Au Japon, le déficit commercial se creuse depuis deux ans et atteint un niveau historique

Cela fait 24 mois que le Japon est en déficit commercial. Accentué par le yen faible et la hausse des importations, ce déficit a atteint un record historique au premier semestre 2014. Explications de ce flop.
Abenomics, le plan de relance du Premier ministre japonais Shinzo Abe, a accentué les déficits commerciaux du pays. (Photo : Reuters)

Deux ans! Cela fait deux ans que le Japon, ancienne puissance exportatrice, n'a pas connu un excédent commercial. Pire: l'archipel a encore enregistré un déficit commercial record au premier semestre 2014, en dépit des efforts du Premier ministre Shinzo Abe, le père du programme de relance Abenomics, pour redresser la barre.

Plus que quadruplé en un an

Ces six derniers mois, les comptes commerciaux ont affiché un solde négatif de 7.598 milliards de yens (55,5 milliards d'euros), en hausse de 58% par rapport au premier semestre 2013. Un niveau jamais atteint depuis le lancement de cette statistique sous cette forme en 1979.

Au cours du seul mois de juin, le déficit a plus que quadruplé sur un an, à 822 milliards de yens (6 milliards d'euros), selon des statistiques du ministère des Finances. Exception faite de l'Amérique du Nord, le Japon apparaît comme le grand perdant dans les échanges, en particulier avec la Chine et l'Union européenne.

Le yen faible rend les importations plus chères

La faute dans un premier temps à la catastrophe nucléaire de Fukushima qui a conduit les autorités à mettre à l'arrêt l'ensemble des réacteurs nucléaires du pays. Le Japon est depuis obligé d'importer du gaz et du pétrole, facturés en dollars, pour faire tourner ses centrales thermiques et maintenir sa production électrique.

Cette explosion de la facture énergétique, qui pèse sur les comptes nationaux, a été accentuée par la baisse de la valeur du yen suite au plan de relance monétaire, pour venir à bout de la déflation, mis en place par la banque centrale japonaise (BoJ), sous l'impulsion de Shinzo Abe. Le yen a ainsi perdu 21% face au dollar et 26% face au yen en 2013. Résultat, les importations ont progressé de 3,6% en volume sur un an tout en prenant 10% en valeur.

>> Lire Nucléaire à l'arrêt et yen faible, le cocktail explosif du Japon

Les délocalisations passées mettent en péril les exportations futures

Mais la hausse des importations n'est pas la seule raison de ce déficit commercial chronique. Car dans le même temps, la faiblesse du yen n'a pas permis de relancer les exportations. Entre janvier et juin, elles n'ont progressé que de 3,2% en valeur, et ont même reculé de -0,2% en volume.

Les causes en sont profondes. Avec la hausse du yen ces vingt dernières années due à une politique monétaire déflationniste, et la concurrence croissante de leurs voisins, les entreprises japonaises ont délocalisé une partie de leur production dans d'autres pays d'Asie, d'où ils fabriquent aussi pour la clientèle nippone. En témoigne l'explosion de près de 30% des importations de semi-conducteurs, autrefois fabriqués dans l'archipel.

Une lueur d'espoir

La très forte hausse des importations durant les trois premiers mois de l'année est toutefois en partie attribuée à la hausse de la TVA au 1er avril dernier. Par ailleurs, en juin, "les importations hors énergie ont elles aussi augmenté, ce qui pourrait être un signe avancé d'un rebond de la demande intérieure", explique Kohei Iwahara, économiste chez Natixis, dans une note. Les importations de machines-outil à destination de l'industrie ont en effet progressé de 14,2% en rythme annuel en juin.

Enfin, l'autorité de sûreté nucléaire a récemment donné son aval pour le redémarrage à l'automne de deux des 48 réacteurs nucléaires de l'archipel. Si la tendance se poursuit, et si Shinzo Abe, pro-nucléaire, réussit à convaincre son opinion publique encore traumatisée par la catastrophe de Fukushima, les importations de gaz et de pétrole pourraient cesser de peser aussi lourd sur l'économie du pays.

>> Lire Japon : Feu vert à la réouverture d'une première centrale nucléaire

Commentaires 6
à écrit le 25/07/2014 à 0:40
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Le Japon parmi d'autres démontre que le fait d'être hors euro est de faire baisser sa monnaie n'est pas une solution comme tente de le faire croire le FN et Marine le Pen.

le 26/07/2014 à 9:50
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baisser la valeur d'une monnaie est une chose , mais comment faire si des entreprises nationales ont delocalisées ailleurs les productions ? , votre monnaie alors plus faible ne sert a rien , enfin si a rendre plus couteux les importations auquels vo...

à écrit le 24/07/2014 à 23:11
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Un yen faible qui devait avant tout doper les exportations japonaise; une cure de jouvence; nos vieux patriotes du FN au PS (qui constitue le gouvernement actuel ce qui fait du bruit rien que du bruitage) sont à la recherche de la même potion magique...

à écrit le 24/07/2014 à 22:10
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Le Japon est un pays de vieux. Un peu comme la France dans 10 ans...Bienvenu dans un monde de papies et de mamies.

à écrit le 24/07/2014 à 11:50
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Cher Monsieur Renier, d'après vous quels sont les objectifs et les fondements de la stratégie de M. Abe? L'objectif fondamental est de relocaliser de la production au Japon et de refaire du Japon une très grande puissanc industrielle et commerciale c...

à écrit le 24/07/2014 à 11:25
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La Tribune s'est faite spécialiste dans l'expression " euro, yen...faible"....Un euro achète ¥136, soit en parité de pouvoir d'achat un cours "normal" pour tout touriste européen visitant le Japon. Certains prix sont même si élevés qu'un cours de ¥ 1...

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