Affaire Société Générale : le trader Jérôme Kerviel mis en examen mais laissé en liberté, le Parquet tente de s'y opposer

Le trader de la Société Générale auquel est imputé une perte record de 4,9 milliards d'euros, a été mis en examen mais laissé en liberté sous contrôle judiciaire dont la nature n'a pas été précisé. Le Parquet a fait appel de cette décision de le laisser libre. Ce sont les juges Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset qui instruisent le dossier de l'"affaire".

On apprend ce lundi soir de la bouche de ses avocats que Jérôme Kerviel, le trader de la Société Générale auquel est imputé une perte record de 4,9 milliards d'euros, a été mis en examen mais laissé en liberté sous contrôle judiciaire dont la nature n'a pas été précisé. Le Parquet qui s'opposait à une remise en liberté a fait appel de cette décision. D'où une incertitude sur le sort immédiat du trader.

Le jeune homme de 31 ans, présenté aux juges Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset, instruiront le dossier de l'"affaire" de la Société générale, était poursuivi pour "faux, usage de faux, introduction dans un système de traitement automatisé de données et abus de confiance aggravé" (l'affaire fait aussi l'objet d'une plainte contre X). Le juge Renaud Van Ruymbeke a abandonné l'accusation de tentative d'escroquerie que le parquet souhaitait retenir.

C'est en tout cas à deux vétérans de la justice financière qu'échoit le redoutable honneur de mener à bien l'instruction dans l'affaire de la "fraude" de 4,9 milliards d'euros dont a été victime la Société générale. Le juge van Ruymbeke s'est notamment illustré dans les affaires du financement occulte du PS puis frégates de Taiwan. Récemment, il a été impliqué dans l'affaire Clearstream.

Françoise Desset, moins médiatique, instruit, dans l'affaire Clearstream, une affaire de "dénonciation calomnieuse" initiée par Jean-Louis Gergorin, le vice-président d'EADS. Elle a aussi été chargée d'instruire la plainte d'Hughes de Lasteyrie contre l'AMF, l'autorité des marchés financiers, dans l'affaire Rhodia et celle sur un système d'entente présumée entre Nike et le PSG. Elle a instruit également une procédure incidente de l'affaire du Crédit Lyonnais.

Les incriminations retenues dans l'affaire de la Société générale dont sont désormais en charge les deux magistrats vont au delà de la plainte déposée par la banque, qui ne parlait que de "faux et usage de faux", "introduction dans un système automatisé de données informatiques". De même, l'instruction ne vise plus seulement Jérôme Kerviel mais aussi d'autres personnes, éventuellement mêlées à l'affaire.

La désignation de ces deux juges d'expérience et leur saisine initiale montre bien, s'il en est besoin, que l'affaire n'est pas aussi simple que veut bien le dire la banque. Dès vendredi, le Parquet de Paris indiquait: "l'affaire s'annonce d'une grande complexité". Une source interne, interrogée par la tribune.fr, faisait référence à l'affaire du Crédit lyonnais, au début des années 90, pour souligner les difficultés de ce type d'enquêtes dans un univers opaque pour les magistrats et policiers. Des enquêtes d'autant plus longues que ces investigations financières ont des ramifications à l'international.

La Justice devra d'abord vérifier si le trader Kerviel est bien à l'origine de la perte de 4,9 milliards d'euros. Au delà même des doutes de la presse française et internationale, le Parquet de Paris a déjà indiqué que le délit imputé à Kerviel n'était pas automatiquement constitué. Nul juge, en effet, ne peut reprocher à un trader de vendre et d'acheter, ni même d'occasionner des pertes à son employeur dans son activité. D'autant plus qu'il ne semble pas s'agir d'escroquerie ni d'abus de confiance puisque, selon la Société Générale elle-même, le trader n'aurait pas tiré de gain personnel dans l'affaire. La Justice devra également qualifier les faits pour engager des poursuites.

Le délit de "faux et usage de faux" est puni de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros (article 441-1 du Code pénal). L'"atteinte aux systèmes de traitement automatisé de données" est punie jusqu'à trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende (article 323-1 du Code pénal). L'abus de confiance est puni de sept ans d'emprisonnement et à 750000 euros d'amende lorsqu'il est réalisé par une personne se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens des tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs (article 314-2 du Code pénal). Non retenue, la tentative d'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende (article 313-1 et 313-3 du Code pénal).

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