La guerre des clans se réveille en Chine

Lorsque l'adjoint d'un dirigeant promis au plus brillant avenir, disparaît de la circulation pour cause de "grande fatigue", après s'être rendu dans un consulat américain, c'est le signe que les règlements de compte entre clans opposés de la direction chinoise ont commencé. Rien de plus normal à quelques mois d'un changement en profondeur de l'exécutif.
Xi Jinping, Vice-président chinois. La semaine prochaine, le numéro deux chinois doit se rendre en visite officielle aux Etats-Unis - Photo Reuters.

La semaine prochaine devait être celle de la consécration internationale pour Xi Jinping, Vice-président chinois et successeur désigné de Hu Jintao. Le numéro deux chinois doit en effet se rendre en visite officielle aux Etats-Unis, un séjour très médiatique et qui doit lui permettre, entre autres, de retourner à Muscatine, une petite ville de l'Iowa dans laquelle il avait séjourné en 1985, à la tête d'une délégation agricole, puisque Li exerçait alors des responsabilités dans une région connue pour ses élevages de porcs. Surtout cette visite devait être l'occasion pour Xi de se faire mieux connaître du public américain,  d'approfondir encore les liens qu'il entretient avec le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden et de renconctrer Barack Obama à la Maison Blanche. Bref, une sorte de "mise en jambes" internationale, dans un pays clé pour la Chine et avec lequel les relations ne sont pas au beau fixe actuellement. 

Une étrange affaire

Mais une bien étrange affaire, qui vient d'éclater dans la ville de Chongqing, dans le sud-ouest du pays, risque de jeter un certain trouble sur ce voyage.  Le maire-adjoint de cette ville très active, Wang Lijun vient d'être mis "au repos" à la suite de surmenage dû "au trop lourd travail effectué au cours des derniers mois" selon les termes des autorités. Or il se trouve que Wang est une sorte de "vedette" à Chongqing où, en charge de la police et de la sécurité, il a obtenu des résultats spectaculaires dans la lutte contre le crime organisé et le banditisme. Plus étrange encore, le consulat des Etats-Unis à Chengdu, a confirmé avoir reçu la visite de Wang au début de cette semaine, pour des raisons qui ne sont pas offciellement révélées. Mais les rumeurs d'une possible défection de Wang ont immédiatement circulé en Chine et aux Etats-Unis. La situation de Wang est intéressante parce qu'il est le plus proche collaborateur de Bo Xilai, le "patron" de Chongqing, 32 millions d'habitants, une ville qui n'a pas l'attrait des grandes capitales côtières chinoises comme Canton ou Shanghaï mais que Bo, avec un dynamisme et une fougue qu'on lui avait déjà connues lorsqu'il était maire de la ville de Dalian, a transformé en une véritable capitale économique du Grand Ouest chinois dans laquelle le gouvernement a décidé en 2010 de créer une Zone économique spéciale de 1.200 kilomètres carrés, soit presque quatre fois la taille de celle de Shenzen.

Culte de Mao et chansons révolutionnaires

Chongqing est donc une sorte de "ville modèle" placée sous la supervision directe du Parti. Ce succès a attiré sur Bo l'oeil de Pékin, et il a lui-même assez bien manoeuvré en ce sens en en faisant des tonnes dans le genre "reviving" de Mao, du maoisme et des chansons révolutionnaires. Au point qu'il figure en bonne place sur la liste de ceux qui peuvent être appellés, à l'automne prochain, à siéger au comité permanent du Politburo, le "gouvernement" du Parti, composé de neuf membres, et dont le prochain patron doit être Xi Jinping. Atteindre l'adjoint d'un dirigeant pour le compromettre est une tactique éprouvée dans les régimes communistes et singulièrement en Chine, notamment alors du déclenchement  de la Révolution culturelle. Il y a donc une possibilité pour que les longues vacances auxquelles est ardemment convié Wang Lijun, soient une façon de compromettre les chances de Bo Xilai d'accéder aux plus hautes responsabilités. 

La famille des Princelings

Il est d'ailleurs à noter que Xi et Bo ont au moins un point commun: ils appartiennent tous deux à cette famille que l'on nomme en Chine les "Princelings" c'est à dire les fils de grands révolutionnaires ayant servi Mao. Xi Zhongzhun fut un révolutionnaire dévoué dans les années 30, avant de devenir Vice-premier minitsre dans les années 50 puisd'être destitué en 1962 , emprisonné, et réhabilité par Deng à la fin des années 70. Quant au père de Bo Xilai, il fut aussi l'un des camarades de combat de Mao, exerça lui aussi des fonctions de Vice-premier ministre et fut victime des purges maoistes dans les années 60. On sait que ces "Princelings" s'opposent à d'autres groupes, dont celui qui rassemble les anciens dirigeants des Jeunesses communistes, qui viennent plutôt des zones rurales pauvres. Cette animosite de "classe" rythme l'histoire politique chinoise depuis une bonne vingtaine d'années.

Couvert de cicatrices

Pour l'heure, il est encore bien difficile de tirer des conclusions définitives de cette affaire. Bo Xilai n'est le premier venu dans la vie politique chinoise, "son corps est couvert de cicatrices", comme le rappellent ses amis, sous entendant que l'homme est coriace et qu'il n'est pas du genre à renoncer à ses ambitions. Beaucoup de rumeurs ont couru ces derniers mois sur le fait que les changements prévus à l'automne ne seraient peut-être pas aussi radicaux qu'on le pense, voire qu'une partie de l'exécutif, et notamment Hu, pourrait rester en place. Cela ne signifie qu'une chose: la lutte fait rage et à partir de maintenant, tout mouvement significatif au sein de la direction chinoise sera désormais à étudier à la loupe...

Commentaires 5
à écrit le 10/02/2012 à 10:32
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les rivalités de clan, les rancures,la jalousie, la courses aux faveurs et les vengences politiques ont toujours existé en Chine , la rancune peut s étaler sur extremement longtemps la vengence appellant la vengence ...Un de mes amis chinois m expli...

à écrit le 10/02/2012 à 9:56
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La Chine à des petits soucis de croissance et la dessus il faut changer d'équipe dirigeante. Aux USA la campagne présidentielle fait rage et en Chine au dessous de l'image de calme plat et de "transition sereine" c'est un énorme combat qui se livre l...

le 10/02/2012 à 11:21
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Si la "campagne" chinoise n'attire pas les foules c'est que quel que soit le nouveau dirigeant, la politique du Parti ne changera pas d'un iota , la marche a suivre étant dicté depuis quelques années déjà. Par contre aux USA la répercussion ne sera p...

à écrit le 09/02/2012 à 20:48
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En gros sur la Chine il y a que ça à dire !

à écrit le 09/02/2012 à 18:09
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Pas facile de s'y retrouver...

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