"Une guerre des prix se profile sur les complémentaires santé" (Guillaume Sarkozy)

Pour Guillaume Sarkozy, délégué général de Malakoff Médéric, les seuls acteurs susceptibles de survivre à la bataille qui s'annonce sur le marché de l'assurance complémentaire santé sont ceux combinant une expertise de l'assurance collective, de la prévoyance et de la prévention. À l'image de Malakoff Médéric, qui parachève son rapprochement avec la Mutuelle générale...
Le secteur de l'assurance complémentaire santé s'est métamorphosé en deux décennies : Il y a vingt ans, on comptait 10 000 acteurs sur ce marché, aujourd'hui 604. Et, selon Guillaume Sarkozy, bientôt seulement une trentaine.

LA TRIBUNE - La généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés du privé ouvre un nouveau marché, et va donner lieu à une bataille à couteaux tirés entre mutuelles, institutions de prévoyance et assureurs. Quelles sont vos armes ? Quelle est votre stratégie ?

GUILLAUME SARKOZY - Il y a deux volets : le produit, ce que nous allons proposer aux chefs d'entreprise ; et la distribution, comment nous allons vers eux. S'agissant du produit, il n'est plus question de proposer aux chefs d'entreprise et aux salariés qu'ils assurent un simple remboursement des dépenses de santé en complément de la Sécurité sociale. Je pars du principe que la santé des personnes est globale. Quel que soit le problème de santé et son origine, il influe sur le travail. Nous avons donc tout intérêt à avoir un regard global sur la santé des salariés, et investir massivement dans la prévention et les services liés à la prise en charge des malades, à leur accompagnement. Il existe une chaîne d'actes qu'il faut organiser, entre actes de santé, actes de vie sociale, et services. Et ce dans le cadre de véritables parcours thérapeutiques.

Exemple : je dois me faire poser une prothèse de genou. Je ne connais pas les questions à poser au chirurgien qui va me recevoir. Il reviendra bientôt à mon assureur (complémentaire) de me conseiller, et de m'indiquer les questions à poser au chirurgien : quel est le taux d'infection nosocomiale, quelle est la qualité de la prothèse ? Quel est le taux de reprise ? Combien de fois avez-vous fait le geste ? Combien de jours vais-je rester à l'hôpital ? Qui va organiser les soins à domicile ? Après l'opération, je vais avoir besoin éventuellement d'une aide, pour emmener mes enfants à l'école, faire mes courses. Là aussi, mon assureur pourrait intervenir. C'est donc tout un parcours thérapeutique qui doit être mis en place.

Nous allons donc lancer une gamme de services aux salariés en entreprises, qui passent aussi par des programmes de prévention, de dépistage, de coaching...

 -Mais qui va payer ces services ? Les salariés et leurs employeurs y sont-ils prêts ?

Il n'est pas question d'augmenter les tarifs. Mais ces services, ces programmes de prévention certes utiles, sont évidemment coûteux. Comment sortir de cette contradiction ? Nous ne sommes pas des acteurs de santé publique, nous ne pouvons nous permettre de perdre de l'argent. Nous devons bien sûr bénéficier d'un retour sur cet investissement dans la prévention. Or, pour l'essentiel, c'est l'assurance maladie, la Cnam, qui en recueillera les fruits, avec une moindre fréquence des maladies, notamment les plus longues. De notre côté, le retour sera très faible, puisque nous ne remboursons en moyenne que 15 % des dépenses de maladie, et ce surtout sur des secteurs spécifiques (optique, dentaire...). Le retour, il aura lieu indirectement : il prendra la forme d'un absentéisme moindre, d'indemnités journalières moins importantes, d'une baisse de l'invalidité. Autrement dit, les dépenses de prévoyance seront moindres. Soixante-dix pour cent des dépenses de prévoyance (incapacité, invalidité, arrêt de travail) sont le fait de cinq familles de pathologies que l'on peut dépister. Et il est possible de diminuer sensiblement leur prévalence.

Donc, ma stratégie est claire : c'est proposer aux entreprises un contrat santé, tout en installant concomitamment un contrat de prévoyance. Avec les économies réalisées sur ce dernier, il sera possible de financer, à terme, les dépenses associées au contrat santé, telles que les services ou la prévention.

-Où en êtes-vous dans la constitution de réseaux de soin ?

Dans l'optique et l'audioprothèse, cela fonctionne. Nos assurés ont la possibilité d'aller dans notre réseau où les prix sont inférieurs de 30 % à ceux du marché et, du coup, de réduire leur reste à charge. Pour les soins dentaires, nous avançons. Mais c'est plus compliqué que pour les opticiens. Nous discutons avec des médecins, le Conseil de l'Ordre, la médecine libérale.

 -Et comment allez vous vendre votre contrat santé auprès d'une multitude de PME-TPE, vous qui êtes habitués à travailler avec de grandes entreprises ?

Nous sommes engagés dans une opération de rapprochement avec la Mutuelle générale. Grâce à celui-ci, nous augmenterons notre réseau de distribution : un millier de commerciaux vont sillonner la France pour organiser le marché, aller à la rencontre des clients. Nous allons mettre en oeuvre, en outre, un accord de commercialisation avec la Banque postale pour toucher les PME/TPE dans leur réseau de distribution. Ainsi, nous pourrons avoir, de manière plus homogène, des clients dans toute la France.

 -La généralisation de la complémentaire santé va concerner surtout les TPE-PME. Les chefs d'entreprise concernés ne vont-elles pas privilégier les contrats à faible prix ?

Effectivement. La guerre des prix se profile, notamment sur le contrat de base. Les prix seront extrêmement faibles. La bagarre ne fait que commencer, entre les acteurs qui veulent conserver leur place et ceux qui veulent prendre des parts de marché.

Certains nouveaux entrants sur le marché pensent que la santé est un eldorado. Ils vont au-devant de sévères désillusions. La santé collective fonctionne avec un résultat d'exploitation à « zéro moins ».

Or, nul ne peut gérer des activités indéfiniment déficitaires. Tôt ou tard, le marché devra trouver un équilibre Seuls ceux qui vont au-delà du contrat de base et qui offrent des services, permettant de dégager des excédents, survivront. C'est une tendance mondiale, qui n'a pas été forcément comprise en France. C'est la raison pour laquelle le 4 mai prochain, nous lancerons une nouvelle démarche associant toute une gamme de services aux contrats santé.

-Pourquoi avoir tant attendu ?

Pourquoi ne pas l'avoir fait auparavant ? Nous étions tous trop petits. Il y a vingt ans, on comptait 10 000 assureurs complémentaires, aujourd'hui 604 ; bientôt une trentaine. Nous n'avions pas la taille suffisante pour faire autre chose que de rembourser de façon passive. Aujourd'hui, après avoir grossi, nous pouvons négocier avec les professionnels de santé et organiser de vrais services.

-Qui va s'en sortir ?

Ceux qui ont un réseau de distribution fort, offrent de la prévoyance, ont déjà une expertise de l'assurance collective, et travaillent sur une offre de services.

La question des capitaux propres est en outre fondamentale. Pour faire de la prévoyance, de plus en plus de capitaux sont nécessaires. Car la baisse des taux d'intérêt et la mise en oeuvre de « Solvabilité II » va coûter cher en capital à l'ensemble du marché.

-Votre stratégie repose sur le couplage santé-prévoyance. Et si l'entreprise va chercher ailleurs la prévoyance ?

Elle serait tarifée différemment et ce serait une erreur de sa part.

-Un rapport publié récemment par le Conseil d'analyse économique [CAE] - placé auprès du Premier ministre - remet en cause l'existence même des assurances complémentaires santé. L'addition de caisses maladie de base et d'un deuxième étage complémentaire est de fait une originalité française, jugée coûteuse.

Ceux qui ont rédigé ce rapport feraient bien de se tenir à jour. Si le régime obligatoire et le régime complémentaire étaient identiques, si les complémentaires ne faisaient que rembourser de manière aveugle, alors, effectivement, ce système à deux étages devrait être remis en cause.

Le régime obligatoire, c'est la solidarité nationale, cela fait partie du pacte politique français. Qui dit solidarité nationale dit définition par l'État, par les élus, des contours de ce système. Un panier de soins est établi, financé par des impôts et taxes, puisqu'il s'agit d'un système de solidarité nationale. L'organisme qui gère ce système est nécessairement monopolistique. La Cnam ne peut pas contractualiser avec les offreurs de soins, elle ne peut que conventionner. La différence avec les assureurs complémentaires est fondamentale : le système obligatoire est contraint d'accepter tous les acteurs ayant les qualifications requises, c'està-dire les diplômes. Tous les médecins, bons ou moins bons, sont en quelque sorte pris en charge par la Sécu. Nous, qui pouvons contractualiser, pourrions choisir les professionnels avec lesquels nous travaillerions avec des critères de qualité, constituer des réseaux, améliorer la qualité des soins, négocier les prix... toutes choses que ne peut pas faire la Sécurité sociale. Et que nous allons entreprendre si la loi nous l'autorise. Si nous ne le faisions pas, si nous continuions de rembourser à l'aveugle, les auteurs du rapport du CAE auraient raison. Mais vous voyez bien que ce n'est plus le cas. Cela étant, pour avancer, nous avons besoin de plus transparence. Nous complémentaires, avons la prétention de travailler avec les meilleurs professionnels : Nous avons besoin de savoir quel est le vrai coût de l'acte, de la pathologie, arrêt de travail compris. Il existe en France des chirurgiens qui ont 2 % de taux de reprise, d'autres beaucoup plus. Cette information n'est pas disponible. C'est inacceptable.

Commentaires 21
à écrit le 11/07/2015 à 21:31
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Quand je pense que ma retraite complémentaire est entre les mains de cet entrepreneur en faillite , ancien du MEDEF , recasé grâce à ses relations dans un organisme qu'il va bien réussir à détourner de son objectif , à savoir gérer les caisses de ret...

à écrit le 16/02/2015 à 18:48
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Quand c'est pas Nico, c'est Guillaume ! Je me disais qu'en ce moment l'actualité sur le premier était plutôt pauvre. Remarquez qu'il ne fait pas tâche quand il s'agit de dire des conneries en blablatant des choses approximatives...

le 16/02/2015 à 20:23
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Vous êtes de la famille ?

à écrit le 16/02/2015 à 0:34
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Curieux exemple que celui choisi par Monsieur Sarkozy, qui montre son ignorance du domaine médical : quand on a l'âge de la prothèse totale de genou, il y a généralement bien longtemps que l'on a plus d'enfants à l'école. Plutôt des petits-enfants vo...

à écrit le 15/02/2015 à 18:33
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Comme pour les caisses de retraite, il faut tout regrouper et simplifier. Trop de monde vit sur la bête. Pour les mutuelles, il faut aussi tout regrouper...dans la Sécurité Sociale.

le 15/02/2015 à 20:15
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Valbel89 vous avez raison trop de monde vit sur la bête alors que certains n'ont cotisé ou presque pas , certains sont lésés bien qu'ayant travaillé plus surtout des femmes dont le mari touche une bonne retraite , elle se retrouvent minorées par rapp...

le 15/02/2015 à 20:41
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Nous nous avons une pepiniere de chevalier du fiel dans nos mairies on fait avec

le 04/03/2015 à 9:38
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Je ne vois pourquoi sans savoir vous faites des conclusions negatives. C EST BIEN FRANCAIS çA!!!!!!

à écrit le 15/02/2015 à 16:47
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Confier ses cotisations d'assurance santé à un Sarkozy, c'est comme confier son argent de poche à Madoff faut être kamikaze !

à écrit le 15/02/2015 à 15:36
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Personne ne dit comment va se faire la transition à quel moment va t-il falloir abandonner sa mutuelle pour prendre celle de l'employeur .

à écrit le 15/02/2015 à 12:10
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Il raconte des histoires comme sont frères. Le prix des mutuelles n'a cessé d'augmenter ces dernières années et il va continuer à le faire. Comme les mutuelles seront obligatoires partout, on aura pas le choix que de subir ces augmentations.

le 16/02/2015 à 15:29
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c 'est comme le générique qu il nous à imposer pour s 'n mêttre plein les poche

à écrit le 15/02/2015 à 11:40
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Les réseaux de soins sont une belle connerie ou le "pigeon" envoye par sa mutuelle croit faire une bonne affaire mais la qualité des produits n'est pas celle que veux nous faire croire la gentille mutuelle qui réduit ses dépenses.

à écrit le 15/02/2015 à 11:35
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Il y a toujours ceux que la logique comptable dérange sauf quand il s'agit de leurs sous. Le déficit est signe de mauvaise gestion et il se traduit en dettes qui finissent par détruire le système. Faire payer les autres est le credo de la gauche. Ce ...

à écrit le 15/02/2015 à 10:47
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Si tout l'argent qui va dans ces entreprises d'assurance, frais de fonctionnement inclus, allait à la Sécu qui ferait le complément de remboursement, ne serait-ce pas "mieux" ? Là ça fait travailler du monde, mais bon.... La mutuelle/complémentaire g...

à écrit le 15/02/2015 à 10:34
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Sarko 2 serait-il si naïf, ou cherhcerait-il à manipuler ses clients potentiels ? A touts ses questions de son exemple, il faut s'attendre à ce que le chirurgien réponde "je suis le plus beau, le plus intelligent, etc.", car on attrape pas les mouche...

le 15/02/2015 à 19:15
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c est bien possible.

le 15/02/2015 à 19:15
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c est bien possible.

à écrit le 15/02/2015 à 9:28
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Il est assez drôle et révélateur de lire ceci : "Nous ne sommes pas des acteurs de santé publique, nous ne pouvons nous permettre de perdre de l'argent." Normalement aucun opérateur public ou privé, de service public ou non, ne devrait se permettre d...

le 15/02/2015 à 9:54
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Dans une entreprise familiale ou personnelle, le patron est rémunéré quand son entreprise fonctionne bien et dégage des bénéfice. Eux ne veule pas baisser leur salaire voir même n'ont de cesse que de l'augmenter qu'elle fasse faillite ou non... Ce so...

le 15/02/2015 à 10:32
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Ce que je comprend c.est qu'un acteur public vise l'équilibre 0 alors qu'un privé vise un excédent de 10 ou 20 % pour rétribuer ses actionnaires. ..

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