Un plan de relance allemand est-il possible  ?

Selon Die Zeit de ce jeudi, le gouvernement d'Angela Merkel préparerait un plan de relance. Mais il s'agira surtout d'une réaction à une situation allemande qui pourrait profiter de façon réduite au reste de l'Europe.
L'Allemagne prépare-t-elle un plan de relance ?

Selon l'hebdomadaire Die Zeit de ce jeudi, le gouvernement fédéral allemand préparerait un plan de relance « au cas où » la conjoncture viendrait à se détériorer. Ce plan de relance allemand n'est encore que fantomatique, il a même été formellement démenti dès mercredi par le ministère fédéral des Finances. Mais la presse allemande étant souvent bien informée, cette information pourrait préparer le terrain à une action future. Un plan de relance allemand signifierait-il pour autant un succès de la pression exercée par François Hollande et Matteo Renzi, qui, depuis des semaines, appellent à une impulsion en provenance de la demande allemande ? Serait-elle même favorable à ces deux dirigeants ? Rien n'est moins sûr...

Une réaction allemande à une situation allemande

Car si l'Allemagne agit, c'est que l'Allemagne en aura besoin. Ceci peut sembler une tautologie, mais il s'agit de rappeler que le plan de relance sera déterminé non pas par des exigences européennes, mais par une situation nationale. Et son usage sera strictement national. C'est bien, du reste, parce que la situation conjoncturelle en Allemagne se dégrade que l'information de Die Zeit a pu paraître. Certes, on pouvait attribuer la chute du PIB de 0,2 % du deuxième trimestre à une correction de l'excellent premier trimestre (+ 0,8 %), dû notamment à la construction. Mais en réalité, un ralentissement de plus en plus prononcé semble se dessiner outre-Rhin. L'institut DIW annonce une nouvelle contraction du PIB au troisième trimestre, et donc l'entrée en récession « technique. » L'indice Ifo de la confiance des entrepreneurs ne cesse de chuter. Les 2 % de croissance pour 2014 un temps espérés semblent désormais inatteignables et les enquêtes sur le moral des ménages, comme les derniers chiffres des ventes au détail, ne cessent d'être inquiétantes. Le moteur des exportations n'est plus assez puissant et la demande intérieure patine.

Logique politique interne

Pour le gouvernement de Berlin, il faut empêcher une dégradation incontrôlable de la conjoncture afin, précisément, de pouvoir maintenir ses objectifs budgétaires. Or le gouvernement ne peut guère agir sur la demande externe, elle ne peut que stimuler la demande interne. D'où la préparation possible du plan de relance. Mais il convient d'emblée de noter avec attention que ce plan n'est pas le fruit d'une stratégie européenne comme vont essayer de nous le faire accroire les dirigeants sociaux-démocrates. C'est d'abord une réaction allemande à une situation allemande. Quant à sa décision et sa nature, elle fera l'objet d'arbitrages au sein du gouvernement allemand, sous la pression notamment du très orthodoxe Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances, qui ne veut pas échouer dans son ambition d'équilibrer le budget fédéral comme son prédécesseur, le Social-démocrate Peer Steinbrück, qui avait dû oublier ce même rêve en 2008-2009. Tout ceci pour rappeler que ce plan ne sera qu'allemand, adapté aux besoins de l'économie allemande. Et que ces derniers ne sont pas forcément ceux des autres économies européennes.

Une relance contre l'austérité ?

Sans doute, du reste, cette relance ne se fera pas sans contreparties de la part des pays du sud. En mettant en place un plan de relance, Berlin cloue le bec de ses contradicteurs. Ni Matteo Renzi, ni François Hollande ne pourront plus se dispenser de remplir leurs objectifs budgétaires ou de réformes structurelles au nom de « l'égoïsme allemand. » L'Allemagne agit, la France et l'Italie vont donc devoir suivre. D'où cette apparente contradiction : d'un côté, un discours européen de l'Allemagne qui se durcit et de l'autre, l'annonce de ce plan. Mais la contradiction n'est qu'apparente. Désormais, au nom même de l'effort allemand, l'exigence de l'effort sera plus vigoureuse en France et en Italie.

Les avantages pour l'Allemagne

C'est un mouvement stratégique subtil. D'abord, politiquement, Angela Merkel peut prouver aux électeurs tentés par les eurosceptiques (qui ont obtenu 10 % aux dernières élections régionales de Saxe dimanche) qu'elle ne cède pas devant l'Europe et, au contraire, qu'elle soigne les intérêts allemands. Mais l'Allemagne espère aussi, grâce à cette double avancée pouvoir gagner sur les deux terrains. D'un côté, éviter la récession en stimulant sa demande. De l'autre éviter le corollaire de ce type de politique : une perte relative de compétitivité. En réduisant les coûts du travail chez ses principaux fournisseurs européens, elle s'assure en effet un matelas de sécurité pour sauvegarder les marges de ses entreprises et leur compétitivité coût. Sans compter que si une vraie politique d'austérité est mise en place en France et en Italie, les entreprises de ces pays, soumis à des difficultés sur leurs marchés domestiques ne seront guère des concurrents sérieux pour l'Allemagne...

France et Italie gagnantes ? Pas si sûr

Même s'il faudra examiner en détail ce futur plan, son ampleur et sa destination, il n'est donc pas certain que la France et l'Italie pourront profiter réellement de ce plan de relance allemand. L'exemple des dernières années montrent que la république fédérale, même lorsqu'elle croît grâce à sa demande intérieure, est une bien piètre locomotive pour l'Europe. La progression continue de la consommation allemande depuis 2010 n'a ainsi eu que fort peu d'impact sur les exportations françaises et italiennes, mais aussi sur celles des pays périphériques. Une relance de l'investissement allemand pourrait aider, mais pas dans des proportions capables de compenser les effets d'une politique d'austérité visant à réduire les salaires et les dépenses publiques de façon drastiques. Or, le ton allemand vis-à-vis de la France et de l'Italie n'est pas celui de la conciliation. Bref, les deux leaders de centre-gauche pourraient bien être les dindons d'une farce qu'ils ont eux-mêmes contribué à monter...

Commentaires 3
à écrit le 05/09/2014 à 11:48
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A force d'acheter "français" , embourbé dans notre chauvinisme partisan, nous ne distinguerons plus du tout la suprématie étrangère dans tous les domaines! Nous sommes le "mauvais élève" de la classe! Engoncé dans notre mauvaise foi avérée......

à écrit le 05/09/2014 à 11:40
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Mais, POURQUOI l'Allemagne, qui a consenti aux sacrifices les plus douloureux, nous assisterait elle, nous, qui n'exerçons que laxisme, démagogie et lâcheté politique ?????? POURQUOI.........

à écrit le 05/09/2014 à 9:54
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N'attendons pas l'action des gouvernements. Concrètement, achetons francais . Les produits ont le meilleur rapport qualité prix : elgydium, camif, habitat, l'arbre vert, le slip français, archos, vigor....

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