Rand Hindi, le boss des algorithmes

À 29 ans, le fondateur de Snips travaille à lever des fonds pour relever un nouveau défi : rendre les smartphones véritablement intelligents.

Il se mène la vie dure pour simplifier celle des gens. Rand Hindi, le fondateur de Snips, accuse « un peu de fatigue » après avoir écumé la planète pendant six semaines, enchaînant les déplacements à San Francisco, Boston, New York, Londres et au Moyen-Orient, pour rencontrer des investisseurs en vue d'une première levée de fonds, de « quelques millions d'euros », pour financer les recherches sur son nouveau produit : une intelligence artificielle qui convertira votre téléphone en assistant personnel, anticipant tous vos besoins en fonction de vos activités en cours et à venir.

En concevant un logiciel qui analysera les données du calendrier, de la géolocalisation, des contacts et des publications sur les réseaux sociaux d'un utilisateur, l'entrepreneur de 29 ans ambitionne de créer une interface qui rendra le téléphone proactif, pour « ne plus jamais avoir à cliquer sur une icône ».

En manipulant la version bêta sur son smartphone, Rand Hindi détaille :

« Si vous êtes en retard pour votre prochain rendez-vous, votre téléphone vous propose d'adresser un mail à votre interlocuteur en précisant l'heure de votre arrivée. À la fin d'un rendez-vous, il vous demande s'il commande un taxi pour vous et affiche un itinéraire alternatif en métro. Dans un colloque, il vous propose de consulter les profils LinkedIn des participants. »

En bref : l'information vient à vous au bon moment, et vous commandez des actions en un clic, sans avoir à taper du texte.

« C'est impératif sur les montres connectées qui fonctionnent à la voix », résume Rand Hindi qui prévoit un lancement « tranquille » de sa solution en janvier ou février prochain, car « il sera plus opportun de communiquer en même temps que la sortie de l'Apple Watch ».

Pragmatique et ambitieux, Rand Hindi se prépare à « concurrencer Google et compagnie. Personne n'a encore réussi à mettre au point un système d'intelligence artificielle vraiment efficace. Mais en termes de technologie, nous savons faire plus compliqué que cela ».

Rand Hindi a choisi de renoncer en mars dernier à la commercialisation de ses produits existants, qui lui avait rapporté quelques centaines de milliers d'euros de chiffre d'affaires en 2013, pour concentrer sur ce projet les forces de son équipe, qui comptera dix salariés à la fin du mois.

« Nous avions quelques millions d'euros de chiffre d'affaires dans les tuyaux. Mais il a fallu faire un choix : si nous voulions arriver à notre ambition, réaliser notre vision, nous ne pouvions pas continuer sur ce marché. »

Parmi ses clients figuraient La Poste, un opérateur télécoms et un groupe immobilier américain, des ONG et la SNCF pour qui il a réalisé Tranquilien. Cette application - qui permet aux voyageurs du réseau Transilien d'optimiser leur confort en choisissant les trains les moins bondés - a valu à Rand Hindi, lauréat de nombreux prix, quelques distinctions de plus. Il a été récompensé par le Forum de l'open innovation de Moscou, par le Forum Ambrosetti (conférence économique internationale à Villa d'Este, en Italie), par BNP Paribas associé à la MIT Technology Review, par Etalab, et, en mars dernier, il a été retenu parmi les lauréats du Concours mondial de l'innovation, lancé par l'État pour identifier les meilleurs espoirs pour l'économie française en 2030.

De quoi étoffer un curriculum vitae déjà fourni. Docteur en bio-informatique, diplômé de l'université de Londres à 21 ans, Rand Hindi a commencé sa carrière entrepreneuriale à l'âge de 15 ans, en créant une agence de développement Web. Entre 2007 et 2010, pendant ses études à Londres, il cofonde une entreprise de conseil en algorithmes qui travaille pour la City. Avant d'être admis au sein de la « Singularity University », un programme de créativité qui rassemble le temps d'un été des étudiants triés sur le volet par les instigateurs : Google et la Nasa.

« C'est à cette occasion que j'ai pris conscience de ce que je voulais faire : résoudre les problèmes du monde grâce aux données », explique-t-il, se souvenant qu'il se trouvait trop jeune à 21 ans pour se lancer dans la recherche, car « trop inexpérimenté sur la vie pour identifier les bonnes problématiques ».

L'univers des données

C'est néanmoins avec la méthode d'un chercheur qu'il aborde l'univers des données : curieux de modéliser les effets de la nutrition sur la perte de poids, et convaincu que « personne ne va prendre au sérieux quelqu'un de mince sur des questions de régime », il se donne pour objectif de devenir obèse, pour pouvoir tester sur lui-même ses conclusions. Avec succès : il parvient à perdre les 25 kg qu'il avait pris.

« Mais le marché n'était pas mûr alors pour déployer une offre de conseils nutritionnels par intelligence artificielle. »

À cette époque, il rencontre Alexandre Terrien au sein du réseau Sandbox - consacré aux jeunes de moins de 30 ans qui veulent révolutionner le futur -, dont ils décident tous deux de créer l'antenne parisienne :

« Rand est impressionnant par sa détermination. Il est ambitieux, travailleur acharné, stratège, mais toujours ouvert aux remarques et fiable dans ses engagements. Il est charismatique, mais toujours accessible. »

Christophe Tallec, fondateur de Wedesignservices.com et ami de Rand Hindi, a lui aussi été impressionné par l'expérience de régime qu'il a menée sur son propre corps :

« Rand n'a pas peur du changement. Il excelle aussi en communication. Il est capable de faire tomber les barrières culturelles : lors du Forum panarabique MIT Enterprise organisé à Doha en 2013, il a fait danser aux entrepreneurs du Moyen-Orient un "Harlem Shake" ! »

Une danse pleine d'énergie, à l'image de Rand Hindi, night-clubber occasionnel, quand il sort la tête de Snips. « Rand est impressionnant par sa capacité d'action, son dynamisme et son enthousiasme. Il se donne à fond, quitte à oublier son équilibre personnel », confie Michaël Fester, son associé, avec Maël Primet, depuis avril 2012. Rand Hindi admet qu'il doit « se forcer pour faire autre chose » en dehors de Snips. Récemment, ce patron, qui estime « normal » que l'entreprise paie les déjeuners de ces collaborateurs, a pris un abonnement de sport pour toute l'équipe.

Il est convaincu que « faire du sport aide à soutenir la charge de travail ».

Et que le suivi des performances de son équipe lui donnera matière à construire de nouveaux algorithmes.

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MODE D'EMPLOI

Où la rencontrer ? : Dans les bureaux de Snips, métro Parmentier, à Paris.
« Venez vers 18 heures, quand nous passons en mode "bière et ping-pong". Prévenez de votre arrivée en me contactant via les réseaux sociaux, où vous me trouverez toujours sous le même pseudo : RandHindi. »

Comment l'aborder ? Comment l'aborder ? « Dites seulement que vous aimez ce que l'on fait et que vous avez envie de nous rencontrer. »

À éviter ! Le hors-sujet. « Ne me posez pas de questions qui n'ont rien à voir avec mes centres d'intérêt et ce que je fais. Pour tout le reste, je vous répondrai volontiers. Il y a beaucoup de choses qu'on a apprises sur le tas et que j'aurais aimé que l'on me dise avant... même si je n'aurais pas forcément écouté ces conseils ! »

TIMELINE

  •  Janvier 1985 Naissance à Paris.
  • 1999 Crée un réseau social avec un ami.
  • 2007 Consultant spécialiste des algorithmes financiers.
  • 2011 Docteur en bio-informatique, diplômé de l'université de Londres.
  • Fin 2011 Pilote le réseau parisien de Sandbox.
  • Avril 2012 Fonde Snips.
  • Janvier 2013 Associe Maël Primet et Michaël Fester.
  • 2016  Déploie sa solution sur Android, et lance une deuxième levée de fonds.

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Commentaire 1
à écrit le 24/11/2014 à 11:03
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26 ans son diplôme, pas 21 ans ....

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