Pourquoi les Eurosceptiques allemands ont le vent en poupe

Alternative für Deutschland semble en passe de s'imposer dans le paysage politique allemand. Un phénomène qui pourrait être durable.
Les Eurosceptiques ont réalisé d'excellents scores au cours des trois dernières élections régionales allemandes.

Les trois élections régionales qui se sont déroulées ces deux dernières semaines en Allemagne peuvent se résumer en un seul événement : la percée des Eurosceptiques d'Alternative für Deutschland (AfD). Après avoir frôlé les 10 % en Saxe le 7 septembre, ce parti a franchi nettement cette barre lors du scrutin en Brandebourg (12,2 %) et en Thuringe (10,6 %) ce dimanche. Au niveau national, la cote d'AfD ne cesse de grimper. Après avoir frôlé en septembre dernier, pour leurs premières élections fédérales, la barre des 5 % nécessaires à l'entrée au Bundestag, les Eurosceptiques pourraient, selon plusieurs enquêtes d'opinion, séduire de 6 % à 7 % des électeurs dans toute l'Allemagne. Mais les sondages avaient, lors des trois scrutins de septembre, largement sous-estimé le score d'AfD.

Electorat mouvant

Certes, il est vrai que, depuis 2005, une partie de l'électorat allemand semble perdu. D'où le phénomène de poussée de certains partis. Les Libéraux en avaient profité en 2009 en réalisant un score historique de 14,9 % des voix lors des élections fédérales. Puis, déçus, leurs électeurs les avaient subitement abandonnés massivement pour se replier vers les Verts ou vers les Pirates, avant de trouver refuge à AfD. Le parti eurosceptique qui a récupéré, selon les sondages, une grande partie de l'électorat libéral, s'appuie donc sur une base électorale mouvante. Il est vrai aussi que les trois Länder qui ont voté ce dimanche sont peu peuplés. Ce sont des régions de l'ex-RDA, donc avec des spécificités locales fortes.

Il faudra donc encore avoir des preuves supplémentaires pour pouvoir juger de l'ancrage durable d'AfD dans le paysage politique allemand. Mais il n'empêche, le phénomène prend de l'ampleur. Car les Eurosceptiques ont réussi un pari a priori impossible : rallier les anciens électeurs libéraux et les anciens électeurs du parti de Gauche. En s'appuyant sur un discours anti-européen.

Un discours qui prend à droite...

La crise de l'euro a radicalisé l'électorat libéral. Attaché à la responsabilité, il répugne à accepter l'évolution actuelle de la zone euro qui, selon eux, revient à faire prendre aux Allemands des risques pour des pays qui « vivent au-dessus de leur moyen » et n'assument pas leurs responsabilité. Le soutien du parti libéral FDP à la politique d'Angela Merkel de 2010 à 2013, notamment aux plans de sauvetage des pays périphériques et à la politique de la BCE, a perdu ce parti qui désormais est en voie de disparition (dimanche, il n'a pas dépassé 3 % des voix). Son électorat s'est naturellement reporté vers l'AfD qui tient un discours de fermeté vis-à-vis des « mauvais élèves » de la zone euro et refuse toute dérive vers « l'union des transferts. »

... et à gauche

Parallèlement, le discours du « refus de payer pour les autres » d'AfD a pris racine dans une partie de l'électorat traditionnel de Die Linke, le parti de Gauche qui a fédéré les mécontents de la SPD et les partisans de l'ancien parti dominant de la RDA. Car, dans une Allemagne qui n'est pas le paradis décrit par les idéologues en France, il existe un revers au plein emploi. Les réformes Hartz menés en 2003 et 2005 par Gerhard Schröder ont surtout permis de réduire le coût du travail dans les services, ce qui a permis de réduire les charges des entreprises industrielles clientes de ces services. Mais le revers a été une précarisation croissante dans ce secteur, avec notamment un fort développement du travail partiel et une réduction des protections salariales, notamment les accords salariaux de branche. L'ex-RDA, moins industrialisée que l'ouest, a été particulièrement frappée par ce phénomène. C'est sur ce terreau qu'AfD prospère désormais en avançant que le fruit des efforts des Allemands ne devaient pas être dispersés pour payer l'indolence des Grecs ou des Français. Et, sans surprise, ceux qui, en Allemagne, ont été les victimes des « réformes » ne peuvent qu'adhérer. Les transferts de vote de Die Linke vers AfD sont donc extrêmement importants. Aussi a-t-on vu la semaine dernière une scène cocasse : le chef d'AfD, Bernd Lucke, économiste ordolibéral par excellence, vantant certains aspects de l'ancienne RDA...

Raz-le-bol

La poussée d'AfD en Allemagne correspond nettement à un « raz-le-bol » : celui que les Allemands devront payer indéfiniment pour des pays incapables d'adopter la «culture de stabilité » allemande. Angela Merkel a sa part de responsabilité dans cette situation puisqu'elle a entretenu ce mythe que l'on pouvait faire de l'Allemagne un modèle pour le reste du continent. Wolfgang Schäuble l'a encore indiqué la semaine dernière devant le Bundestag. Les électeurs d'AfD prennent acte de l'échec de la chancelière sur ce terrain. Comment ne le feraient-ils pas alors qu'ils voient la zone euro s'enfoncer dans une inflation faible qui rend ridicule et nocive les objectifs de déficits des pays périphériques, alors qu'ils voient la BCE actionner une planche à billet que l'on craint plus que le Diable en Allemagne, qu'enfin ils voient la fracture entre nord et sud du continent se creuser ?

Terreau fertile

AfD a donc de beaux jours devant lui. Il peut continuer à fleurir sur les difficultés budgétaires ou économiques des pays du sud du continent, sur la politique de « mutualisation cachée des dettes » de la BCE ou sur les usines à gaz qui organisent la « solidarité » européenne comme le Mécanisme européen de stabilité ou l'union bancaire. Sans doute la politique agressive de la BCE contre Berlin a-t-elle encore alimenté ce vote eurosceptique. Le futur plan Juncker avec son projet d'augmenter le capital de la BEI est une belle opportunité encore pour le discours eurosceptique. D'autant que, en politique intérieure, comme l'a prouvé la semaine dernière le projet de budget fédéral de Wolfgang Schäuble, l'heure n'est pas à la détente et à l'investissement. Bref, tout se passe comme si AfD pourrait bien devenir un vrai problème pour Angela Merkel.

Commentaires 29
à écrit le 16/09/2014 à 14:20
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George: reveillez vous !!! les produits finis « made in Germany » que vous achetez au Carrefour ou chez LIDL ne jouent qu un role marginal pour l économie francaise et allemande Voyez plutot l impact et l importance des produits de bas...

le 18/09/2014 à 9:35
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mon cher papa je pense que vs n avez pas lu tout comme les politiques vs prenez seulement un paragraphe comme je le dis les allemands n ont pas comme nous laisser tomber leur industrie il y a 30 ans . les chiffres sont les suivants exportation...

à écrit le 16/09/2014 à 10:36
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c est vrai l allemagne a raison nous nous attendons depuis 40 ans que les reformes se fassent ( on peut ne plus avoir de deficit sans toucher aux salaires ni aux retraites ) mais pour cela il faut du courage et nos politicar ne pensent qu a se faire...

à écrit le 15/09/2014 à 16:55
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On fait dans les partis pirates, de mieux en mieux! On pille la population et on s'en met plein les poches. Ainsi on se subventionne et on paye les agriculteurs 1750 net pour 60h et nous on bulle à faire des papiers... et on trouve des ingénieurs à 2...

à écrit le 15/09/2014 à 16:38
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Chacun pour soi et dieu pour tous. L'Allemagne joue cavalier seul. Elle oublie qu'il y a 10 ans ELLE était l'homme malade de l'Europe. Et qu'elle a fait des efforts importants certes mais à un moment où la BCE ne remontait pas ses taux alors que l'eu...

à écrit le 15/09/2014 à 15:19
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Le succès allemand rend jaloux ! Pas beau ça...

à écrit le 15/09/2014 à 15:06
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Le Parti " AfD" est le baby d un groupe d´economismes, professeurs de fac, chefs d entreprises connus. Ce n est pas un parti populaire lancé par des populistes á la sauce Marinière. Ce sont des gens qu on a vu regulierement sur les podi...

à écrit le 15/09/2014 à 14:27
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Dire que ce parti cartonne, c'est beaucoup dire... Il se développe dans les Länder les plus reculés d'Allemagne... Normal, vu ses électeurs.

à écrit le 15/09/2014 à 13:44
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C'est admirable qu'il existe en Allemagne, le pays qui donne les cartes en Europe, un parti eurosceptique et pas en France, l'ex-"2ème locomotive de l'Europe" ! en France on ne fait que râler, râler et râler, c'est notre sport national depuis toujour...

le 15/09/2014 à 14:25
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vous avez raison ! en France, on s'écoute râler, pour pour faire quelque chose concrètement, il n'y a PERSONNE! les Français son décevants, désespérants! TANT PIS POUR EUX !

le 15/09/2014 à 15:34
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Je rêve ou vous râlez contre les Français...

à écrit le 15/09/2014 à 12:59
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L'euro c'est l'instabilité programmé, afin de construire des problèmes, qui n'existai pas auparavant pour permettre à certain d'imposer "leur solution".

le 15/09/2014 à 14:21
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exact !+ 1

à écrit le 15/09/2014 à 12:40
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L analyse de RoGo est tout a fait correcte. C est exactement ce que ressentent beaucoup d Allemands :raz le bol de payer ou garantir pour les autres südistes .... Les Neerlandais, Finlandais, Aurichiens ne pensent d´ailleurs pas autrement. ...

le 15/09/2014 à 13:03
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Pour les français, c'est la même chose, on ne demande qu'a retrouver notre souveraineté pour concurrencer loyalement l'Allemagne en ayant notre propre monnaie!

à écrit le 15/09/2014 à 12:19
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Les Allemands pensent à leurs intérêts comme les Français pensent à leurs intérêts mais les défendent mal. Le socialisme hollandien fait peur aux Allemands. La France devient un boulet. Je les comprends.

à écrit le 15/09/2014 à 11:54
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Elle pourrait augmenter les salaires de ceux qui gagnent 500 €uros/mois a plein temps ! hé oui ils ont redécouvert 'esclavagisme en Allemagne !

le 15/09/2014 à 14:18
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les mini jobs a 500 € c est du temps partiel, pas du plein temps. il faut arreter avec la porpagande d extreme gauche

le 15/09/2014 à 14:27
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quand bien même, vous VIVEZ AVEC 500 EUR , VOUS? c'est ce que rapporte le RSA, eh! bien, il y en a qui vont pas bosser, chez nous, et on les comprendrait "presque " !!!!!!

le 15/09/2014 à 18:12
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en Allemagne, ils préfère compléter un salaire à 500 euro par mois, plutôt que d'assumer la totalité des aides sociales. C'es évidement plus motivant pour ceux qui se lève le matin. Un concept tout à fait inhabituel en France, mais qui a le mérite de...

à écrit le 15/09/2014 à 11:51
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pourquoi ? parce qu'ils ont marre de cette Europe incompétente, autoritaire, injuste et pleine de faux-semblants, voilà !

à écrit le 15/09/2014 à 11:51
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Pourquoi ? c'est tout simplement la nature humaine: je vais bien, tu peux crever, je partage pas....oubliant qu'à une époque, sans l'aide des autres, ils auraient été enterrés :-)

le 15/09/2014 à 12:42
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N'importe quoi. De tout temps seul les plus forts et les plus adaptés ont survécu. Ceux qui comptent sur la solidarité pour s en sortir ne sont que des parasites : c'était vrai hier, c'est vrai aujourd'hui et ce sera toujours vrai demain. L'égoïsme...

le 15/09/2014 à 14:20
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si nos ancetres avait ete comme vous, l espece humaine n aurait pas faut long feu. Nous sommes pas tres fort et des proies faciles poru pas mal d animaux. Essayer de vous battre seul contre un ours ou meme un loup pour voir ...

le 15/09/2014 à 14:28
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alors comme suite à vos dires....que pensez vous des politiques, question "sangsues"??? !

le 15/09/2014 à 14:38
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Quels ingrats ! Après le Plan marshall, l'effacement des dettes de guerre, les dommages causés par la réunification aux voisins européens (hausse des taux d'intérêt, endettement...)... La réussite de l'Allemagne est uniquement due à la taille de leur...

le 15/09/2014 à 16:45
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@Gragol: j'adore ce "n'importe quoi" alors qu'au paragraphe suivant, tu dis la même chose que moi. T'aurais pas le sens de la contradiction poir conterdire et non pour argumenter par hasard :-) Je ne dis pas non plus qu'il faut créer de l'assistanat,...

le 15/09/2014 à 18:04
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+ 1000

à écrit le 15/09/2014 à 11:43
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La BCE est européenne pas allemandes ! Le seul choix pour la forte baisse de l'€uros c'est la sortie de l'Allemagne de la zone euros ou une forte hausse des salaires chez eux pour relancer la consommation !

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