retenir de ces palmarès? Économistes et investisseurs n'en retiendraient... que très peu d'éléments, selon Stéphan Gregoir. "Du point de vue la communication et de l'impact médiatique, il est néanmoins plus aisé de produire un indice et de le commenter abondamment", estime le chercheur.

Plus que le chiffre final, ce sont donc plutôt certains détails de chacun de ces classements qui sont riches d'enseignements. Et ce, non seulement sur leur objet - l'évolution de la compétitivité du pays - mais plus encore sur la manière dont l'observateur perçoit cette dernière. Ainsi, pour le Forum économique mondial, si la France a perdu en compétitivité, c'est notamment en raison de "l'inquiétude à propos du secteur de la santé et de la finance" dans le monde des affaires. Et elle pourrait améliorer son classement en "injectant plus de flexibilité dans son marché du travail". Cette fameuse "rigidité française" qui faisait déjà l'objet du même commentaire, exactement dans les mêmes termes, quand elle était classée 15e en 2010...

Marina Torre
Commentaires 33
à écrit le 05/09/2013 à 13:29
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Enfin la preuve que les augmentation de salaires ne nuit pas à la compétitivité !

à écrit le 05/09/2013 à 13:15
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Les classements sont autant de produits différents, avec leurs positionnements, leurs qualités distinctives et leurs clientèles spécifique. Ni plus ni moins. Ils n'ont en ce sens qu'un lien assez distendu avec la réalité, mais correspondent très bien...

à écrit le 05/09/2013 à 9:49
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La France est classée au-delà de la 120e place, derrière les pays africains, pour certains critères comme la fiscalité ou le marche du travail.... histoire de bien faire baisser sa moyenne. Merci pour cet article, car les dindons de la farce, ce sont...

le 05/09/2013 à 10:30
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Dans cette étude et sur ce genre de critère, l'Allemagne (une économie semblable) par exemple se positionne comme la France, elle progresse cependant de 2 places à la 4eme. l'aggrégat "flexibilité du marché du travail: France 116 eme place / Allemagn...

le 05/09/2013 à 12:16
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On pourrait reprendre tous les critères... 1) Evidemment que l'Allemagne est favorisé par certains critères, 2) l'Allemagne et la France au-delà de la 100ème place, montre l'ineptie de ce classement, 3) on s'arrange pour avoir un semblant de cohérenc...

le 05/09/2013 à 13:54
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@ ahuete Le forum économique mondial, comme son nom l'indique, n'est pas suisse, mais basé à Genève. Il n'y a que très peu de Suisses qui y travaillent à vrai dire. Mais tout le monde sait bien que la France est le meilleur pays au monde.... On se ra...

le 05/09/2013 à 15:30
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Et tout le monde sait que la Suisse est la modestie même ; la preuve, elle est première du classement du forum de Genève ou de Davos comme vous voudrez !

à écrit le 05/09/2013 à 9:38
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S'il y a un biais, c'est dans la perception qu'ont les Suisses de la France... que dire en effet de cinq pays dans un mouchoir de poche (0,02) ! Il suffit de faire varier la pondération d'un critère de quelques points pour bouleverser le classement. ...

à écrit le 05/09/2013 à 9:30
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La monnaie fait parti de la compétitivité d'un pays et tire a elle tous les indicateurs annoncés! Si l'euro est adapté a l?Allemagne elle est moins bien pour la France!

à écrit le 04/09/2013 à 20:52
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L?Allemagne est 4ème et a gagné 2 places. Le fait de gagner une place ou d'en perdre une, d'une année à l'autre, n'est pas important, ce qui compte est le trend à long terme et c'est là ou ce sondage correspond à la réalité surtout en ce qui concerne...

à écrit le 04/09/2013 à 18:56
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nous payons cher le vote de 2012 nous avons elu un dictateur qui devient dangereux pour la paix mondiale , nous sommes une decheance vis a vis du monde, l'allemagne seule peut nous sauver en nous rachatant a elle

le 04/09/2013 à 22:13
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Faut arrêter le schnaps au petit dèj... Ça attaque direct le cerveau !

à écrit le 04/09/2013 à 17:01
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Sans les classements et les sondages en tout genre les médias manqueraient de travail ...voila à peu pret leur seul mérite faire vivre des journalistes .....aprés à chacun de faire ses propres classements . Prenons un seul exemple , entre l'ambitieux...

à écrit le 04/09/2013 à 16:47
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Notons que la France avait déjà perdu en 2012, 3 places au classement WEF. Notons qu'elle se situait, il y 4 ans au 15eme rang. Notons également que l'IMD, (l'Institute for Management Development) publiait son propre classement, lequel indiquait que ...

à écrit le 04/09/2013 à 16:42
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Voici mon classement où il fait bon vivre, longtemps, en bonne santé, avec du temps pour soi et un salaire décent...Où les droits de chacun sont respectés, riches ou pauvres... 1 France 2 Australie 3 Italie 4 Nouvelle-Zélande Quelle déception l...

le 04/09/2013 à 16:55
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@lachcor : je ne sais pas d'où ni comment vous sortez ce classement mais je ne peux que saluer votre dernière phrase.

le 04/09/2013 à 16:59
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D'accord , à condition d'avoir du travail.

le 04/09/2013 à 17:00
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+10

le 04/09/2013 à 17:08
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Je suis bien d'accord avec vous. Je reçois pas mal de visiteurs étrangers et tous nous envient notre cadre de vie et le fait que dans 90% des régions, on y vit peinard (beaucoup plus qu'en Europe du Nord par exemple où on est sérieusement enquiquiné ...

le 04/09/2013 à 17:12
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Quel chauvinisme crasseux ! Même dans les critère dont vous parlez, plusieurs pays arrivent devant la france! (dont la nouvelle zelande). Quand au "10 fois plus de pourcentage de gens en prison par rapport à la France", s?est consternant de bêtise,...

le 04/09/2013 à 18:06
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Et moi, je connais beaucoup d'étrangers qui n'aiment pas du tout la France et n'envient pas du tout les Français. Car ces étrangers savent que la France n'est ni le nombril du monde, ni de l'univers!

le 04/09/2013 à 19:23
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@ Chaufon ; Même si on nous classait dernier...et après . Il vaut mieux être pauvre en France que dans ces beaux pays....

le 04/09/2013 à 19:41
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Ça soulage de couiner quand on va pas bien, hein ?

à écrit le 04/09/2013 à 16:30
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Le défaitisme ne va pas à la France et il faut simultanément avoir foi en son époque et en son pays dans la mesure où notre génie particulier n'est pas plus que par le passé entravé par les conditions actuelles du postmodernisme. C'est une époque bie...

le 04/09/2013 à 16:47
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@Marchangelo : Bien dit, mais vous allez vous faire atomiser par les pleureuses et les esprits bas de plafond ...

le 04/09/2013 à 20:09
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assommant

à écrit le 04/09/2013 à 16:30
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Très bon article qui replace les "classements" dans leurs contextes et face à leurs idéologies respectives. Il serait intéressant de faire un classement des classements, suivant leurs critères , méthodologies objectifs et stabilité/variabilité ...

à écrit le 04/09/2013 à 16:26
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Le seul vrai indicateur est les investissements, et surtout l'intérêt des investisseurs étrangers à investir en France. Pour ma part, je peux témoigner avoir mis 6 mois fin 2011/début 2012 pour obtenir plusieurs mandats de recherche d'opportunités d'...

le 04/09/2013 à 16:45
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En termes de rétablissement des comptes publics, ce gouvernement a déjà fait mieux que tous ces prédécesseurs. Augmentation des recettes de l'état et diminution massive et sans précédent des dépenses publiques. Que voulez vous de plus. Il faut laisse...

le 04/09/2013 à 16:53
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@Paulo : bizarrement vous ne remettez pas en cause la qualité de votre travail... Et cela dépend aussi de votre secteur d'activité. Un peu de bon sens et d'objectivité ne font pas de mal. Si je cherche un peu je trouverais bien 2 ou 3 témoignages, pa...

le 04/09/2013 à 17:09
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Je suis désolé mais vous semblez être gravement victime de la propagande du gouvernement ... Les dépenses publiques ont progréssé à fin juin de plus de 3 millairds par rapport à l'an dernier ... L'hyper fiscalité et la pseudo restitution du CICE c'es...

le 04/09/2013 à 18:02
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@Chich : oui c'est sur ... Quand vous êtes sur un deal très important (xxx Mio) et que soudain aux US on vous dit que ce n'est plus la peine car ils viennent de décider de stopper tout investissement en France ... cela doit être nos services qui sont...

le 05/09/2013 à 14:19
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bref, vous avez aucun résultats, mais comme toujours, c'est la faute à tous-les-autres-ki-sont-nuls

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