Le maigre bilan de la présidence italienne de l'UE

La présidence italienne de l'UE va s'achever avec 2014. Avant de passer le relai à la Lettonie, Matteo Renzi va devoir assumer un bilan bien éloigné de ses ambitions de juillet dernier...
Matteo Renzi s'est fait plus discret en fin de présidence...

Jeudi soir, les journalistes bruxellois notaient avec bonheur que, pour la première fois depuis fort longtemps, le Conseil européen s'est achevé à l'heure. Une ponctualité inhabituelle qui s'explique aussi par la maigreur des sujets abordés, un étrange épilogue pour la présidence italienne de l'UE qui va s'achever officiellement le 12 janvier. Partie avec de grandes ambitions, cette présidence arrive à son terme sans véritablement avoir changé l'Europe.

L'ambition de cette présidence

Pourtant, lorsque, le 3 juillet, Matteo Renzi, le fringant président du conseil italien, prononce son discours programmatique devant le tout nouveau parlement européen, il est encore tout auréolé de sa brillante victoire aux européennes où son parti démocrate a obtenu 40,8 % des voix. Matteo Renzi est alors le seul dirigeant européen à pouvoir se prévaloir d'une sanction populaire. Aussi n'avait-il pas hésité à se montrer ambitieux, appelant l'Europe à un changement de visage permettant de retrouver « son âme. » « Le temps des rhétoriques vides est terminé », avait-il conclu sous les applaudissements nourris des députés.

Qu'entendait faire le jeune président du conseil de sa légitimité populaire ? L'ambition de la présidence italienne s'appuyait sur deux priorités : desserrer l'étau de l'austérité en donnant plus de flexibilité budgétaire aux pays de la zone euro et organiser un plan de relance. Au regard de ces ambitions, qu'a réellement réalisé la présidence italienne ?

Abandon de l'objectif d'un changement de calcul des déficits

Sur le plan de la flexibilité, Matteo Renzi n'a obtenu que quelques victoires ponctuelles, sans réellement modifier la philosophie générale du pacte de stabilité. Sa volonté affichée au cours du printemps d'exclure les investissements publics du calcul des déficits avait disparu de l'agenda avant même le début de la présidence italienne. Dès le sommet européen de fin juin, l'Allemagne avait fait savoir qu'il n'était pas question de réformer le calcul des déficits. Un discours rapidement adopté par Rome qui affirmait dès le départ ne pas vouloir modifier ce calcul.

Une flexibilité conditionnée

Dès lors quelle pouvait être la lutte pour la flexibilité ? Pas grand-chose en réalité. L'Italie a obtenu  un succès notable a priori en obtenant la « bienveillance de la Commission » sur les contributions des Etats membres au plan d'investissement Juncker. Le président de la Commission a promis que Bruxelles ne prendrait pas en compte ces contributions dans le calcul des déficits. Mais cette victoire n'est que de façade.

D'abord, parce que le discours officiel n'est pas aussi clair que les propos médiatiques de Jean-Claude Juncker. Le communiqué final du Sommet du 18 décembre utilise un langage suffisamment alambiqué pour pouvoir être interprété comme on le voudra : « le Conseil prend note de la position favorable dont a fait part la Commission à l'égard de ce type d'apports en capitaux [au fonds d'investissement, ndlr] dans le cadre de l'évaluation des finances publiques au titre du pacte de stabilité et de croissance, la flexibilité inhérente à ses règles actuelles étant nécessairement prise en compte. » On constate que le Conseil se contente de « prendre note » et renvoie à la « flexibilité des règles actuelles. » Bref, rien n'est inscrit dans le marbre, rien n'est certain. Ensuite, cette « exemption » ne règle pas le problème des investissements propres aux Etats qui, étant toujours soumis aux limites du pacte, seront toujours quasi impossibles, ce qui ne favorisera pas la croissance.

Sursis pour la France et l'Italie

Le seul élément sur la flexibilité dont puisse se prévaloir Matteo Renzi est donc que son pays et la France n'aient pas été sanctionnés pour leurs déficits excessifs. Victoire là encore très partielle. La Commission, dans les deux cas, a demandé des aménagements et n'a accordé en réalité qu'un sursis de trois mois aux deux pays pour leur permettre de montrer leur bonne volonté. Il n'y a donc pas de « changement » dans les principes puisque, malgré le risque de déflation, l'heure est toujours à la consolidation budgétaire. Là comme ailleurs, Matteo Renzi n'a guère changé l'Europe. Aucun vrai signal de rééquilibrage de la politique européenne n'a été envoyé.

Un plan Juncker en demi-teinte

La présidence italienne aura également vu naître le plan Juncker. Son existence est certainement une bonne nouvelle, mais il reste à le voir fonctionner. La présidence italienne n'a guère influencé une conception qui repose sur une vision très optimiste des mécanismes financiers : peu d'argent frais, peu de garanties et l'espoir d'un grand effet de levier de 15. Les premiers projets devraient être lancés en juin 2015, mais personne aujourd'hui n'envisage sérieusement que l'ambition des 315 milliards d'euros d'investissements nouveaux fin 2017 puisse être atteint... Si jeudi le Conseil a exigé que la BEI « démarre l'activité en utilisant ses ressources propres dès janvier 2015 » et a mis la pression sur l'institution de Luxembourg, la réaction de cette dernière - toujours arc-boutée sur son triple A, reste incertaine et l'Europe a renoncé à une augmentation de son capital, comme ce fut évoqué en juillet par Jean-Claude Juncker lui-même. Globalement, l'influence de Rome sur ce plan d'investissement reste donc limitée.

Succès sur le climat

Même sur le front de l'emploi des jeunes, Rome n'est pas parvenue à imposer son ambition de rajouter 6 milliards d'euros au fonds prévu. Evidemment, la présidence italienne était délicate à gérer compte tenu du changement de parlement et de commission. On comprend d'autant moins les ambitieuses rodomontades de Matteo Renzi du 3 juillet. En réalité, le seul vrai succès de la présidence italienne est l'accord trouvé sur le climat, au prix d'un compromis très favorable à certains pays d'Europe centrale comme la Pologne.

Rhétorique vide

Sur les autres sujets, l'apport de cette présidence restera faible. Matteo Renzi a été incapable de former un front avec Mario Draghi pour imposer des « Abenomics » à l'européenne proposée par le président de la BCE lors de son discours de Jackson Hole le 25 août. Les deux Italiens se sont vite rendu compte de l'inflexibilité allemande sur les principes budgétaires. Une inflexibilité encore renforcée par la montée des Eurosceptiques lors des élections régionales de septembre. Mario Draghi a ainsi cessé de parler de relance dès octobre, tandis que Matteo Renzi, qui, en juillet, pouvait encore réclamer le « respect » aux conservateurs allemands en plein parlement européen, s'est ensuite fait très discret dans sa confrontation avec Berlin. Encore une fois, cette présidence aura été celle de la « rhétorique vide. »

Commentaires 4
à écrit le 26/12/2014 à 21:38
Signaler
Mario Monti, Lucas Papademos et Mario Draghi ont un point commun : ils ont tous travaillé pour la banque Goldman Sachs. Comme Macron ........banque Rothschild. Je n'ai plus envie de courber l'échine.

le 26/12/2014 à 22:36
Signaler
Une bonne révolution se prépare. La génération Y va s'énerver ;-)

à écrit le 26/12/2014 à 13:51
Signaler
ce manège est une connerie . L'Europe des fonctionnaires recasés (Moscovici le nul ) ne laisse aucune chance de progrès . Le seul espoir est d'éjeter ces parasites !

à écrit le 23/12/2014 à 9:39
Signaler
Que ce soit l'Italie ou les autre il n'y a pas d'avancer sur les sujet important, soit la mise en place de plus de démocratie dans cette union, une vrais défense economique de nos état, et la mise en place d'une défense militaire commune.... Comme to...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.