Le Premier ministre chinois dresse un bilan globalement positif de sa mandature

En clôturant les dix journées de travaux de la session parlementaire, Wen Jiabao a tenté après neuf ans de mandat de consolider son image "proche du peuple" et lancé un appel aux réformes. Les observateurs restent sceptiques.
Wen Jiabao, premier ministre chinois/Copyright Reuters

Dans sa dernière conférence de presse publique jeudi avant de quitter le pouvoir, le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, s'est positionné d'abord comme réformateur politique, économique et social. Tout en défendant l'actuelle politique économique chinoise, notamment sur le sensible sujet de la monnaie, il a appelé à plus de réformes politiques dans une longue conférence de presse - trois heures - que les analystes voient avant tout comme un testament politique. "J'ai plus que quelques regrets", a-t-il confié en ouverture, visiblement ému. "Ces neuves années (au pouvoir) n'ont pas été faciles, ni ordinaires", a-t-il indiqué. La conférence vient clore 10 jours de session parlementaire qui réunit une fois par an les 3.000 délégués dont le rôle est avant tout d'acquiescer une série de lois et le budget pour l'année à venir.

La nécessité de réformes politiques
Wen Jiabao a profité de cette dernière réunion avec la presse pour insister sur la nécessiter de réformer le pouvoir politique qu'il lie à la poursuite de la croissance économique. "Sans réformes politiques, les réformes économiques ne peuvent continuer. Il est nécessaire de réformer le Parti et la direction de l'Etat". a-t-il affirmé. Ces déclarations, largement reprises par la presse chinoise jeudi, ne sont pas nouvelles pour le Premier ministre. Le thème est abordé régulièrement tant avec les journalistes étrangers qu'avec les dirigeants politiques et économiques, mais à quelques mois de sa retraite c'est la première fois que Wen Jiabao insiste autant sur "l'urgence" de réformer l'actuel système politique.

"Un message adressé au monde"

"Il n'a rien à perdre. C'est un message adressé au monde ainsi qu'une mise en garde à ces successeurs", explique Jean-Pierre Cabestan, professeur de sciences politiques à l'Université Baptiste de Hong Kong. Pour autant, Wen Jiabao est resté prudent sur l'application de la démocratie en Chine, restant très vague tant sur la définition du mot que sur les moyens d'y parvenir. A une question sur quand la Chine organiserait, elle aussi, ses élections libres, il a répondu : "Le système démocratique chinois tout en respectant les conditions nationales se développera pas-à-pas."
Le Premier ministre s'est aussi engagé à poursuivre les réformes sur le terrain social pendant sa dernière année au pouvoir et à réduire les inégalités, source de nombreux troubles sociaux et critiques au sein de la population depuis plusieurs années. "Je sais que la population n'est pas satisfaite des inégalités sociales et des injustices du système légal", a-t-il avoué. Ainsi a-t-il spécifiquement cité l'exemple des réquisitions de terrains "pour que les agriculteurs puissent protéger leur propriété"'. C'est la vente de terrains à des promoteurs sans compensation financière qui avait déclenché la révolte des villageois de Wukan dans le sud en décembre dernier.

Vers un autre modèle de croissance
En matière économique, il a confirmé les déclarations faites la semaine dernière par des officiels de la banque centrale pour qui la monnaie chinoise, le yuan, était "à un niveau proche de l'équilibre". Le week-end dernier, la Chine a connu le premier déficit de sa balance commerciale depuis 12 ans. La balance des paiements a également atteint 2,8 % du Pib en 2011, un niveau "en dessous des normes internationales", selon Wen Jiabao. Des arguments que les officiels mettent en avant pour éviter un retour de l'appréciation du yuan dont la valeur s'est depuis deux mois plus ou moins stabilisée face au dollar. Le Premier ministre a aussi défendu le nouvel objectif de croissance qui a été ramené à 7,5 %. Ce chiffre a été annoncé lors de son discours d'ouverture la semaine dernière. Même symbolique, il montre que la Chine cherche désormais à évoluer vers un autre modèle de croissance.

Aucun changement notoire dans les deux prochaines années

Cependant, si c'est bien le mot réforme qu'on doit retenir de cette conférence, les avancées politiques du gouvernement en place ne sont pas significatives. Et malgré les récentes déclarations du Premier ministre, les analystes ne s'attendent à aucun changement notoire ni en matière politique ni dans le domaine économique dans les deux prochaines années. D'ailleurs, mis à part une réforme de la procédure pénale, rien d'important n'a été annoncé durant cette dernière session de l'Assemblée. "Aucune réforme substantielle n'a eu lieu depuis le milieux des années 2000. Le gouvernement connaît les problèmes. C'est juste une question de savoir s'il y a un espace économique et politique pour les mettre en ?uvre", explique Alistair Thornton, économiste basé à Pékin pour le compte du centre de recherche IHS Global Insight. Ces déclarations de bonnes intentions ont été relevées par les internautes. Sur Weibo, le Twitter chinois, nombreux sont ceux qui soutiennent leur Premier ministre, mais la plupart attendent toujours "des résultats concrets".

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