Beppe Grillo impose à son mouvement l'alliance avec Nigel Farage

Le blogueur et humoriste italien a obtenu de ses militants le feu vert pour entrer dans le groupe du UKIP. Un tournant à droite risqué et qui ne règle guère les problèmes de Nigel Farage pour constituer un groupe.
Beppe Grillo, leader du Mouvement 5 Etoiles italien, se rallie à Nigel Farage

C'est donc décidé : les élus du Mouvement 5 Etoiles (M5S) du comique italien Beppe Grillo rejoindront le groupe Europe de la Liberté et de la Démocratie (EFD) au parlement européen. Ce groupe, c'est celui des Eurosceptiques britanniques du UKIP. La décision a été prise après une consultation par Internet, un des modes de fonctionnement désormais traditionnel du mouvement de Beppe Grillo, qui a donné 78 % de votes en faveur de cette option.

Décision contestée

Reste que cette décision est extrêmement contestée au sein du mouvement lui-même. Beppe Grillo avait entamé avec le leader du UKIP Nigel Farage des négociations le 28 mai et il ne cachait pas son choix en faveur d'EFD. Mais le M5S est un mouvement hétéroclite, regroupant des militants et des électeurs venant non seulement de la droite (Ligue du nord ou parti berlusconien), mais aussi de la gauche et des abstentionnistes. Les politologues considèrent souvent que ces trois tendances représentent environ un tiers chacune de l'électorat grilliste. Le choix d'EFD, groupe ouvertement conservateur sur le plan social et très marqué par sa critique de l'immigration, est donc loin de faire l'unanimité au sein du M5S. Certains demandaient donc qu'on ouvre aussi des discussions avec les Verts.

Vote dirigé

Beppe Grillo ne l'a pas entendu de cette oreille. Il a pris pour prétexte les hésitations le concernant des Verts européens, redoutant son discours très eurosceptique, pour exclure cette possibilité du choix sur Internet. Pourtant, les Verts avaient fini par donner un accord de principe à l'adhésion du M5S. Mais le tout-puissant leader du mouvement a pris ombrage (ou a feint de prendre ombrage) de ce retard. Les militants ne pouvaient donc choisir qu'entre EFD, le groupe ECR des Tories britanniques et les non-inscrits. Par ailleurs, les textes d'explication sur le blog de Beppe Grillo (qui est une sorte de site du mouvement), donnaient clairement un avantage à EFD sur les deux autres options, jugés peu convaincantes. Le choix était donc relativement « dirigé » et cela déplaît beaucoup au sein du mouvement.

Un tournant à droite risqué pour Beppe Grillo ?

Avec cette décision, Beppe Grillo entame donc un tournant à droite qui fait déjà grincer beaucoup de dents. Déjà, après le succès des élections générales de 2013, où le parti avait raflé à la surprise générale 25 % des voix, plusieurs élus s'étaient plaints de la tendance « autoritaire » de Beppe Grillo et de son « gourou », Gianroberto Casaleggio. Le choix d'EFD devrait encore renforcer les tensions. Du reste, le vote sur Internet est un demi-succès : sur 80.000 ayant droit, seulement 29.000 ont voté (dont 26.000 en faveur d'EFD). Le risque est évidemment qu'une partie de l'électorat du M5S, tenté par un vote en faveur d'un mouvement neuf et participatif, se détourne de lui.

Lors des élections européennes, le mouvement avait obtenu un bon score, 21,6 % des voix et 17 députés, mais il avait déçu ses dirigeants qui s'attendaient à plus de 25 %. Reste qu'il avait confirmé son statut de deuxième force politique du pays, et de principal opposant aux politiques d'austérité. Mais, jusqu'ici, Beppe Grillo, avait soigneusement évité de prendre parti entre la droite et la gauche. Désormais, son alliance avec Nigel Farage, habitué des discours enflammés contre les immigrés, ne lui permettra plus d'avancer masqué.

Défections au sein d'EFD…

Cette adhésion à EFD n'est cependant pas définitive, car ce groupe est encore loin d'être assuré de pouvoir exister. Rappelons qu'il faut pour constituer un groupe politique disposer d'élus issus d'au moins 7 pays membres. Si l'adhésion du M5S permet de compenser la défection de la Ligue du Nord en faveur de l'hypothétique « groupe Le Pen », EFD a subi la défection de deux partis nordiques, les Populaires danois et les Vrais finlandais, qui, soucieux de leur réputation, ont préféré s'inscrire au groupe des conservateurs britanniques, l'ECR. Les Grecs indépendants, les eurosceptiques de droite helléniques, ont également préféré s'inscrire à ECR. Certes, Nigel Farage a réussi à convaincre le petit parti tchèque Svobodni de le rejoindre et a finalement convaincu les Lituaniens d'Ordre et Justice, un temps tentés par le FN, de rester à EFD. Mais, actuellement, EFD ne compte officiellement que des partis issus de 5 pays. Et encore ignore-t-on si le parti religieux néerlandais, SGP, demeurera à EFD ou rejoindra aussi ECR.

Où trouver des élus de sept pays ?

Nigel Farage peut certes espérer « polir » un peu l'image de son groupe avec l'arrivée de Beppe Grillo. Mais quelles sont désormais ses alternatives pour rallier deux partis de deux pays différents ? Les Démocrates suédois, après avoir refusé de rejoindre le FN, hésitent à s'inscrire à EFD. Ils auraient voulu figurer dans le même groupe que les Populaires danois, mais ECR n'a pas voulu d'eux. Nigel Farage devra les convaincre de ne pas demeurer non-inscrits. Mais ce sera, cette fois, accueillir un parti franchement à droite. Surtout, il manquera encore un pays pour former un groupe. EFD a, alors, peu d'alternatives. Peut-il accepter l'excentrique parti polonais de la KNP, également courtisé par le FN ? Ce serait un risque, car ce parti est réellement incontrôlable, mais UKIP peut difficilement se payer le luxe de finir dans les non-inscrits. Peut-il débaucher des alliés solides de Marine Le Pen ? Mais lesquels ? Le PVV néerlandais ne sera pas utile si le SGP reste à EFD (et si le PVV se rallie, SGP ne restera pas), la FPÖ autrichienne est infréquentable pour le UKIP, la Ligue du Nord est désormais inutile… Reste l'option qui avait permis la constitution d'un groupe en 2009, débaucher un élu individuel d'un septième pays. On le voit, Beppe Grillo s'est rallié à un groupe encore fantôme.

 

Commentaires 5
à écrit le 16/06/2014 à 10:05
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BRUXELLES EST UN AGLOMERERA DIOLOGIE DIFERENTE ?ILS NE SERAS JAMAIS FACILE A CE GOUVERNEMENT FANTOCHE DE S ENTENDRE SANS SE RETRUSTURE SUR DES BASSES ET IDEES COMMUNE BONNE POUR TOUS LES EUROPEENS???

à écrit le 13/06/2014 à 15:26
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Ces alliances n'ont aucune portée. Nous avons des groupes issus de la problématique nationale qui se retrouvent obligés de s'allier avec d'autres dont ils ne connaissent rien. Le circus de Bruxelles le le leur impose de manière scandaleuse pour avoir...

le 13/06/2014 à 15:55
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+1 C'est vrai que cette obligation imposée arbitrairement a porsteriori n'a été conçue que pour faire barrage aux partis opposés à la machine à broyer les peuples de Bruxelles (il serait absurde de parler de partis anti-européens car ce sont au contr...

à écrit le 13/06/2014 à 13:04
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Maintenant que l'on sait que les "verts" préfèrent Junker il est parfaitement clair qu'ils se tiennent du côté de la droite européenne bancaire et corporatiste, rien d'étonnant à ça au fond.

le 13/06/2014 à 17:55
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Affirmatif !!!!!!!! Surtout en ayant des gars comme con bendit. (je prèfère me taire)

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