L'Espagne peine à rassurer les investisseurs

Le plan de rigueur espagnol peine à convaincre les investisseurs. Le coût de l'emprunt espagnol a bondi ce mercredi, lors d'une émission obligataire au cours de laquelle le Trésor a emprunté 2,6 milliards d'euros.
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Alors que le Portugal a passé avec succès le test des marchés et obtenu le déblocage d'une tranche de 5,17 milliards d'euros du FMI -après les éloges de Bruxelles sur la mise en oeuvre du plan de rigueur portugais-, l'Espagne s'est débattu. Après des semaines de détente sur les marchés alimentée par la manne de liquidités de la Banque centrale européenne (BCE), l'Espagne a dû concéder ce mercredi des taux en nette hausse lors de la première émission obligataire lancée après la présentation du budget 2012. L'émission d'obligations à 3, 4 et 8 ans a certes été accueillie par une demande robuste, quoiqu'en baisse, mais les taux ont flambé. L'échéance à 4 ans a notamment accusé une hausse d'un point par rapport à l?émission du 1er mars.

Madrid n'a levé que 2,589 milliards d'euros d'obligations à 3, 4 et 8 ans, soit le bas de la fourchette visée, dont le maximum que s?était fixé le gouvernement atteignait 3,5 milliards d'euros, selon le ministère de l'Economie espagnol. Le Trésor a placé 1,1 milliard d'euros d'obligations arrivant à échéance en 2015 à un rendement moyen de 2,89%, contre 2,44% lors d'une précédente opération de ce type mi-mars, mais en deçà des 3,1% attendus. Prudent, le Trésor avait profité des taux en forte baisse du premier trimestre pour prendre de l'avance sur son financement: il a déjà couvert 47% de son programme obligataire pour 2012, qui table sur 86 milliards d'euros bruts d'émissions à moyen et long terme.
L'offre a été sursouscrite 2,4 fois, contre 5 précédemment. Les papiers arrivant à échéance en 2016 on vu leurs rendements passer de 3,376% le 1e mars à 4,319% ce 4 avril. Quant aux titres à 8 ans, ils grimpent à 5,338% contre 5,156% le 15 septembre 2011.

CDS en hausse

Par ailleurs, le coût de l'assurance contre un défaut de l'Espagne a lui aussi grimpé. Les "credit default swaps" (CDS) à cinq ans sur la dette du pays bondissant de 20 points de base (pdb) sur la séance, à 457 pdb, d'après Markit, entraînant dans leur sillage les CDS italiens à cinq ans, en hausse de 25 pdb à 407 pdb. Dans le même temps, l'écart entre Espagne et Allemagne à 10 ans (spread) atteignait un plus haut depuis novembre à 392 points de base.

Les investisseurs ont ainsi marqué leurs doutes concernant la capacité du pays à résorber sa dette. Pour de nombreux analystes, le regain de tension laisse craindre une nouvelle étape agitée en zone euro. "L'Espagne revient au coeur de la tourmente", affirme Soledad Pellon, analyste de la maison de courtage IG Markets, pour qui l'émission est "un échec absolu", à l?AFP. "L'émission obligataire espagnole indique qu'il y a encore des risques en Europe, d'autant plus que nous nous dirigeons vers les élections en Grèce et en France", explique Michael Sneyd, analyste chez PNP Paribas.

Une sévère cure d'austérité qui arrive trop tard ?

Consciente de la tempête qui menace, l'Espagne, dont la dette publique devrait gonfler cette année à près de 80% du PIB selon les prévisions du gouvernement, se prépare à un effort de rigueur sans précédent. Elle devra réduire son déficit public de 8,5% du produit intérieur brut (PIB) en 2011 à 5,3% cette année, pour se conformer aux exigences de ses partenaires - et prêteurs - européens. Et le budget, d?une rigueur inédite, annoncé par le Premier ministre Mariano Rajoy vendredi prévoit plus de 27 milliards d?euros d?économies. Au programme : coupes budgétaires, visant principalement le fonctionnement des ministères, et hausses d'impôts. La cure d?austérité passera également par les régions, qui gèrent notamment la santé et l?éduction. Après avoir salé l?addition en affichant un déficit de 2,94 % du PIB espagnol en 2011, les 17 communautés autonomes ont pour objectif de respecter un déficit de 1,5 % du PIB en 2012.

"Ce n'est pas tant le contenu" du budget qui inquiète, souligne Soledad Pellon, "mais plutôt le retard dans sa mise en route ainsi que la méfiance que suscitent les régions". Malgré cette cure de rigueur inédite, l'Espagne aura du mal à redresser une économie plongée dans la récession, alors que sa dette publique devrait grimper de onze points, de 68,5% du PIB à la fin 2011 à 79,8% fin 2012. Ainsi, les 27,3 milliards que le gouvernement espère récupérer correspondent à peu de choses près à la seule somme engouffrée dans les intérêts de la dette, soit 28,8 milliards d'euros, ou encore au montant des indemnités chômage (28,5 milliards), dans un pays ou plus d?un jeune sur deux est sans emploi et alors que le gouvernement prévoit lui un taux global de 24,3% à la fin de l?année. Après une faible croissance, de 0,7%, en 2011, le gouvernement a prévu un recul du 1,7% du PIB sur l'ensemble de 2012, alors que l'économie est retombée en récession au premier trimestre 2012.

Commentaire 1
à écrit le 05/04/2012 à 8:32
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La situation se dégrade en Espagne comme un peu partout dans l'union européenne. La crise précipite les peuples dans une situation comme l'Argentine il y a un peu plus de dix ans. Des mouvements sociaux sont prévisibles. Le nombre de suicide se multi...

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