La contestation en Europe grandit sous des formes très variées

Les émeutes sont difficiles à décrypter. Elles soulignent en tout cas l'incapacité des États à préserver la cohésion sociale tout en imposant la rigueur.
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Les émeutes urbaines qui se propagent en Grande-Bretagne ne sont pas politiques. Comme la révolte des banlieues en France. Elles témoignent avant tout de problèmes économiques et sociaux, dans des quartiers déshérités, où précarité des jeunes et faible mixité des populations (Tottenham est cependant un quartier très mélangé) forment, de longue date, un cocktail dangereux. Et à ce titre, le Royaume-Uni a toujours eu beaucoup de problèmes de délinquance, de violence, de jeunes mères célibataires ou de chômage de longue durée. Ce qui marque en soi l'échec d'un modèle social.

Pour autant, ces affrontements et ces pillages s'inscrivent dans un contexte particulier de gestion de la crise et de rigueur que les politiques devront, bon gré mal gré, prendre en compte. Le gouvernement de David Cameron est en effet engagé dans un plan d'austérité d'une d'ampleur inégalée avec, à la clé, plus de 80 milliards de livres de coupes budgétaires. C'est tout le filet de protection sociale qui est remis en cause. Et la grogne ne se limite pas aux grandes villes et à leurs quartiers défavorisés mais elle touche également, sans faire la une des quotidiens, les banlieues des classes moyennes et les petites villes confrontées à la suppression annoncée de leur bibliothèque ou de leur crèche.

Plus grave pour le Premier ministre, les réductions de dépenses compromettent gravement son grand projet de « Big Society », largement inspiré du camp conservateur américain, et qui consiste à proposer le bénévolat comme alternative aux services publics. Sa mise en oeuvre implique toutefois des subventions aux associations qui sont... remises en cause.

Cantonner ces événements à un seul problème de délinquance serait donc politiquement imprudent. Les politiques doivent gérer une nouvelle équation : celle d'États ruinés par la crise financière qui n'ont plus les moyens de financer la protection sociale. D'où une remise en cause progressive, de plus en plus teintée d'idéologie, de l'État providence avec, à la clé, la mise en place d'un nouveau système de protection sociale « sous conditions ».

En Grande-Bretagne, le Parti conservateur souhaite faire travailler le chômeur pour l'État, une idée d'ailleurs reprise en France au sein de la majorité. Il faut combattre « l'assistanat » ou encourager « la responsabilité individuelle », autant de discours qui auraient été qualifiés « d'extrémistes » il y a quelques années encore.

En Europe, le mouvement des Indignés en Espagne ou en Italie (les « 5 étoiles ») ou les manifestations en Grèce contre les réformes ne sont pas de même nature mais ils illustrent une même réalité, celle d'une contestation grandissante face à ce retrait annoncé de l'État. Et elle ne concerne pas seulement les catégories de population les moins protégées mais aussi de plus en plus les classes moyennes, dont les étudiants sont les nouveaux porte-drapeaux. Même aux États-Unis, les 100.000 personnes qui ont défilé dans l'État du Wisconsin, en majorité des Blancs de la classe moyenne, pour protester contre la suspension des droits syndicaux des fonctionnaires locaux, ont frappé les esprits.

Le politique doit désormais faire face à cette contestation et trouver les solutions pour éviter que le désengagement de l'État ne se traduise par un autoritarisme d'État.

Commentaires 7
à écrit le 11/08/2011 à 22:08
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Fabriquer des stades pour une compétition sportive comme l'euro de football, c'est de la dépense inutile. en effet, ou sont les stades du mondiale de foot de 1998?

à écrit le 11/08/2011 à 13:00
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En situation de crise pour que la cohésion sociale soit maintenue il faut que les efforts demandés soient perçus comme justes par une majorité de la population. or avec le système libéral les recettes sont toujours les mêmes d'abord supprimer les aid...

à écrit le 11/08/2011 à 8:28
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"Les émeutes urbaines qui se propagent en Grande-Bretagne ne sont pas politiques. Comme la révolte des banlieues en France. Elles témoignent avant tout de problèmes économiques et sociaux, dans des quartiers déshérités, où précarité des jeunes et fai...

à écrit le 10/08/2011 à 11:36
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les gens contesteraient moins si nos elus prouvaient eux aussi qu'ils sont touchés par la crise et qu'ils font des economies.; Au lieu de ça, il ressort chaque mois une affaire de délit d'initié, abus de bien social, et autres affaires nauséabondes. ...

à écrit le 10/08/2011 à 8:50
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C'est la fin des démocraties occidentales qui se profile à l'horizon. Au chaos mercantile engendré par la cupidité, le "toujours-plus" des classes moyennes, les transferts massifs de technologie et de capitaux vers des pays lointains, ne peuvent succ...

à écrit le 10/08/2011 à 8:11
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"En Grande-Bretagne, le Parti conservateur souhaite faire travailler le chômeur pour l'État, une idée d'ailleurs reprise en France au sein de la majorité." En gros cela veut dire seuls les riches auront le droit d'être des capitalistes, pendant le pe...

à écrit le 10/08/2011 à 7:56
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il n'y a pas lieu de s'étonner de ces mouvements de protestation, c'était même hautement prévisible, et les "gouvernants" d'où qu'ils soient n'ont pas pris la juste mesure du risque d'explosion et pourtant... chacun sait que lorsque des mesures d'aus...

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