Le nouveau Sénat au secours des départements ?

La nouvelle majorité sénatoriale de droite va militer pour le maintien des départements dans les territoires ruraux. Manuel Valls est prêt à lâcher du lest mais jusqu'où?
Jean-Christophe Chanut
Ls Sénateurs veulent garder le niveau départemental dans les territoires ruraux

Le maintien du rôle des communes et de départements est au cœur des préoccupations des élus des territoires ruraux. Or, ces élus forment l'immense majorité des 87.534 grands électeurs qui étaient appelés ce dimanche 28 septembre à renouveler la moitié du Sénat. Au-delà de la simple arithmétique, cette peur des élus locaux explique en grande partie pourquoi la droite a reconquis la haute assemblée.

Certes, le suspens était limité. Depuis 2011, la gauche était pour la première fois majoritaire au Sénat avec neuf sièges de plus que la droite (177 contre 168). Mais, après la "vague bleue" des municipales de mars 2014, le PS et ses alliés ont perdu des dizaines de municipalités, dont 130 villes de plus de 9.000 habitants. Les délégués de conseils communaux représentant 95% des grands électeurs appelés à élire les sénateurs, la cause était mathématiquement entendue.

La peur de la réforme territoriale

Et ce d'autant plus que la réforme territoriale voulue par François Hollande a également fait des siennes. Déjà, en juillet, le Sénat s'était opposé à la nouvelle carte des 13 régions proposée par le gouvernement. Une majorité de sénateurs, de droite et de gauche - notamment les radicaux de gauche - se sont aussi arcboutés sur le projet de Manuel Vals et de François Hollande de supprimer les départements à l'horizon 2021.

L'Association des maires ruraux de France (AMRF) a sonné le tocsin. Pour elle et son président Vanik Berberian: "Les élus ruraux sont fatigués de voir que depuis des années, c'est une vision urbaine et métropolitaine de l'organisation territoriale qui prévaut".

Vers un maintien des départements ruraux?

L'AMRF demande que le niveau départemental soit conservé dans les territoires ruraux où l'intercommunalité à tout prix n'a pas de sens du fait de l'éloignement des communes ou du tissu démographique. Une position qui a reçu le soutien de Gérard Larcher, sénateur UMP des Yvelines, qui espère bien reconquérir la présidence du Sénat le 1er octobre, et du président des Radicaux de Gauche, Jean-Michel Baylet. De fait, les sénateurs radicaux sont majoritairement élus dans des départements ruraux.... Jean-Michel Baylet a même fait pression sur Manuel Valls en assurant que les ministres radicaux quitteraient le gouvernement si le niveau départemental n'était pas conservé dans certains territoires.

Manuel Valls a lâché du lest

Il a été entendu puisque dans son discours de politique générale du 16 septembre le Premier ministre a lâché du lest en assurant que le niveau départemental serait maintenu dans certains territoires ruraux au-delà de 2021 "avec des compétences simplifiées". Mais on ne sait encore rien des modalités de cette dérogation. Qui décidera du maintien du niveau départemental, les élus locaux ou l'Etat? Quelles seront ces fameuses "compétences limitées"? Comment l'articulation se fera t-elle avec les 13 nouvelles régions aux compétences élargies? Pour avoir un début de réponse, Il faudra sans doute attendre le mois d'octobre et l'arrivée devant le Parlement du texte de loi sur les nouvelles compétences des collectivités nées du redécoupage territorial.

Crispation sur la baisse de la dotation de l'Etat

L'autre crainte des élus des territoires ruraux concerne la baisse annoncée des dotations de l'Etat. Dans le cadre des économies à trouver dans les dépenses publiques, la dotation de l'Etat aux collectivités locales va baisser de 11 milliards sur trois ans dont 3,7 milliards d'euros dès 2015. Certes, le gouvernement a assuré que le fonds de péréquation entre les collectivités urbaines et rurales serait abondé. Il n'en reste pas mois que les élus ruraux s'inquiètent. Leurs communes ou intercommunalités sont souvent en bout de chaine lors de la répartition des dotations. Ils craignent donc d'être sacrifiés. Un deuxième combat que le Sénat compte livrer donc contre le gouvernement, lors de l'examen de la loi de Finances 2015.

Pour autant, la droite sénatoriale ne se fait pas d'illusions. Constitutionnellement, la haute assemblée n' a pas le dernier mot, celui-ci revenant à l'Assemblée nationale. En revanche, un Sénat repassé à droite pourra ennuyer le gouvernement en saisissant le Conseil Constitutionnel. Il peut en effet éventuellement y avoir un doute sur la constitutionnalité d'une disposition prévoyant le maintien de compétences départementales sur un point du territoire mais pas sur un autre.

Jean-Christophe Chanut
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