Neuf agriculteurs sur dix, soit 92% des bénéficiaires des soutiens de la Politique agricole commune (PAC), échappent cette année à l'obligation de publier la manne qu'ils touchent de l'Europe à la suite d'un arrêt de la justice européenne, a déploré ce mercredi le site internet www.farmsubsidy.org, mis en place par un groupe de journalistes et de programmateurs pour compiler ces données. Alors que ces dernières années, les noms de tous les bénéficiaires de la PAC étaient publiés par les Etats, seuls 22 milliards d'euros de paiements ont été rendus publics cette année, soit 45% du budget annuel de la PAC de 54 milliards d'euros, a déploré le site internet.
Atteinte au droit au respect de la vie privée
La raison: saisie par deux agriculteurs allemands, la Cour de justice européenne avait estimé en novembre 2010 que la publication de ces données constituait "une atteinte au droit des bénéficiaires concernés au respect de leur vie privée". En conséquence, cette année, la publication a été limitée aux seules personnes morales (sociétés du secteur agricole et agroalimentaire, interprofessions...). Farmsubsidy.org s'insurge dans un communiqué du fait que certains Etats avaient "recours à une définition très large des personnes physiques" pour échapper à l'obligation de transparence.
Chypre, Grèce et Luxembourg épargnés
Dans certains pays où la distinction entre personnes morales et physiques était difficile à établir, aucune donnée n'a été publiée, a reconnu le porte-parole de la Commission en charge des questions agricoles, Roger Waite, interrogé par l'AFP. Ainsi, Chypre, la Grèce ou le Luxembourg n'ont publié aucune donnée cette année. Toutefois, a relevé Roger Waite, "la plupart des grands bénéficiaires de la PAC sont des grandes sociétés".
Obligation de transparence fixée par la Cour des comptes
Faux rétorque le site, en citant l'exemple de 14 "mystérieux bénéficiaires" au Royaume-Uni dont les noms n'ont certes pas été révélés conformément à l'arrêt de la Cour, mais dont les autorités ont précisé qu'elles leur avaient versé entre plus d'un million d'euros, et jusqu'à 1,97 million dans un cas. Selon une source européenne, les services juridiques de la Commission examinent actuellement une réforme de la publication des données pour se conformer à l'arrêt de la Cour de justice sans pour autant manquer aux obligations de transparence fixées par une autre cour européenne: la Cour des comptes.
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