Assurance chômage : Ce qu'il faut absolument savoir avant l'ouverture de la négociation

Les partenaires sociaux vont débuter le 17 janvier la renégociation de l'assurance chômage qui fixe les conditions d'indemnisation des chômeurs, alors que le régime enregistrera une dette cumulée fin 2014 de 22,1 milliards d'euros. Présentation des principales données à connaitre avant l'ouverture des débats.
Jean-Christophe Chanut
l'Assurance chômage enregistrerait une dette cumulée de 22,3 milliards d'euros fin 2014

La négociation sur la réforme de la formation professionnelle à peine terminée, les organisations patronales et syndicales vont déjà se retrouver pour aborder le très lourd dossier de l'assurance chômage. C'est en effet tout juste dans une semaine, le 17 janvier, que va s'ouvrir la délicate négociation sur le renouvellement de la convention d'assurance chômage qui fixe les conditions d'indemnisation des demandeurs d'emploi. Et il va leur falloir aller vite. Tout doit être bouclé pour la fin mars au plus tard. L'actuelle convention, en vigueur depuis 2011, devait déjà arriver à expiration le 31 décembre 2013. Mais, en raison du retard pris dans la renégociation des nouvelles règles, patronat et syndicats , gestionnaires de l'Unedic, l'organisme paritaire qui gère l'assurance chômage, ont décidé de proroger pour trois mois les anciennes règles.

L'Assurance chômage enregistre une dette cumulée de 22,1 milliards d'euros

La première séance du vendredi 17 janvier va être l'occasion de dresser un état des lieux de la situation du régime d''assurance chômage. Et ce n'est pas fameux. Mais comment pourrait-il en être autrement alors que le chômage est - encore - au plus haut. A règles constantes, l'Unedic table pour la fin 2014 sur un déficit de 4,4 milliards d'euros. Ce qui porterait la dette cumulée du régime à… 22,1 milliards d'euros (il était de 18,4 milliards à la fin 2013). Heureusement, que l'organisme bénéficie de la garantie de l'Etat pour pouvoir emprunter sur le marché obligataire à taux bas, sinon les allocations chômage auraient bien du mal à être versées. Mais sans retour de la croissance et une baisse du chômage, cette politique deviendra intenable.

Cependant, avant que ne s'ouvre la négociation, d'autres données méritent d'être connues pour bien cerner le débat et, peut-être, mettre un point final à certaines fausses idées reçues.

Seuls 47,9% des demandeurs d'emploi sont indemnisés

D'abord, à la fin octobre 2013, seuls 39,7% des quelque 5,5 millions de demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi en catégories A,B,C,D,E sont indemnisés par l'assurance chômage et 8,2% par le régime de solidarité nationale, soit un total de 47,9% . Ce qui signifie, concrètement, que plus de la moitié des chômeurs ne perçoivent aucune indemnité, soit parce qu'ils sont trop jeunes et/ou n'ont pas assez cotisé (il faut avoir travaillé au minimum quatre mois), soit parce qu'ils n'y ont plus le droit. Ils sont alors éligibles au RSA. Ainsi, à la fin novembre, 518.500 demandeurs d'emploi inscrits en catégorie "A" percevaient le RSA "socle." Ils étaient 14,1% de plus qu'il y a un an.

Par ailleurs, selon des données fournies par l'Unedic, au 31 décembre 2012, le montant brut moyen de l'allocation mensuelle s'élevait à 1.108 euros. Et 95% des allocataires perçoivent moins de 2.070 euros. Seuls 1.400 allocataires, soit 0,06% environ du total, touchent le fameux montant maximum (6.959 euros par mois) qui fait tant polémique.

De fait, en France, à la différence d'autres États, le système d'indemnisation du chômage est en partie basé sur la notion "d'assurance", d'où l'appellation "assurance chômage" qui, comme son nom l'indique, garantit une prestation résultant du niveau de contribution par la cotisation. Ce qui signifie que si l'on veut modifier à la baisse le plafond d'indemnisation, il faudra aussi modifier vers le bas le plafond de cotisation. Mais ceci aura pour résultat la diminution des recettes pour l'Unedic.

Des règles qui favorisent le développement du travail précaire

Reste aussi la délicate question de l'indemnisation des salariés précaires (CDD courts à répétition et intérimaires). Globalement, pour ces salariés qui alternent périodes de chômage et de travail, voire qui cumulent les deux, 9 milliards d'euros de prestation chômage sont versées pour… 2,5 milliards d'euros de cotisations. C'est pour corriger en partie ce constat que les partenaires sociaux, dans l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 (repris par une loi du 14 juin), ont, non sans mal, décidé d'augmenter les cotisations chômage des employeurs sur certains contrats courts. Car il est indéniable que l'Unedic participe en quelque sorte à la" flexibilité à la française", basée sur le recours aux emplois précaires, notamment au travers de la reprise d'un travail à temps très réduit qui permet de percevoir une (maigre) rémunération, tout en continuant de bénéficier de l'indemnisation du chômage… Ce qui conduit à un paradoxe redoutable : l'indemnisation du chômage, initialement destinée à accompagner des périodes de transition entre deux emplois durables, génère, en réalité, une instabilité constante de l'emploi. 

La très sensible question des intermittents du spectacle

Last but not least, il y a la très sensible question des intermittents du spectacles (les fameuses annexes 8 et 10 de la convention d'assurance chômage). Selon un très contesté rapport de la Cour des comptes de janvier 2013, leur régime spécifique d'indemnisation du chômage enregistre un déficit annuel d'environ 1 milliard d'euros.... Et ce pour à peine plus de 106.000 bénéficiaires. Ce déficit représente donc à lui tout seul environ 20% du " trou" annuel de l'Unedic. Actuellement, pour percevoir l'assurance-chômage, les intermittents doivent justifier de 507 heures travaillées dans les 10 derniers mois (techniciens) ou 10,5 mois (artistes). Autre fait, en 2010, les allocations versées aux intermittents ont représenté 1,26 milliard d'euros... alors que les cotisations perçues se limitaient à ...232 millions d'euro.

Des données contestées par le député PS Jean-Patrick Gille, rapporteur de la mission d'information sur les métiers artistiques qui a demandé, dans le cadre de ses travaux, à l'Unedic de simuler le basculement de tous les intermittents dans le régime général de l'assurance chômage. Verdict: les intermittents représenteraient alors un surcoût de seulement 320 millions d'euros par an. "Ce montant correspondrait donc au coût réel des règles particulières de l'intermittence. Il n'est sans doute pas anodin, mais bien éloigné du montant d'un milliard d'euros". Le ministre du Travail Michel Sapin a déjà fait savoir qu'il n'était pas question de remettre en cause les règles spécifiques à l'intermittence. Le Medef, lui, est d'un tout autre avis. Il va y avoir du sport.

Lire aussi: "Assurance chômage: la France a le système le plus "généreux" en Europe"

Lire aussi: "Assurance chômage: ce que veulent le patronat et les syndicats"

 

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 26
à écrit le 19/01/2014 à 8:16
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Une réforme de l'assurance chômage est devenue indispensable ; notamment au regard d'un esprit de compétitivité. Il est pourtant difficile d'annoncer une telle réalité dans le marasme de l'emploi que nous traversons. Cependant nous devons absolument ...

à écrit le 18/01/2014 à 0:26
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dommage que le journaliste qui a fait ce bon article n'ai pas fait la somme de ces 3 parties voir les graphiques de vittori sur les echos.fr

à écrit le 17/01/2014 à 19:45
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N'ayant pas été reconduit à la fin de mon CDD (3 ans) d'une administration, je touche des allocations de celle-ci et non de pôle emploi, puisque la grande majorité des services de l'Etat ne cotisent pas. En conséquence, je n'impute pas sur les alloca...

à écrit le 17/01/2014 à 16:26
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Les papons politiques anti jeunes du sud européen font du zéro de croissance et de la torture sur salarié au pint qu'ils se suicide sur lieu de travail, et il existe une grosse crotte subventionnée devant l'Assemblée!

à écrit le 17/01/2014 à 11:46
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Si l'assurance chômage est déficitaire, c'est parce que son mode de financement n'est pas équitable. Est-il normal qu'une entreprise paye plus de cotisations lorsqu'elle a plus de salariés ? La cotisation d'une entreprise devrait être proportionnelle...

le 18/01/2014 à 9:53
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Le mieux serait de financer le chômage (et les effectifs de Pôle Emploi) avec l'IS

à écrit le 17/01/2014 à 11:17
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"le député PS Jean-Patrick Gille, rapporteur de la mission d'information sur les métiers artistiques qui a demandé,..." je lui conseille d'aller voir le graphique et les explications de Jean Marc Vittori sur les échos.fr, il sera peut être un peu moi...

à écrit le 12/01/2014 à 13:39
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En ce qui concerne les intermittents et techniciens du spectacle , on assiste à un véritable scandale ! Ce qui est affirmé est particulièrement vrai pour les droits aux allocations . De plus certains "employeurs " manipulent les heures de travail pou...

à écrit le 11/01/2014 à 10:41
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En Thaïlande les allocations chômage n'existent pas, donc 0% de chômeurs et quasi tout le monde bosse.

le 17/01/2014 à 15:04
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En Thaïlande, c'est un état de guerre civile larvée, les voyous qui ont des biens mal acquis sont en état de survie jusqu'à ce qu'une balle perdue les envoi dans un trou.

à écrit le 11/01/2014 à 7:59
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la vraie question du chômage (qui est un résultat) comment on créé des emplois? ou plutôt qui? le jour où notre pays arrêtera de taper sur l'entreprise (50 milliards de PLUS d'impôt sur l'entreprise en France qu'en Allemagne) et de ponctionner les sa...

le 11/01/2014 à 9:42
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C'est vrai mais les 2/3 du budget public sont redonnés aux français. Par exemple la retraite moyenne versée en France est nettement supérieure à la moyenne des retraites versées en Allemagne. Ce qu'il faut c'est modifier le système de gestion pour qu...

à écrit le 10/01/2014 à 15:46
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Et les suicides en chaîne sur lieu de travail c'est légal? On tire sur les chômeurs mais les fonctionnaires ne sont pas mis à contribution? On supprime des emplois publics, ils étaient fictifs ou improductifs dans ce qu'on appelle 1000 feuille pour p...

le 10/01/2014 à 18:52
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Cela fait bien longtemps (1982) que les fonctionnaires paient une contribution spécifique à leur charge par solidarité envers ceux qui sont au chômage et cela que le chômage grimpe ou baisse n'a jamais changé depuis.

à écrit le 10/01/2014 à 15:44
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Les chômeurs ce n'est pas le seul problème: il existerait selon ce qu'on nous publie 10% des gens qui seraient logés en logement social illégalement selon les plafonds alors que les 2/3 des français devraient y être logés.... Les salaires à l'embauch...

le 11/01/2014 à 9:47
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Il faudrait centraliser la gestion du logement aidé (HLM + parc privé sous APL) en normant un loyer croissant avec le revenu du foyer du genre a + b*R (a serait compatible avec les minima sociaux et b de l'ordre d'un tiers du revenu disponible) payé ...

à écrit le 10/01/2014 à 15:41
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Les chômeurs et les exclus sont des esclaves, les droits aux allocations ne sont pas respectés, on réduit le PIB européen, on viole la vie privée, on empêche les jeunes d'accéder à la vie active. C'est une Europe de bourreaux des jeunes générations!

le 10/01/2014 à 19:12
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Ces jeunes sont juste des esclaves et payent pour le status bien protégé de nos PONCtinnaires.

à écrit le 10/01/2014 à 15:31
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assurance chômage pourquoi et pour qui??? Si nous n'avons plus assez de travail,il faut comme en Suisse,rompre le contrat d'intérim de l’étranger et le reconduire à la frontière.D'ailleurs pourquoi cette personne à pu décrocher un emploi alors que n...

le 19/01/2014 à 11:03
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il n y a plus de frontier c'est la mondialisation

le 01/02/2014 à 11:11
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et le travail au noir a qui profite t il ?

à écrit le 10/01/2014 à 13:45
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Nous attendons toujours de ce gouvernement qu'ils admettent l'impossibilité de maintenir un modèle social périmé qui pénalise fiscalement les entreprises. Le monde du plein emploi est derrière nous, le statut de salarié n'a plus d'avenir en France Se...

le 11/01/2014 à 9:54
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Quelque soit le statut du travailleur (entrepreneur ou salarié), en effet le monde du plein emploi est derrière nous. C'est logique car la technique travaille à notre place. Donc en effet un système qui ouvre des droits avec des cotisations sur salai...

à écrit le 10/01/2014 à 13:42
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Vu le courage politique des gouvernants, aucune mesure de fond ne sera prise, aucune remise en question des statuts des intermittents, seulement une ponction supplémentaire ou une baisse des aides pour les classes cotisantes. Les paris sont ouverts

le 11/01/2014 à 9:56
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Par définition un politique n'est pas "courageux". Soit il est habile et il se fait élire, soit il dit la vérité et il n'atteint pas le second tour. Les français ont juste les politiques qu'ils méritent...

à écrit le 10/01/2014 à 13:17
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Les constructeurs automobiles auraient recouru à de fausses immatriculations pour 10% de la production ! Tout le monde triche et l' état est complice . Comment croire à la sortie de crise si les chiffres de l' activité économiques sont pipés ???

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