Commerce international : la France est en ordre de bataille pour modifier les accords transatlantiques

Ce mardi, la Commission européenne a présenté les résultats de l'enquête réalisée dans l'Union européenne auprès de la société civile sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et les états (ISDS). Ils sont en ligne avec la position française qui rejette ces mécanismes. La France souhaite modifier le texte avant sa ratification.
Fabien Piliu
La ratification des accords bilatéraux entre l'Union européenne et le Canada pourrait prendre plus de temps que prévu

On ne badine pas avec la souveraineté nationale. Ce mardi, la Commission européenne a présenté les résultats de l'enquête réalisée dans l'Union européenne auprès de la société civile sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etat (ISDS) inscrits dans le traité Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) signé le 26 septembre entre les 28 pays de l'Union européenne et le Canada. Des mécanismes qui seront intégrés au le traité transatlantique pour le commerce et les investissements entre l'Union européenne et les Etats-Unis (TAFTA/TTIP). Quelle est la conclusion principale de cette enquête ? Les mécanismes d'arbitrage prévus par l'accord doivent être assouplis pour améliorer la transparence des jugements.

Forte d'une diplomatie économique toute jeune - elle a été créée en avril - la France peut être satisfaite. En effet, si le Canada et les Etats-Unis voient d'un œil favorable la gestion des litiges par ce mécanisme, Paris, soutenue par certains pays européens, n'en veut pas.

" Bien entendu, il ne s'agit pas de remettre en cause nos liens d'amitié avec les Etats-Unis et le Canada. La question posée est plus vaste : il faut veiller à ce que les mécanismes d'arbitrage ne soient pas utilisés pour attaquer les politiques souveraines des Etats, par exemple dans le domaine de la santé ou de l'environnement ", explique Matthias Fekl, le secrétaire d'Etat chargé du commerce extérieur.

Quand une entreprise suédoise porte plainte contre l'Allemagne

Des exemples récents témoignent de cette remise en cause des politiques nationales, dont les conséquences sont également financières puisque les montants réclamées par les plaignants peuvent impacter les finances publiques nationales. Ainsi, en octobre, le groupe d'énergie suédois Vattenfall a porté plainte contre l'Allemagne après que le gouvernement d'Angela Merkel ait décidé en 2011 la sortie du nucléaire en 2022. S'estimant lésés par la fermeture progressive des 17 centrales Vattenfall, qui exploite deux des dix-sept centrales nucléaires allemandes, le groupe a porté plainte devant le Centre International de Résolution des Disputes d'Investissements (ICSID) basé à Washington et réclame précisément 4 675 903 975,32 euros à la république fédérale.

Autre exemple, après avoir attaqué l'Australie et l'Uruguay, Philip Morris International, le fabricant de cigarettes a annoncé vendredi qu'il entendait contester devant la Cour européenne de Justice la nouvelle réglementation européenne sur le tabac.

Quels enseignements peut-on tirer de l'enquête menée par Bruxelles. Sur les 150.000 avis récoltés, les deux tiers insistent sur la nécessité de clarifier le règlement des litiges. En clair, que les arbitrages soient les plus transparents possibles. C'est le souhait express du gouvernement français. Avant Matthias Fekl, Nicole Bricq et Fleur Pellerin ont toujours indiqué que la France ne ratifierait pas le CETA en l'état.

La France dispose de quelques mois pour faire entendre sa voix

En effet, bien que les négociations se soient achevées le 27 septembre, à Ottawa, rien n'est encore gravé dans le marbre. "Avec la publication de ces recommandations, on entre dans une nouvelle phase au sein de l'Union européenne. Il faut inventer l'arbitrage investisseurs-Etats du XXIème siècle ", explique Matthias Fekl.

Avant la ratification éventuelle, prévue à la fin du premier semestre, une revue juridique et de consolidation de l'accord est actuellement en cours. Pendant cette période, le gouvernement dispose d'une fenêtre de tir pour modifier le texte.

Pour expliquer ce revirement de la France, le Quai d'Orsay avance sa relative inexpérience, rappelant que la France a plutôt l'habitude de négocier dans un cadre multilatéral, sous l'égide le d'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Plus de transparence, moins de recours abusifs

Que souhaite la France ? Plusieurs axes de réflexion sont d'ores et déjà définis. Le gouvernement souhaite impliquer réellement les juridictions publiques nationales dans les procédures d'arbitrage. Il souhaite également mener une action résolue contre les recours abusifs à l'arbitrage, en limitant la possibilité d'attaquer les états, sans aucun risque financier.

La France réclame aussi une transparence accrue sur le système. Concrètement, elle souhaite éviter les conflits d'intérêts en empêchant les arbitres d'être juges et parties sur les dossiers.

Sachant que la ratification par l'Union européenne se fera à la majorité qualifiée, le gouvernement français et son secrétaire d'Etat au Commerce extérieur doivent maintenant s'employer à convaincre les membres de l'Union européenne qui ne sont pas sur la même longueur d'ondes. " Il faut désormais engager un travail diplomatique important de conviction pour qu'un maximum de pays européens fasse front uni ", insiste Matthias Fekl.
La France cherche le soutien de l'Allemagne

Dans le viseur du Quai d'Orsay, l'Allemagne, notamment. Jusqu'ici, notre principal partenaire commercial n'a pas suivi la France. Toutefois, certains ministres influents, parmi lesquels Sigmar Gabriel, le ministre de l'Economie, approuveraient désormais la démarche tricolore. Point positif, la nouvelle commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström soutient la position de Paris. c'est égalemnt le cas de Bernd Lange, l'eurodéputé social-démocrate allemand et président de la commission du Commerce.

Reste une question. Que se passerait-il si la France et ses alliés obtenaient gain de cause ? Le Canada demanderait des contreparties. De nouvelles négociations pourraient alors s'ouvrir L'entrée en vigueur de l'accord CETA, et de son grand frère, le traité transatlantique pour le commerce et les investissements entre l'Union européenne et les Etats-Unis (TAFTA/TTIP), qui intègre également les mécanismes d'arbitrage controversés, seraient alors retardée. Paris ne s'en plaindrait pas.

Fabien Piliu
Commentaires 16
à écrit le 14/01/2015 à 14:18
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Attention encore une annonce en trompe l'oeil, ils vont annoncer ensuite qu'ils s'aplatissent.... Ce rétropédalage n'est pas crédible sinon pour faire croire au français moyen qui n'a pas le temps de se renseigner qu'ils feraient barrage au traité ...

à écrit le 14/01/2015 à 12:49
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La France avait dit amen alors que les allemands se retrouvaient comme des niais tout seuls à dire non, et maintenant vu les réactions de nombreux français indignés par la concession du gouvernement français, essaie de nous faire croire qu'il revient...

à écrit le 14/01/2015 à 10:58
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Encore une fois faut-il souligner le rôle précurseur de notre pays, quand les autres font de l'à-platventrisme.

le 14/01/2015 à 12:52
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je cois que tu n'as pas bien suivi, comme d'ailleurs beaucoup de français qui finalement ont du mal à saisir les contradictions de nos chers politiques, soient par ce qu ce sont des esbroufeurs, des incompétents, des manipulateurs, etc...et ça parait...

à écrit le 13/01/2015 à 20:11
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Ce système de tribunal d'arbitrage privé est taillé sur mesure pour les USA. C'est le système du plus fort. Si les USA étaient condamnés, ils n'accepteront jamais et personne n'ira par la force les contraindre à le faire. Et si jamais une entreprise ...

le 13/01/2015 à 20:21
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@Jeff Roland DUMAS dans cette approche éclairée qu'accorde un troisième âge lucide et bien rempli .. : "En réalité, aujourd'hui, ceux qui commandent sont les États-Unis et Israël. Aujourd'hui, nous sommes dans une alliance où la France n'a plus rien ...

le 14/01/2015 à 10:46
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Exact. L'ICSDI étant sur le sol US, elle a une forte incitation à rester en bons terems avec l'Etat qui l'héberge. Par ailleurs, l'arbitrage rogne sur la souveraineté nationale et le droit des peuples à décider d'eux-mêmes. Au nom du profit, les US à...

le 14/01/2015 à 12:10
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Tout à fait d'accord, ou est la démocratie quand une multinationale est plus forte qu'une décision souverain d'un peule. Le pouvoir en France est vraiment en dessous de tout pour avoir accepter dans discuter.

à écrit le 13/01/2015 à 19:36
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L 'UPR ne commencera à croire à la volonté du gouvernement et des européistes de faire respecter les principes démocratiques que lorsque des débats, contradictoires, sérieux et approfondis, auront lieu - aux heures de grande écoute sur les grands mé...

le 13/01/2015 à 20:05
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Ah non ce n'est pas une officine raciste, juste des gens qui n'ont pas vu qu'on a changé de siècle. Allez chacun pour sa gueule

le 14/01/2015 à 9:39
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il est vrai que si la France est toute seule avec une économie éffondrée, une société au bord de l'implosion etc... cela nous permettra d'être puissant au niveau international !! l'€ est au plus bas, les taux d'interêts au plus bas les pétrole au ...

le 14/01/2015 à 12:56
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Bravo, très bien. La France a beaucoup trop démissionné par les sabotages de traités ou compromis, au point d'avoir perdu sa souveraineté matérielle et spirituelle.

à écrit le 13/01/2015 à 19:13
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Il faut trouver une MAJORITE EUROPEENNE en 6 mois? C'est possible ça? Les grands industriels Allemands ne visent-ils pas le marché Américain (en pleine expansion)?? Jusqu'à présent l'Europe a été un marché de dupes économique et social.

à écrit le 13/01/2015 à 19:02
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On est en ordre de bataille pour nous endormir car on ne voit pas du tout l'avantage d'un traité de ce coté de l'atlantique!

à écrit le 13/01/2015 à 18:46
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que la tutelle de ces accords ne soit pas supervisée uniquement par la Justice Américaine , mais par la justice Européenne .

à écrit le 13/01/2015 à 18:37
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Euh c est quoi l upr? Encore une officine raciste sous couvert de patriotisme ?

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