Formation professionnelle : le patronat rejoue "touche pas au grisbi" et paralyse la négociation

Dans le cadre de la négociation sur la formation professionnelle, les organisations patronales se déchirent entre elles sur le principe de la mutualisation des fonds de la formation. La CGPME et l'UPA accusent le Medef de vouloir tarir la source les fonds collectés. Résultat, la séance de négociation prévue ce 21 novembre est annulée.
Jean-Christophe Chanut
Le Medef est accusé par les autres organisations patronales de vouloir mettre fin à la mutualisation des fonds de la formation professionnelle

La négociation sur la formation professionnelle est totalement paralysée. La nouvelle séance prévue ce 21 novembre est même annulée! En cause, l'argent de la formation, ce "grisbi" de 13 milliards d'euros. Mais, pour une fois, les divergences ne se retrouvent pas entre les syndicats de salariés et les organisations patronales... mais au sein même du camp patronal. CGPME et Medef n'étant absolument pas sur la même longueur d'ondes. D'ou le "couac" qui a conduit à l'annulation de la séance de ce 21 novembre. Du quasi inédit dans l'histoire de la négociation sociale. Il faut dire que le projet du Medef mécontente fortement la CGPME et les artisans employeurs de l'UPA. Pour ces deux dernières, le Medef cherche à remettre en cause la mutualisation des fonds de la formation professionnelle. Explication.

 Le Medef propose de diminuer la contribution à la formation

Le Medef propose de supprimer l'actuelle cotisation de 1,6% (dont 0,9% dédié au plan de formation) de la masse salariale que les entreprises de plus de 20 salariés doivent obligatoirement affecter à la formation professionnelle). Cette somme peut être soit utilisée en interne, soit versée à l'un des 48 organismes paritaires collecteurs agréés (Opca).

De cette façon, l'argent de la formation peut être mutualisé et notamment profiter aux petites entreprises. En remplacement, le Medef souhaite instaurer une contribution unique de 0,8% pour les employeurs de plus de 10 salariés. Et, pour les établissements plus petits, il propose que cette cotisation soit limitée à 0,4% et qu'elle soit collectée par les Opca. A cette cotisation de 0,4% viendrait éventuellement s'ajouter une contribution librement fixée conventionnellement au niveau de la branche.

Lire aussi: "Comment réformer le mammouth de la formation"

La CGPME et l'UPA  y voient une remise en cause de la mutualisation des fonds

La CGPME est furieuse et voit là une remise en cause de la mutualisation des fonds qui est une "condition sine qua non du développement des entreprises et de la formation". Et  l'UPA est sur la même longueur d'ondes. De fait, avec sa proposition, le Medef risque de tarir les fonds mutualisés affectés à la formation.

L'organisation patronale s'en défend, expliquant que dans les grandes entreprises la formation professionnelle est tellement stratégique que cet argent est de toute façon consommé en interne et qu'il va rarement vers les plus petites entités, via la mutualisation. C'est plutôt entre les petites entreprises que les fonds seraient donc réellement mutualisés. En outre, le Medef estime que 74% des salariés sont déjà concernés par des accords de branche créant des contribution minimale à la formation. Il y aura donc encore des fonds mutualisés.

De leur côté, CGPME et UPA veulent absolument conserver une mutualisation pleine et entière. Elles pourront s'appuyer sur une enquête réalisée par Ipsos pour l'Agefos PME (un Opca interprofessionnel) auprès de 501 dirigeants d'entreprises de moins de 500 salariés. Cette étude montre que les deux-tiers des entreprises souhaitent conserver l'actuelle contribution légale de 0,9% au titre du plan de formation. 

La négociation paralysée

Le patronat est donc totalement divisé, ce qui paralyse la négociation. "Le Medef se positionne en chef de file, mais il n'est pas suivi par les deux autres organisation, la CGPME et l'UPA " note Dominique Jeuffraut le négociateur CFE-CGC. Pour preuve, la CGPME  a même organisé des réunions bilatérales avec les syndicats de salariés pour avancer sur son projet. Un fait inédit dans une négociation interprofessionnelle.

Résultat, le 21 novembre, FO, CFE-CGC, Medef, CGPME devaient tous arriver avec un nouveau projet de texte, ou, à tout le moins, des " bouts" de projet ! Or, d'habitude, les partenaires sociaux travaillent sur un seul texte. Les relations sont tellement tendues entre la CGPME et le Medef que la réunion a donc été annulée au dernier moment le 20 novembre au soir. Pour la CGPME "le Medef voulait nous empêcher de parler". Côté syndical, on se lamente:

"Il nous faut au plus vite sortir de ce dialogue de sourds entre le Medef, qui porte tout seul la suppression de l'obligation légale, et les deux autres organisations patronales soutenues par les cinq syndicats qui défendent la mutualisation", estime Catherine Perret (CGT). 

Ce syndicat s'interroge même sur la volonté réelle du Medef de négocier, alors que, normalement, les discussions doivent se clore le 12 décembre.

Le sujet est des plus délicats. Car derrière ces bisbilles se cache en réalité une bonne partie de la question du financement des organisations syndicales et patronales, via le "grisbi" de la formation professionnelle. Or, la proposition du Medef avait pour conséquence de donner un coup de pied dans la fourmilière. Si la négociation capote, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a déjà prévenu que le gouvernement reprendrait la main et assumerait ses responsabilités.

 

 

 

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 11
à écrit le 21/11/2013 à 13:33
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Un seul mot: RE VO LU TION ! On y arrive à grands pas, mais aucun de nos dirigeants ne s'en rend compte, ou ne veut s'en rendre compte. Le mécontement général est profond, et il n'y a plus que 2 solutions pour sortir de ce foutoir. Soit un homme s...

le 21/11/2013 à 22:21
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IDEM

à écrit le 20/11/2013 à 21:43
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Quelle honte. Le systeme est a l'emploi ce que le 1% est au logement...une pompe a cash pour des interests peu recommandables.

le 21/11/2013 à 6:02
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mais en FRANCE il n'y a que cela. Des hommes , des organisations pour s'emparer du gâteau. L'intérêt commun ils s'en foutent. Pauvre société.

à écrit le 20/11/2013 à 20:33
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La formation en France : du fric balancé dans les poches de certaines societes et surtout des taxes pour les salariés. Il faut demonter ce systeme corrompu et reflechir a ne pas le remplacer si rien de valable n'est proposé. (je sais c'est extreme co...

le 21/11/2013 à 9:11
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renseignez vous avant de raconter n'importe quoi : il n'existe aucunes cotisations salariales au titre de la formation

le 21/11/2013 à 9:11
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renseignez vous avant de raconter n'importe quoi : il n'existe aucunes cotisations salariales au titre de la formation

le 11/12/2013 à 12:36
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La notion de cotisation patronale est toute relative. Un salariés "coûte" à l'entreprise une certaine somme, sur laquelle sont pratiqués divers prélèvements qu'on répartis très artificiellement en 2 catégories, cotisation salariale et patronale. Mais...

à écrit le 20/11/2013 à 19:12
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On discute de 0.8 % et ça bloque . Comme d habitude ça va finir en réformette de façade

à écrit le 20/11/2013 à 18:42
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La plupart des formations sont utilisées pour des manipulations comportementales, d'autres sont totalement fictives (voir condamnation d'une grande enseigne qui s'est bien arrosée au passage) . La formation devrait être , prioritairement , allouée ...

le 21/11/2013 à 8:02
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Ecoutez ce que dit Isabelle Maurer à JF Copé au sujet des formations des chômeurs. Tous ce qu'elle dit est vrai: ce n'est jamais possible. "Je ne rentre jamais dans la bonne case". Où va l'argent ? https://www.youtube.com/watch?v=F2eVXmrRi6M

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