"La transparence pour mieux responsabiliser"

L'évaluation des diplômes devrait pousser les universités autonomes à en faire un argument de recrutement : interview Jean-Michel Catin, directeur de la rédaction de l'agence Éducation emploi formation (AEF).

- Quel est l'intérêt d'évaluer les diplômes des universités ?

L'évaluation des diplômes par une agence "indépendante" est une nouveauté en France. Elle est utile à plus d'un titre. Pour les universités, qui sont dans une logique d'autonomie et d'excellence, tout d'abord. Ensuite, pour les étudiants, qui connaîtront mieux le niveau de leurs diplômes et la qualité de leur formation. Enfin pour les employeurs, qui y trouveront des indicateurs utiles dans un univers très compliqué. Car avec des milliers de spécialités de mastère, les universités n'ont pas encore profité de la réforme LMD (licence mastère doctorat) pour clarifier leur offre.

- La culture de l'évaluation commence-t-elle à faire son entrée dans le monde universitaire ?

Nous assistons à une prise de conscience. Mais nous ne sommes qu'au début du processus. L'évaluation est un sujet difficile car elle suppose une différenciation : elle implique logiquement des conséquences en termes de moyens demandés ou alloués. Des universités réellement autonomes feront de la qualité de leurs formations une priorité, et sans aucun doute un argument de recrutement.

- Quels sont les grands enseignements que vous tirez de ces premières vagues d'évaluations ?

Concernant les licences, la professionnalisation, la démarche par compétences et l'évaluation des enseignements sont déficientes, ce qui ne surprendra pas les étudiants... C'est d'autant plus préjudiciable que le premier cycle est celui qui se vide le plus au profit des filières sélectives telles les classes préparatoires. Paradoxalement, l'évaluation des enseignements par les étudiants est un point faible alors qu'elle est obligatoire ! Fait notable, les licences des domaines juridiques et des arts, lettres et langues obtiennent de moins bonnes notes. C'est aussi là où le budget par étudiant est le plus faible. Mais surtout, les disciplines scientifiques ont subi une concurrence très forte, ajoutée à la désaffection pour les sciences, qui les a conduites à prendre conscience de l'importance de la licence. Du côté des mastères, vu le nombre colossal de mentions et spécialités, les situations varient d'une université à l'autre et au sein même de chacune. Celles qui sont reconnues en recherche, comme l'université Pierre-et-Marie-Curie (Paris VI), sont très bien notées. Et l'on voit bien que certaines universités, dont le potentiel recherche est limité, peinent à rivaliser, sauf dans des « niches ».

- Quel crédit accorder à ces évaluations ?

Cette première vague d'évaluations, déjà critiquée, a le mérite d'exister et d'être surtout publique. La transparence conduira à mieux responsabiliser les universités, même si nous en sommes encore au stade du tâtonnement. Les progrès seront réels le jour où seront pris en compte comme indicateurs le taux d'insertion et le niveau de rémunération à l'embauche, mais aussi quand la loi sera enfin respectée au profit des étudiants, qui pourront donner leur avis sur la qualité de leurs enseignements.
 

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