La Turquie renforce le contrôle d'internet

Le Parlement a voté une série de mesures permettant aux autorités de bloquer un site internet, sans décision de justice, dès lors qu'il contient des informations portant "atteinte à la vie privée" ou des contenus "discriminatoires ou insultants".
Les députés de l'opposition ont multiplié en vain les interventions pour dénoncer un texte "liberticide".

Le sort en était déjà jeté. Après seulement quelques heures d'un débat animé, le Parlement turc a voté mercredi soir une série de mesures destinées à renforcer le contrôle de l'Etat sur le web. La surprise n'est pas grande puisque le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir y dispose de la majorité absolue.

Mesures "liberticides"

Le texte voté autorise notamment l'autorité gouvernementale des télécommunications (TIB) à bloquer, sans décision de justice, un site internet dès lors qu'il contient des informations portant "atteinte à la vie privée" ou des contenus jugés "discriminatoires ou insultants". Une prérogative qui relève de la "censure", estime l'opposition.

Plus délicat encore, la TIB pourra désormais obtenir des fournisseurs d'accès et des hébergeurs de sites toute information qu'elle jugera utile sur les activités des internautes. Des données qu'elle pourra conserver pendant deux ans.

Les députés d'opposition ont tenté, en vain, de contrer la loi avancée par le parti du Premier ministre islamo-conservateur Erdogan, parfois avec violence.

"A votre arrivée au pouvoir, vous parliez de renforcer la démocratie en Turquie, aujourd'hui vous tentez d'imposer le fascisme", a lancé Hasan Ören, un élu du Parti républicain du peuple (CHP), "souvenez-vous qu'Adolf Hitler a employé les mêmes méthodes lorsqu'il a pris le pouvoir en Allemagne".

"Chaque jour notre démocratie régresse, ces mesures sont purement liberticides", a ajouté Altan Tan, un autre député du Parti pour la paix et la démocratie (BDP, prokurde).

"Etat orwellien"

Malgré les mises en garde de l'Union européenne, des Etats-Unis et de nombreuses ONG, le gouvernement turc fait mine de ne pas comprendre. "Il n'y a pas de censure sur internet", a déclaré lundi le vice-Premier ministre Bülent Arinç, "Nous sommes bien plus libres que beaucoup d'autres pays et nous respectons la liberté de la presse".

Depuis plusieurs années pourtant, Ankara fait partie des champions de la censure du web. Dans un "rapport sur la transparence" publié en décembre, le géant de l'internet Google l'avait même classée au premier rang, avec la Chine.

Et le gouvernement turc n'a pas attendu l'adoption de ces mesures pour déjà établir un contrôle d'internet.

Entre 2008 et 2010, le site de vidéos en ligne Youtube a été interdit pour avoir diffusé des images montrant des supporteurs de football grecs se moquant des Turcs. En juin 2013, à l'occasion des grandes manifestations antigouvernementales, c'était au tour de Twitter d'en prendre pour son grade, qualifié de "fauteur de troubles" par le Premier ministre.

Pour Yaman Akdeniz, professeur de droit à l'université privée Bilgi d'Istanbul cité par l'AFP, la nouvelle série de mesure est "un nouveau pas vers la création d'un Etat orwellien".

Commentaire 1
à écrit le 06/02/2014 à 10:03
Signaler
La Turquie contrôle les sites , ailleurs on contrôle les internautes et même on les bâillonnent .

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.