Les États d'Afrique de l'Ouest imposent un embargo total au Mali

Alors que Tombouctou est tombée, lundi, aux mains des groupes islamistes, les chefs d'État d'Afrique de l'Ouest, réunis à Dakar, ont menacé d'une intervention militaire et annoncé un embargo total et immédiat contre la junte au pouvoir au Mali.
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Entre célébration et gravité, la ville de Dakar aura vécu lundi un jour historique. D'un côté, Macky Sall prêtait serment et devenait officiellement chef de l'État du Sénégal. De l'autre, les chefs d'Etat d'Afrique de l'Ouest réfléchissaient à une intervention militaire au Mali. Ils ont, par ailleurs, annoncé un "embargo total" et immédiat au moment où la ville de Tombouctou tombait aux mains des islamistes qui en ont chassé les rebelles touareg.

La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a décidé "de la mise en place immédiate" de sa force militaire "d'attente", a annoncé lundi à Dakar à l'issue du sommet le chef de l'Etat ivoirien Alassane Ouattara, président en exercice de l'organisation. Pour cela, les douze chefs d'Etat présents ont "demandé au comité des chefs d'état-major de se réunir dès cette semaine à Abidjan pour voir les modalités d'activation de cette force", a déclaré le président ivoirien. Préventivement, la Cédéao avait déjà mis en état d'alerte en fin de semaine dernière une force militaire de quelque 2.000 hommes.

Embargo total

L'organisation a également décidé d'un "embargo total" contre la junte au pouvoir à Bamako, en application des menaces annoncées lors d'un précédent sommet sur la crise malienne le 29 mars à Abdijan. "Toutes les mesures diplomatiques, économiques, financières et autres sont applicables dès aujourd'hui (lundi) et ne seront levées que quand l'ordre constitutionnel (sera) effectivement rétabli", a déclaré Alassane Ouattara, soulignant: "nous avons demandé que l'embargo soit total par rapport à tous les Etats voisins du Mali".

Le sommet auquel ont participé une dizaine de chefs d'Etat et des représentants de l'ONU, de la France et des Etats-Unis notamment, s'est tenu après la prestation de serment du nouveau président sénégalais Macky Sall. Acteurs clés du Sahel, la Mauritanie (avec le président Mohamed Ould Abdel Aziz) et l'Algérie, qui ne sont pas membres de l'organisation, assistaient à la réunion. Alassane Ouattara s'est félicité de la présence de ces deux voisins du Nord du Mali, laissant entendre que l'embargo s'appliquerait également sur cette zone aux mains de la rébellion et des groupes armés. Le chef de la junte, le capitaine Amadou Sanogo a "pris acte" de ces sanctions, rappelant cependant que "l'urgence est le recouvrement de l'intégrité territoriale" dans le Nord.

Prise de pouvoir des islamistes d'Ansar Dine et d'Aqmi à Tombouctou

Au moment où étaient prises ces décisions, la ville historique de Tombouctou, ancien haut-lieu touristique du Mali, était tombée aux mains des islamistes d'Ansar Dine (défenseur de l'Islam) et d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). L'agence d'information en ligne mauritanienne Al-Akhbar, a affirmé lundi que "des forces d'Aqmi ont investi dimanche soir la ville de Tombouctou, avec 50 véhicules surarmés". L'un des chefs d'Aqmi, "Yahya Abou Al-Hammam, est entré dans la ville et fait de l'ancien état-major" de l'armée malienne "dans la ville son Quartier général". "Désormais, les drapeaux d'Aqmi flottent sur l'état-major et partout dans le reste de la ville", ajoute Al-Akhbar.

Un chef historique d'Aqmi, l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, qui était parti en Libye depuis plusieurs semaines, est revenu dans le Nord du Mali, a par ailleurs appris lundi l'AFP de sources sécuritaires régionales. "Il semble qu'on le voit de plus en plus aux côtés de Iyad Ag Ghaly", a affirmé l'un de ces sources.

Sous pression, la junte qui a pris le pouvoir le 22 mars avait promis dimanche le retour à un pouvoir civil et une transition vers des élections à une date non précisée. La rébellion touareg du MNLA et les autres composantes de la rébellion, groupes islamistes et trafiquants, ont pris coup sur coup depuis vendredi les trois capitales régionales du nord: Kidal, Gao et Tombouctou, sans rencontrer de résistance.

Une armée malienne en déroute

Des événements qui suscitent beaucoup de craintes parmi les populations.Des habitants fuient leurs maisons. Et l'armée malienne, dont la désorganisation a été aggravée par le putsch et qui ne peut lutter contre l'armement lourd dont disposent les rebelles touaregs et groupes islamistes -armes qui proviendraient de Lybie et auraient été apportées par des centaines de supplétifs de Kadhafi en 2011-, est bien en peine face à cette fulgurante offensive.

Les hommes d'Ansar Dine ont clairement annoncé leur intention d'appliquer la charia dans tout le Mali, la MNLA, mouvement laïque souhaitant, lui, créer un Etat touareg dans le nord du pays. Le Conseil de sécurité de l'ONU se réunira mardi pour examiner la crise au Mali.

"Pas question de mettre des soldats français sur le sol du Mali" selon Alain Juppé

"La situation se dégrade très rapidement", a déclaré Alain Juppé qui a conseillé aux Français "dont la présence n'est pas indispensable" de quitter le Mali où la France, "ne s'engagera pas militairement". "Nous pouvons aider sur le plan logistique ou la formation, mais il n'est pas question de mettre des soldats français sur le sol du Mali", a-t-il précisé.

Le Conseil de sécurité de l'ONU pourrait être saisi par Paris des éventuels "besoins" de la Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour régler la crise au Mali, a annoncé le ministère français des Affaires étrangères. "La France soutient les efforts de la Cédéao, qui a mandaté le président Compaoré comme médiateur, et elle relaiera auprès du Conseil de sécurité, avec ses partenaires africains au sein du Conseil, les besoins de la Cédéao pour appuyer ses actions", a dit le porte-parole adjoint du ministère, Romain Nadal.

 

Commentaire 1
à écrit le 03/04/2012 à 17:48
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Aider à renverser le Colonel Kadhafi était certes une mission nécessaire mais cette action est en train de faire naître un "Afghanistan" africain....

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