Issad Rebrab, l'industriel algérien qui a "sauvé" FagorBrandt

La patron du groupe Cevital, qui rachète pour 200 millions d'euros les marques de FagorBrandt, est le bâtisseur du premier groupe privé d'Algérie. Un homme qui promet que "l'humain est et sera toujours un capital précieux".
Troisième fortune d'Algérie, Issad Rebrab aurait pour devise : "voir grand, commencer petit et aller vite". Reuters
Issad Rebrab est devenu mardi soir le "sauveur" de FagorBrandt. Le tribunal de commerce de Nanterre a validé sa reprise pour 200 millions d'euros du groupe d'électroménager , en redressement judiciaire depuis novembre. Le conglomérat algérien était le seul à proposer une offre globale, soutenue par le ministre Arnaud Montebourg et assortie de deux partenaires : Variance Technologies et S20 Industries, pour les sites vendéens et leurs 223 salariés, à La Roche-sur-Yon et Aizenay. 

1 225 postes épargnés

L'activité des usines de Vendôme et d'Orléans, le siège de Rueil-Malmaison et les services après-vente de Cergy-Pontoise seront maintenus, permettant la préservation de 1 225 postes sur 1 759. Une promesse de conserver les emplois qu'Issad Rebrab avait rapidement mis sur la table des négociations.

Né il y a 69 ans dans les montagnes de Kabylie, Issad Redrab semble avoir appliqué à la lettre la devise qui lui a été attribuée "voir grand, commencer petit et aller vite". 

Du cours Pigier au conglomérat

 Il entame des études de comptabilité d'abord au cours Pigier de Thionville (Moselle) où son père était marchand ambulant, puis les poursuit un lycée jésuite à Metz. Il y est d'ailleurs le seul avec un protestant "à ne pas aller à la messe". Puis il démarre sa vie d'entrepreneur à la fin des années 1960, dans une Algérie qui se relève de la colonisation et tente une collectivisation de type soviétique, en créant un cabinet d'expertise comptable. Il constitue le noyau de son "empire" à partir d'une TPE (Très petite entreprise) de construction métallique lancée en 1971 avec quatre salariés.

Aujourd'hui Cevital est le premier groupe privé du pays qui se classe par le chiffre d'affaires juste derrière le géant pétrolier public Sonatrach, leader en Afrique. Son conglomérat, présent dans les secteurs aussi diversifiés que l'électronique, l'agro-alimentaire, la sidérurgie, le verre, l'électroménager, le BTP ou la distribution, a réalisé en 2012 un chiffre d'affaires de 3,5 milliards de dollars, contre seulement 50 millions 10 ans auparavant.

Son dirigeant travaillerait jusqu'à 14 heures par jour dans ses bureaux de la banlieue d'Alger. Père de famille, ses cinq enfants (quatre garçons et une fille) ont tous rejoint le groupe.

"L'humain est et sera toujours un capital précieux"

Début 2013, il inaugure l'université Cevital, avec un partenaire canadien, pour "répondre aux besoins en formation de cadres à haut potentiel".

"Au-delà des ressources financières qui s'empruntent, de la technologie qui s'achète, l'humain est et sera toujours le capital précieux et primordial qui se projette dans la durée", plaide Issad Rebrab.

Résilience

"Mes seuls échecs sont dus au terrorisme" affirme celui qui est décrit comme courtois mais ferme. Il a perdu sa plus grande usine en 1994, détruite par les groupes armés en représailles à la ligne éditoriale anti-intégriste de son journal: le quotidien francophone Liberté. L'usine réalisait alors un bénéfice annuel de 30 millions de dollars.

L'épreuve a failli être fatale mais Issad Rebrab a rebondi trois ans plus tard, dans l'agroalimentaire en créant Cevital. Le contexte était favorable dans un pays avec peu de concurrence : les entreprises publiques étaient à l'agonie et les investisseurs étrangers boudaient l'Algérie en raison de l'insécurité.

Le premier Algérien à entrer au classement Forbes des milliardaires

Le quotidien algérien El Watan  saluait en février dernier dans un article son "courage d'aller à la recherche d'opportunités d'affaires à l'étranger". Il serait parmi "les rares hommes d'affaires algériens à œuvrer pour l'élargissement de ses activités au delà de l'Algérie [...] et a compris que le transfert de technologies et de savoir-faire peut aussi se faire via des acquisitions d'entreprises". Pour preuve de ces activités trans-méditerranée : le sauvetage en 2013 du fabriquant français en faillite des portes et fenêtres en PVC, Oxxo. 

Toujours selon le journal algérois, sa "réputation à l'étranger ne fait que s'agrandir". En témoigne "l'intérêt affiché par les Français à son égard". Issad Rebrab a en effet été reçu le 17 février dernier par François Hollande. Il faisait partie des 34 investisseurs internationaux conviés à l'Elysée, parmi les patrons de Volvo, Nestlé ou encore Bosch. Le quotidien algérien Liberté notant avec fierté qu'il était, à cette occasion, le seul homme d'affaires africain parmi les invités. 

D'aucuns voient également le pinacle de sa réussite à travers son entrée au classement du magazine Forbes des milliardaires. Une "consécration" pour l'industriel obtenue en novembre 2013 qui le classe 8e au rang des plus importantes fortunes africaines, avec 3,2 milliards de dollars. Le magazine américain décrit par ailleurs ce succès comme "inhabituel dans un pays aux politiques difficiles pour les entrepreneurs". Issad Rebrab avait commenté à ce sujet dans les médias français qu'en Algérie "les grands patrons étaient acceptés, mais pas encouragés".

En désaccord avec l'actuel - et futur ? - président Abdelaziz Bouteflika

Une question d'autant plus épineuse à la veille des élections présidentielles en Algérie, où le président  Abdelaziz Bouteflika se présente pour un 4e mandat. Un scrutin couru d'avance selon la plupart des observateurs. Ce qui ne va pas dans le sens d'Issad Rebrab.

En 2004, il a claqué la porte du Forum des Chefs d'entreprises (FCE), la principale organisation patronale du pays, qui avait apporté son soutien à un deuxième mandat du président âgé aujourd'hui de 77 ans. En juin 2013, il a accusé Bouteflika, sur les ondes d'une radio algérienne, d'entraver ses projets industriels. 

Une allégation corroborée par le blocage de son projet d'une ville industrielle à Cap Djinet, sur le littoral est d'Alger. Il n'a pas eu le feu vert des autorités pour initier cet investissement de 20 milliards de dollars dans la pétrochimie, la construction automobile, la sidérurgie et l'aluminium. "Le gouvernement a regardé cela comme un rêve d'illuminé mégalomane" écrit son biographe Taïeb Hafsi.

Commentaires 14
à écrit le 16/04/2014 à 11:52
Signaler
Si tout ce qui est décrit est fidèle, ca nous change des groupes d'investisseurs dont le but est d'acheter à vil prix, de presser le citron et de jeter les salariés avec les friches industrielles. Et bien souhaitons lui bon succès avec son rachat...

à écrit le 16/04/2014 à 11:28
Signaler
"a réalisé en 2012 un chiffre d'affaires de 3,5 milliards de dollars, contre seulement 50 millions 10 ans auparavant.". Je crois que la politique actuelle était bénéfique pour lui ! arrêtez de critiquer notre politique a toute occasion possible ! con...

à écrit le 16/04/2014 à 11:21
Signaler
Les marques en ont prix un coup au niveau image. Déjà pour remplacer un pied de mixer Moulinex c'est quasiment la croix et la bannière !

à écrit le 16/04/2014 à 11:20
Signaler
Les marques en ont pris un coup. Face à à Bosch/Siemens, Electrolux et Whirlpool...

à écrit le 16/04/2014 à 11:16
Signaler
comme en angola ,les ex colonies sauvent les anciens exclavagistes !

le 16/04/2014 à 12:57
Signaler
n'importe quoi

le 16/04/2014 à 13:51
Signaler
En Algérie il n'y à pas grand chose qui à changé. Les anciens expats on simplement été remplacés par le FLN. Le système est le même : une population de pigeons au service d'une minorité.

à écrit le 16/04/2014 à 11:09
Signaler
3.2 milliards de Dollars en vendant de l'huile et du sucre ???

le 16/04/2014 à 11:30
Signaler
"Son conglomérat, présent dans les secteurs aussi diversifiés que l'électronique, l'agro-alimentaire, la sidérurgie, le verre, l'électroménager, le BTP ou la distribution " Vous ne savez pas lire?

le 16/04/2014 à 19:08
Signaler
lire avant d'ouvrir votre bouche

le 24/02/2015 à 20:32
Signaler
600000 tonnes de verre plats par années aussi et fabrication de panneaux sandwich et plusieurs investissements en agro-alimentaire

à écrit le 16/04/2014 à 9:39
Signaler
Le gouvernement Algérien a empêché le projet d'une ville industrielle à Cap Djinet en Kabylie c'est pour punir ces derniers qui sont toujours opposés à la politique des décideurs d'Alger.

le 16/04/2014 à 10:36
Signaler
il a fait fortune et on l'empeche de travailler, BIZARRE ?

le 24/04/2014 à 21:41
Signaler
un investissement de 20 milliards ? Je conteste le chiffre... Surement une erreur du journaliste ! Par ailleurs cet homme brilant a sans conteste ses entrees aupres du pouvoir, sans cela impossible de reussir dans ce beau pays gangrenė...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.