Aide française après le tsunami : les critiques de la Cour des comptes

La Cour des comptes rend ce mercredi dans un rapport ses conclusions après de long mois d'enquête sur la façon dont ont été utilisés les 330 millions d'euros, une somme record, collectés après la catastrophe du tsunami en Asie. Elle critique plusieurs ONG pour manque d'informations ou lenteur dans l'utilisation des dons.

Deux ans après le tsunami, la Cour des comptes fait dans un rapport sur l'aide des Français aux victimes un constat mitigé, soulignant des "progrès" sur la manière d'aider mais exprimant sa "préoccupation" sur la lenteur de l'emploi des dons et un manque d'information.

Après cette catastrophe sans précédent - 240.000 morts - ayant entraîné des dons records en France - 330 millions d'euros pour les organismes d'aide - la Cour a effectué un travail gigantesque, mobilisant pendant plusieurs mois, en 2005, 24 magistrats, qui ont mené 20 missions en Indonésie, au Sri Lanka et en Thaïlande.

Elle émet quatre réserves : l'affectation très lente des dons, le manque, dans certains cas, d'information aux donateurs, mais aussi le financement d'opérations sans lien avec la catastrophe et des imprécisions comptables.

Sur les 32 organismes contrôlés, dont la Croix-Rouge française, le Secours catholique, le Secours populaire, Médecins du monde ou encore Action contre la Faim et Médecins sans frontières, 15 ont reçu un satisfecit.
Les comptes des 17 restants, sans être jugés "non conformes", font cependant l'objet de "réserves" ou "recommandations".

La juridiction exprime en particulier sa "préoccupation" devant l'importance des dons inutilisés fin 2005, notamment pour la Croix-Rouge française (85% des fonds non utilisés) et le Secours catholique (80%), qui totalisent à eux deux près de la moitié des dons (46,4%), tout en notant que des programmes prévus jusqu'en 2010, devraient utiliser tous les fonds.

Fin 2006, la Croix-Rouge avait dépensé 39,2% sur 113 millions d'euros récoltés, tandis que le Secours catholique annonçait l'emploi de plus de 50% des fonds collectés, soit 18,7 millions d'euros.

La Cour note aussi "l'exception de Médecins du monde" qui a informé les donateurs a posteriori que les 3,4 millions d'euros issus des appels à dons faits par courrier ciblés sur le tsunami (sur un total de 11,4 millions de dons), ont été dès le départ affectés à d'autres causes."Choisir de ne pas affecter les dons reçus à des actions tsunami sans avoir préalablement consulté les donateurs est une décision lourde de conséquences", estiment, sévères, les magistrats.

Médecins du Monde explique qu'elle a bien informé les donateurs réguliers en janvier 2005 "qu'une part pourrait être affectée à des crises oubliées". Quant aux donateurs spontanés, ils l'ont été en septembre 2005, et seul "1% a refusé", indique Eric Chevallier, directeur des missions internationales.

D'autres ont financé des opérations "sans rapport direct" avec la catastrophe, le message aux donateurs ou encore l'objet même de l'organisme. Ainsi, Pompiers sans frontières, "qui a procédé à une réaffectation contestable de 24% des dons reçus", a mené des opérations de "sensibilisation et de préparation aux risques naturels".

Face au flot de générosité, la cour note que des ONG se sont "senties contraintes d'employer les fonds collectés", et ont parfois cédé à des "dérives par rapport aux objectifs présentés". Enfin, la Cour pointe pour certaines des imprécisions comptables, notamment la remise par le Secours populaire, en septembre 2006, de comptes encore provisoires pour 2005.

Quinze ans après le scandale créé par la gestion irrégulière de l'Association pour la recherche sur le cancer (ARC), la Cour n'épingle vivement aucune ONG. Elle note des "progrès" et constate que son enquête "fait ressortir les forces et les faiblesses de l'action humanitaire". Elle insiste, en conclusion, sur le fait qu'elle ne verrait "aucun inconvénient à une réaffectation partielle des dons" non employés, à condition d'informer les donateurs.

Enfin, la Cour des comptes salue "l'engagement fort et rapide" de l'Etat (337 millions d'euros consacrés aux victimes), mais l'invite à plus de coordination à l'avenir.

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