Aux Etats-Unis, tout fout le camp, même la carabine Winchester !

Avec la délocalisation annoncée de Winchester, l'Amérique perd à nouveau une usine mythique et un peu de son âme.

John Wayne a dû se retourner dans sa tombe ! A compter du 31 mars prochain, plus aucune carabine Winchester ne sera fabriquée aux Etats-Unis. Telle est l'annonce faite la semaine dernière par la direction de l'établissement qui a prévenu ses 200 employés de New Haven, Connecticut, que sa production sera délocalisée au Portugal et au Japon. Eh oui, le Pays du Soleil Levant. Celui-là même que les 19.000 employés que comptait encore l'usine pendant la seconde guerre mondiale avaient à coeur de terrasser en travaillant d'arrache-pied.

Pour les milliers d'amateurs d'armes et de chasse américains, l'annonce a eu l'effet d'un coup de semonce, mal dirigé, bien sûr. La carabine Winchester n'était-elle pas l'arme de prédilection des pionniers ? "Le fusil qui a vaincu l'Ouest" ? La gâchette favorite du président Teddy Roosevelt, qui en l'emportant dans ses bagages lors d'un fameux safari en 1909, a aussi contribué à sa renommée au tournant du siècle dernier ? Hors des Etats-Unis aussi, la Winchester a fait rêver. Plusieurs générations gardent le souvenir vivace de John Wayne, immortalisé sur pellicule - mais aussi en statue au coeur de l'usine Winchester de New Haven - et de James Stewart, l'impitoyable gâchette de "Winchester 73".

"L'essentiel de l'âme américaine est celle d'un dur, d'un isolé, d'un stoïque et d'un tueur", estimait D.H. Lawrence, contemplant les pionniers du Nouveau monde. "Mais ce qui fut un jour une nation de chasseurs est désormais une nation de métrosexuels et de Dilbert!", ce petit personnage de bande dessiné à la tête d'ananas qui, dans des dizaines de quotidiens américains, incarne le mal être de milliers de cadres guindés et quelque peu stressés, déplore David Zincavage, sur son site ultra-conservateur Never Yet Melted.

Doit-on regretter que les "bonnes" traditions se perdent ? Que l'usine Winchester de New Haven ait vu sa production d'armes descendre à 80.000 unités en 2005, chiffre qui aurait dû chuter d'un tiers cette année ? Pas vraiment. Surtout si on est peu porté sur la chasse et que l'on abhorre tout symbole de violence, fut-il accroché à un mur. Pourtant, par-delà la fin de la saga américaine de Winchester, n'a-t-on pas le droit de regretter la délocalisation de la production de tant de produits mythiques qui ont participé à l'édification d'une certaine Amérique ?

Le cow-boy Marlboro n'a plus le droit de fumer en public, un jean Levi's a été confectionné pour la dernière fois dans le Kentucky à la fin 2003 et les fameuses guitares Gretsch qui ont fait l'histoire du Rock'n'Roll (Eddie Cochran, Bo Diddley, Chet Atkins...) sont désormais fabriquées en Corée et au Japon. Mais le pire reste peut-être à venir. Les fabriquants automobiles de Detroit seraient, paraît-il, contraints de s'adapter à la flambée des prix de l'énergie et de construire des modèles plus petits, plus économiques. Moins américains en somme.

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