Municipales 2014 : Lyon, une métropole qui pourrait faire école

Jusqu'aux élections municipales de mars prochain, La Tribune analysera les enjeux du scrutin dans les dix principales villes françaises. Septième volet : Lyon, qui tournera une page audacieuse, le 1er janvier 2015, avec la création d'une collectivité à statut particulier, à la fois métropole et département.
Gérard Collomb, maire sortant de Lyon, candidat à un troisième mandat, rassembleur des compétences du département et du Grand Lyon au sein de la Communauté urbaine lyonnaise. / Reuters

En marge de la campagne des municipales, se prépare un « big bang » dans l'agglomération lyonnaise. Le 1er janvier 2015, la Communauté urbaine, établissement public de coopération intercommunale, née en 1969, se transformera en une collectivité à statut particulier, à la fois métropole et département. À cette date, elle absorbera l'intégralité des compétences du conseil général qui s'effacera sur les 58 (et bientôt 59) communes du Grand Lyon, réunissant 1,3 million d'habitants.

« À l'échelle nationale, c'est une décision inédite et audacieuse, une rupture qu'il faudra généraliser », analyse Michel Lussault, président de l'Institut français de l'éducation.

À l'échelle locale, « c'est une inflexion décisive qui va dans le sens de l'histoire de ces vingt à trente dernières années. Au fil des ans, le Grand Lyon a accru ses pouvoirs et ils sont forts », poursuit ce géographe.

Une analyse partagée par Paul Bacot, professeur de science politique à l'IEP de Lyon, qui évoque une « innovation majeure, préparée depuis longtemps, et dont la mise en oeuvre devrait bien se passer ».

Ce regroupement qui pourrait faire école a été voulu et annoncé conjointement en décembre 2012, par le centriste Michel Mercier, alors président du département du Rhône, et le socialiste Gérard Collomb, maire sortant de Lyon, candidat à un troisième mandat.

Rupture

Si l'opération est donc consensuelle, au-delà des clivages politiques traditionnels, l'issue du scrutin de mars prochain ne sera pas pour Gérard Collomb le boulevard qu'il espérait compte tenu des menaces de vote sanction contre le pouvoir national. Aussi le maire, également président du Grand Lyon, aime-t-il expliquer et expliquer encore cette opération au terme de laquelle la capitale des Gaules sortira plus puissante.

« Il y avait du sens à réunir les compétences d'aménageur urbain, au sens large du terme, relevant de la Communauté urbaine, et les services aux personnes plutôt assurés par le département. Une grande direction englobant le logement et le social sera créée. Il faut que, pour chaque projet, nos urbanistes pensent aux personnes âgées et handicapées. Notre future organisation est présentée comme un modèle national. Les métropoles européennes, étrangères nous observent. »

La métropole changera en effet de taille en portant ses effectifs à 7.500 agents et son budget autour de 3,5 milliards d'euros, après avoir récupéré au passage les trois quarts du budget du département, soit 1,2 milliard dont quelque 685 millions de dépenses sociales au titre du RSA, de l'APA (Assurance autonomie), etc.

« Nous réussirons si, sur le territoire concerné, l'action publique est plus lisible, cohérente et économe », tempère avec insistance Dominique Nachury, vice-présidente UMP du conseil général.

La logique veut que la suppression d'une couche du millefeuille génère des économies, en gommant des doublons, en fusionnant les actuelles Maisons du département avec les antennes sociales communales, etc.

Cette montée en puissance de la force de frappe financière s'effectue cependant sans extension des frontières du Grand Lyon auquel l'adhésion est, depuis longtemps, volontaire. Que le pôle multimodal de transports de Saint-Exupéry, outil d'attractivité de l'agglomération, ne soit pas inclus dans ce territoire est « une erreur grave », tacle Michel Havard, chef de file de la liste UMP/UDI en piste pour la mairie de Lyon.

« Il serait logique que la métropole aille jusqu'à l'aéroport », confirme Michel Lussault. Une « anomalie » que ce géographe impute « à la survivance de guerres de clocher. Les communes de l'est lyonnais se considèrent comme des villages gaulois ».

Vers un Grand Lyon à géométrie variable ?

Gérard Collomb calme le jeu et renvoie ce sujet à la décision que prendront les pouvoirs publics, aujourd'hui actionnaires à 60% des Aéroports de Lyon. En cas de cession de cette participation, les cartes seront rebattues.

En attendant, l'espace de coopération territoriale est encore plus grand avec le pôle métropolitain, porté sur les fonts baptismaux, en avril 2012. Il rassemble 2 millions d'habitants, ceux du Grand Lyon, des communautés d'agglomération de Saint-Étienne (dans la Loire), des Portes de l'Isère (CAPI) et du Pays viennois et demain, peut-être, de la communauté d'agglomération de Villefranche-sur-Saône, elle aussi sous influence de Lyon.

Toutefois, Michel Havard estime, que sous sa forme actuelle, ce pôle ne sert pas à grand-chose et veut le remplacer par un syndicat mixte, ouvert, « couvrant un territoire plus large et doté d'une capacité de maîtrise d'ouvrage pour mettre en oeuvre des équipements et des politiques publiques qui s'imposent dans un large consensus ».

Gérard Collomb rétorque qu'il faut faire « de l'intensif avec la métropole et de l'extensif avec le pôle métropolitain qui nous a permis de constituer le syndicat mixte des transports de l'aire métropolitaine lyonnaise avec le conseil régional de Rhône-Alpes ».

Première initiative : T-Libre, un titre de transport unique qui facilite les déplacements au sein de cette aire urbaine. Les transports en commun seront un des grands enjeux des élections comme le prouvent les surenchères des candidats sur les projets de métro.

De façon plus réaliste, le Sytral (Syndicat mixte des transports en commun de la région lyonnaise) travaille à l'élargissement, au 1er janvier 2015, de sa couverture à la totalité du Rhône en reprenant les liaisons, aujourd'hui placées sous la responsabilité du conseil général « qui nous en a fait la demande », précise Bernard Rivalta, président du Sytral.

« Ces lignes sont actuellement toutes desservies par cars et nous prolongerons certaines de nos lignes de bus pour les destinations les plus urbaines. »

Vaste chantier. Pour révolutionnaire qu'elle soit, la métropole de 2015 sera une étape transitoire. Cette foisci encore, les prochains conseillers métropolitains seront désignés dans le cadre d'un suffrage indirect par les élus issus du scrutin du 30 mars dans les 58 communes.

Le maire de Lyon a toujours réussi à s'installer dans ce fauteuil, mais ce cumul ne pourra se pérenniser au-delà de 2020, comme l'a décidé le Parlement et validé le Conseil constitutionnel. Que cette tradition cesse n'inquiète personne :

« Il n'y a plus de dialectique entre la ville-centre et la périphérie de l'agglomération », estime Michel Lussault.

« Les opérations de développement urbain permettent une cohabitation agréable à l'échelle des différentes communes. Le prolongement du métro jusqu'à Oullins et demain jusqu'aux hôpitaux Sud change la donne, tout comme le futur Grand Stade. »

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Le maillon manquant du périphérique

Autrefois baptisé TOP, ce maillon manquant du périphérique lyonnais, évoqué depuis 1997, fait figure de serpent de mer. Le projet a été relancé en 2012 par le Grand Lyon, maître d'ouvrage, et un grand débat public a été organisé l'année dernière.

« Si on ne le construit pas, l'agglomération sera asphyxiée d'ici à 2030 », martèle depuis des mois Gérard Collomb.

Long de près de 15 km, et enterré sur 80% de son tracé connectant le périphérique Nord au boulevard Laurent-Bonnevay, au Sud, son coût est chiffré à 2,5 milliards, auxquels s'ajoute 1 milliard pour l'intermodalité.

Les Verts y sont opposés : « Cette infrastructure va mobiliser toute la capacité d'investissement du Grand Lyon », s'insurge Emeline Baume, co-tête de liste des écologistes à Lyon.

« Il faut de nouvelles lignes de tram pour relier le centre à la périphérie et les banlieues entre elles », affirme-t-elle.

Dans les rangs de l'UMP, François-Noël Buffet, maire sortant d'Oullins, s'élève contre un itinéraire « trop proche du centre de l'agglomération ».

Gérard Collomb se dit moins inquiet de la faisabilité financière de cette voirie que des dizaines de recours que promettent de déposer les opposants.

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Commentaires 5
à écrit le 05/03/2014 à 15:03
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Avec le grand Lyon on fait des grands ronds points, de grandes tours coûteuses, une grande croissance pédalo, pardon pet dans l'eau, des pets keyneisiens... inflationnistes? Et de grands challenges technologiques sans robots dans l'industrie? Un gran...

à écrit le 04/03/2014 à 18:20
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Et qui a élu les dirigeants de cette métropole ? Ils sont cooptés, nommés par qui ? C'est sûrement la nouvelle démocratie du leurre, on élit les Maires, mais les dirigeants de la métropole qui sont le véritable pouvoir ,eux ne le sont pas. Bravo !

le 21/03/2014 à 9:53
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Si vous habitez dans le grand lyon, et que vous avez reçu les documents électoraux, vous aurez la réponse à votre question : sur le même bulletin vous avez les membres de la liste pour les élections municipales, et parmi les membres de cette liste, c...

à écrit le 03/03/2014 à 17:32
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Bravo à Gérard Collomb et à Michel Mercier pour leur vision d avenir pour la région lyonnaise, ces deux hommes doivent être remercier pour cette belle initiative qui n est qu un début. SI tous les maires de France avait la même attitude on pourrait ...

le 03/03/2014 à 18:11
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Oui, oui, ces mêmes français qui se plaignent du matin au soir de payer trop d'impôts.

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