Two Pack, Six Pack, semestre européen : comprendre pourquoi Paris tremble devant Bruxelles

Alors que la France va négocier avec la Commission européenne un nouveau délai, voici un tour d'horizon des procédures qui régissent désormais la politique budgétaire des Etats membres de l'UE.
Le quartier européen de Bruxelles. La nouvelle architecture institutionnelle européenne rend difficile tout écart budgétaire.

Pour comprendre la difficulté dans laquelle se situe le nouveau gouvernement français actuellement face à la Commission européenne, il faut avant tout saisir la réalité et le sens de la nouvelle architecture institutionnelle européenne mise en place pendant la crise. Cette architecture a cinq volets qui s'entrecroisent, ce qui rend sa visibilité parfois complexe. Voici un tour d'horizon.

 

Le pacte de stabilité et de croissance

 

Le premier volet est le plus connu. C'est le pacte de stabilité et de croissance adopté lors du Conseil européen d'Amsterdam en juin 1997 . Il impose aux pays de la zone euro et aux autres pays de l'UE qui ont - rappelons-le - tous (à l'exception du Danemark et du Royaume-Uni) vocation à entrer dans la zone euro, des critères de convergence comme la limite du déficit public fixée à 3 % du PIB et celle de la dette publique brute à 60 % de la richesse nationale. Ce pacte prévoit également la possibilité de recommandations et de sanctions pour les pays qui sont hors des clous. Néanmoins, le pacte de stabilité et de croissance n'a guère été respecté au cours des dix premières années d'existence de la monnaie unique. Après les crises en Grèce, Irlande et Portugal, les dirigeants européens ont décidé de durcir son application.

 

Le semestre européen

 

Pour cela, un calendrier d'intégration des budgets européens au niveau européen a été mis en place en 2011. C'est le semestre européen. Concrètement, il s'agit de faire dialoguer la Commission, chargée du respect du pacte de stabilité et de croissance, et les Etats membres tout au long de leur processus d'élaboration budgétaire. Les prévisions économiques sont ainsi produites trois fois par an par la Commission qui, en janvier, une « Examen annuel de croissance » (EAC) pour les Etats membres. Cet EAC souligne les réformes et les efforts à effectuer. Il débouche sur l'établissement de priorités par le conseil européen, priorités qui sont ensuite transmises, en mars, aux Etats.

 

En avril, ces derniers doivent élaborer à partir de ces priorités, un « programme de stabilité » qui est ensuite transmis à la Commission. Laquelle, transmet en juin des recommandations pour chaque pays au conseil européen qui les adopte en juillet. Dès lors, les Etats doivent intégrer ces recommandations dans leurs projets budgétaires pour l'année suivante.

 

Le Six Pack

 

Pour renforcer l'application de ce semestre européen, la Commission a acquis de nouvelles armes avec deux « paquets législatifs » européens, appelés « six pack » et « two pack », adoptés en 2012 et 2013, qui, en s'insérant dans le semestre européen, le rende plus contraignant. Le Six Pack, accorde à la Commission la possibilité de demander des corrections aux projets des Etats membres. Dans ce cas, ces derniers doivent amender leurs projets et publier un « plan d'action correctif. » Il accorde également à la Commission  la possibilité de limiter la croissance des dépenses publiques des Etats pour éviter tout dérapage.

 

Mais l'essentiel du « Six Pack » tient dans l'aspect répressif. Désormais, la Commission peut lancer, après deux rappels, une procédure dite « d'application rigoureuse » contre un Etat. Dans ce cas, l'Etat doit verser une garantie portant intérêt qui peut aller jusqu'à 0,1 % du PIB. Si la Commission décide d'affliger une sanction à l'Etat concerné, alors ce dépôt est intégré à l'amende et n'est pas remboursé. Mais la grande nouveauté du Six-Pack, c'est que désormais, le Conseil européen doit suivre la décision de la Commission pour les sanctions, sauf à lui opposer une « majorité qualifiée inversée. » Or, cette majorité est très difficile à obtenir puisqu'elle suppose de réunir pas loin des quatre cinquièmes des voix pondérées. Autrement dit, un accord franco-allemand, comme en 2003 pour éviter les sanctions n'est plus possible.

 

Le Two Pack

 

Au Six Pack s'ajoute le Two Pack. Ce paquet législatif complète le semestre européen en exigeant des Etats membres qu'ils adoptent leur projet de budget de l'année suivante avant le 15 octobre. La Commission examine alors le projet et émet un avis avant le 30 novembre. Bruxelles peut alors demander des modifications à ce projet. Par ailleurs, le two pack oblige les Etats à se fonder sur des prévisions de croissance indépendantes et à soumettre son budget à un organisme indépendant de contrôle budgétaire (en France, le Haut Conseil des Finances publiques).

 

En cas de procédure de dépassement excessif, la Commission doit être constamment informés des mesures prises par l'Etat pour réduire son déficit. Elle peut, à tout moment, envoyer de nouvelles recommandations à l'Etat concerné. C'est un renforcement des mesures correctives prévues au Six Pack.

 

Le pacte budgétaire

 

Dernière pierre à l'édifice : le pacte budgétaire inclus dans le Traité sur la stabilité, la gouvernance et la coopération (TSCG). Ce pacte prévoit que les Etats de l'UE doivent disposer de budgets équilibrés. L'équilibre budgétaire signifie que le déficit structurel - nettoyé donc des effets de la conjoncture économique - ne doit pas dépasser 0,5 % du PIB. Cette « règle d'or » européenne devra devenir réalité en 2018. En cas de non respect de cette règle, la Commission pourra sanctionner le pays concerné à hauteur de 0,1 % du PIB. Là aussi, seule une « majorité qualifiée inversée » pourra bloquer une telle décision. Mais même alors, un Etat membre pourra porter l'affaire devant la Cour de Justice de l'UE qui pourra, en cas de manquement au traité, infliger la même sanction.

 

Limiter l'autonomie budgétaire des Etats

 

L'esprit de ces réformes est clair : il s'agit de limiter le plus possible l'autonomie budgétaire des Etats. Certes, en théorie, nul ne peut contraindre directement un parlement à voter un budget qui accroit son déficit et ne respecte pas les recommandations de la Commission ou le pacte budgétaire. Mais désormais, un tel comportement est un revers infligé à la volonté du conseil européen, donc à la solidarité européenne. Et à ce titre, elle se paie directement par des sanctions quasi-automatiques. Les Etats sont donc contraints désormais de négocier avec Bruxelles et de suivre ses recommandations. La marge de manœuvre des Etats membres est très réduite.

 

Le budget avant tout

 

Deuxième élément : cette architecture est centrée sur la question du déficit. Même si les Etats membres doivent également publier des objectifs macro-économiques plus vastes, c'est sur la question de la consolidation budgétaire au niveau national qu'est centrée l'action de l'Europe. Chaque Etat doit « faire ses devoirs », comme on dit en Allemagne et ne dispose pas d'éléments de solidarité ou d'aides à la croissance pour y parvenir. La solidarité n'intervient que de façon conditionnelle en cas de crise grave, notamment d'absence d'accès aux marchés pour se financer par le Mécanisme européen de Stabilité (MES), qui, par son traité fondateur, doit imposer, en retour, des « plans d'ajustement. » Le sentiment qui ressort de cette nouvelle architecture, c'est bien que l'UE demeure dans une vision très unilatérale des problèmes économiques.

Commentaires 43
à écrit le 05/07/2015 à 13:23
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on paie là en france 40 ans de deficit à 50 milliards , il est facile de condamner bruxelles mais la frane n'a qu'à s'en prendre qu'à elle-même comme un enfant qui pendant 40 ans fait des bêtises ;papa bruxelles est là avec son martinet

à écrit le 10/04/2014 à 2:23
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Qu'on mette fin à ce cirque de monnaie unique pour des économiques aussi différentes. A quoi sert d'importer à moindre frais si on fusille du même coup nos exportations ? Quel est ce soit disant "partenariat" qui donne lieu à une guerre des salai...

à écrit le 09/04/2014 à 0:36
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On parle de l'Europe, n'oublions pas les municipales: le peuple français a soufflé dans son six coup, fait tombé un premier ministre malgré des triangulaires, donc LuckyLucke pourrait chanter i'm a poor lonesome cowboy... avant la prochaine: rendez-...

à écrit le 09/04/2014 à 0:10
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N'allons pas plus vite que la musique, pour l'instant on est dans les européennes... on y fait pas toujours dans les garçonnes... à la française!

à écrit le 08/04/2014 à 23:56
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Si on tient compte de la dévalorisation des résultats de la droite aux municipales, par exemple à Toulouse 31 prévus contre 38 réalisés, et un nombre de villes historiques 162 contre 100 qui était déjà une forte sanction, que penser des sondages aux ...

à écrit le 08/04/2014 à 13:32
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l'Europe d'inspiration US au service de l'économie US et des multinationales américaines, l'Europe crée pour ouvrir le marché euro atlantique à venir -TAFTA- et donc piller l'économie européenne mais aussi...française, l'Europe crée pour limiter ...

à écrit le 08/04/2014 à 12:25
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On applaudit l'Europe du chômage, surtout les jeunes, de la non croissance sauf celle des dettes qui conduisent à l'austérité. A quoi ça sert d'envoyer des gens dans des écoles s'il n'y a pas de travail ni de logement ensuite? Prenons l'exemple de l'...

à écrit le 08/04/2014 à 10:34
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curieuse mentalité que la sanction d'un état , état souverain donc ses membres sont élus par le peuple , donc on peut sanctionner un état parce que son peuple a voté pour des rigolos ? donc par ricochet c'est le peuple qui payera la facture d'un orga...

à écrit le 07/04/2014 à 14:52
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La commission européenne a un poids exorbitant, pour un organisme qui ne tire sa légitimité de rien, par ailleurs noyautée par un tas de lobbies cachés... C'est un gros gros problème !

à écrit le 07/04/2014 à 14:23
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C'est désormais clair : l'UE est une dictature totalitaire en devenir. Une URSS de l'ouest...

à écrit le 07/04/2014 à 11:05
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En clair, l'Europe va nous demander d'arrêter le gaspillage ! Est-ce dramatique ?

à écrit le 07/04/2014 à 9:57
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Tout cela a été murement réfléchi et concerté,on ne doit pas faire de l'hombre au suzerain.<<En politique, rien n'arrive par hasard. Chaque fois qu'un événement survient, on peut être certain qu'il avait été prévu pour se dérouler ainsi>>.Franklin De...

à écrit le 07/04/2014 à 9:45
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En mai je vote pour qu'on en finisse avec ces technocrates qui se prennent pour le maîtres de l'Europe. Des millions d'Anglais, Allemands, Italiens et Français feront de même. La fête bruxelloise est finie!

à écrit le 07/04/2014 à 9:41
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Sortons de cette Europe qui nous conduit à la ruine et empêche tout redressement économique.

à écrit le 06/04/2014 à 21:29
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Nos politiciens sont des pantins. Le pire, c'est qu'ils sont responsables à 100 % de cette situation. Comment ont-ils pu transférer tous ces pouvoirs hors de nos frontières ? Plus de souveraineté monétaire, plus de souveraineté budgétaire: des pantin...

à écrit le 06/04/2014 à 21:19
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nous sommes emprisonnés dans ces traités européens stupides et condamnés à souffrir de l'austérité

à écrit le 06/04/2014 à 20:51
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Il faut que nous partions de l'Europe. En quoi des technocrates donnent des ordres à des chefs d'états. Hollande a été élu démocratiquement!

le 07/04/2014 à 3:27
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Si les citoyens de ce pays sont pas aidés!

à écrit le 06/04/2014 à 18:48
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Moi je propose de faire passer le budget européen de 20 à zéro euro en 2015. C'est à peu près ce qui nous manque pour tenir dans les critères de Maastricht (nous ne recevons que 7 sur les 20 et un sevrage de subventions ne nous ferait pas de mal).

à écrit le 06/04/2014 à 18:44
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...Il faut vite sortir de cette Europe, ce que ne manquera pas de marteler le FN et en ce sens , il a raison. Ce n'est pas de cette Europe, ultra-libérale dont les peuples ont besoin.

à écrit le 06/04/2014 à 18:44
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Les français demandent des baisses d'impôts, on tire sur les classes moyennes, confer le QF alors que les riches s'évadent, des mesures fortes pour l'emploi, on fait du chômage, on se trompe de cible... et des baisses de dépenses alors qu'on gaspille...

à écrit le 06/04/2014 à 18:42
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Parce que nos politiques n'ont rien dans le ventre. La question est quand cette construction européenne va-t-elle explosée ?

à écrit le 06/04/2014 à 17:40
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Mais qu'est ce qui attende pour nous expulser de cette Europe? On ne la mérite vraiment pas!

le 06/04/2014 à 17:46
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Pas si simple .... la France .... les Français .... on une dette colossale en euro ! Angela ne fera pas de cadeaux !

le 06/04/2014 à 17:51
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à votre avis pourquoi la Grèce n'a pas quittée la zone euro .... tout simplement pour payer ses dettes ! Angela n'est pas folle sur ce sujet !... donc idem pour la France !!!!!!!!!!!!!

le 06/04/2014 à 17:55
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"Mais qu'est ce qui attende pour nous expulser de cette Europe? On ne la mérite vraiment pas! ".... tout simplement que l'on rembourse nos dettes !!!!!!!!!

le 07/04/2014 à 11:05
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Si la France ne paye pas ses dettes, les premieres victimes seront les Francais. Ce n'est pas comme si on allait pouvoir retrouver ensuite des creanciers pour financer nos depenses courantes. Il va falloir etre direct a l'equilibre budgetaire, alors ...

à écrit le 06/04/2014 à 17:35
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La France est menér par des "traitres" ou des maso? Ils veulent nous mener dans un monde meilleur ou dans une idéologie utopique? Le communisme avait déjà ce genre de folie!

le 06/04/2014 à 17:58
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des profiteurs tout simplement ! droite gauche verts ... FN etc ....

à écrit le 06/04/2014 à 17:34
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Un truc simple ....Interdire toutes fonctions d' état à des gens issu du publique droite ou gauche !

à écrit le 06/04/2014 à 17:31
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C'est plus facile de dépenser l'argent des autres (celui que l'on a pas) que de gérer correctement ne serait-ce qu'un tout petit budget ... Au moins on est certain : ce sera la faute à l'Europe En France quand on n'a pas de résultats c'est toujours...

à écrit le 06/04/2014 à 17:27
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pour faire simple .... on va dans le mur en TGV payé à crédit !

à écrit le 06/04/2014 à 17:15
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non parce qu'en France, on ne fait que cela. Et on peut mentir en allemand si c'est nécessaire. Homme ou femme, nos politiciens mentent dès le brevet dès la maternelle. Christine Lagarde, menteuse polyglotte ou Michel Sapin, menteur invétéré, il se m...

à écrit le 06/04/2014 à 17:12
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Il faut savoir ce que l'on veut, quand l'UE est laxiste on la critique comme pour la Grèce etc. Quand c'est trop rigide cà ne va pas non plus, et quand il n'y a pas d'UE c'est encore pire comme on l'a connu et comme l'Ukraine est un exemple parmi d'a...

à écrit le 06/04/2014 à 17:11
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Qu'elle a été la variation de la contribution française au budget de l'UE ces trois dernières années ? J'aimerais savoir si les économies s'appliquent à tout le monde ? Malheureusement je me doute de la réponse, bref ces donneurs de leçons sont à vom...

à écrit le 06/04/2014 à 17:06
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J'crois ksé clair ! Nos parasites en chefs qui se succèdent depuis des "siècles" vont ENFIN devoir se résoudre a se suicider. Ils ne vont enfin plus pouvoir continuer a nous envoyer dans le décor. Mais ils vont se débattre les bougres, et tenter de t...

à écrit le 06/04/2014 à 17:01
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Une Stratégie ,des points de passages ,des comptes rendu ,des engagements vérifie Mais c est insupportable pour nos énarques spécialiste des promesses non tenue et des reports éternels de leur engagement

le 06/04/2014 à 17:08
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Ils s'en foutent, c'est jamais eux qui paient la facture...

à écrit le 06/04/2014 à 16:56
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Excellent récapitulatif des cordes au coup démentielles que nos oligarchies europhiles contrôlées par les puissance de l'argent nous ont mises.

le 06/04/2014 à 17:16
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Les mêmes disaient la même chose lors de la crise Grècque c'était aussi les europhiles ! Il faudrait savoir si on veut être une Europe forte et cohérente ou des tribus qui s'entredéchirent au profit des plus importants voisins.

le 07/04/2014 à 8:54
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Il vaut mieux être un tribus forte comme la plupart des grandes nations de ce monde, plutôt qu'une sois disant "union" faible. comme c'est le cas depuis plus de 30 ans avec l'UE. D'ailleurs, a force d'affaiblir ces tribus par l’austérité, je ne vo...

à écrit le 06/04/2014 à 16:46
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A en lire cet article, on en viendrait à croire que l'UE est une banque avant d'être une "union" avant tout... A mais c'est bien ça en effet !

le 06/04/2014 à 17:18
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Si c'était une banque plusieurs pays auraient été éjectés comme mauvais clients et l'Europe n'existerait plus. Poutine aimerait bien, çà lui faciliterait ses invasions et courses.

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