Obama en Asie pour rassurer les alliés des USA face à la Chine

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(Crédits : Reuters.com)

par Matt Spetalnick et Manuel Mogato

WASHINGTON/MANILLE (Reuters) - Barack Obama effectue à partir de mercredi une tournée en Asie au cours de laquelle le président américain va s'employer à convaincre ses interlocuteurs que le "pivotement" stratégique des Etats-Unis vers leur région n'est pas qu'un effet d'annonce, mais une réalité face à une Chine ambitieuse.

Depuis que Barack Obama a annoncé en 2011 un redéploiement des moyens militaires, diplomatiques et commerciaux américains vers l'Asie-Pacifique, les signes tangibles de cette réorientation ont été suffisamment rares pour alimenter le scepticisme des alliés des Etats-Unis dans la région.

La récente annexion de la Crimée par la Russie, et la perception d'une impuissance américaine face aux initiatives de Moscou en Ukraine, ont nourri une forme de malaise au Japon, aux Philippines et ailleurs. Ces pays redoutent que la Chine interprète ces événements comme une preuve de faiblesse américaine et se sente enhardie au point de recourir à la force pour satisfaire ses propres revendications territoriales en mers de Chine orientale et méridionale.

Les Etats-Unis sont certes contraints par des traités à venir en aide à leurs alliés asiatiques. Certains parmi ces derniers se demandent toutefois si, en cas de menace chinoise, Washington ne chercherait pas une issue préservant en premier lieu sa propre relation avec la Chine, deuxième puissance économique au monde derrière les Etats-Unis.

Pour Barack Obama, toute la difficulté de cette tournée, qui passera par le Japon, la Corée du Sud, la Malaisie et les Philippines, consistera à fixer des limites aux ambitions chinoises afin de satisfaire ces pays tout en évitant d'alimenter les tensions avec Pékin.

"La tournée à venir de Barack Obama constituera le test le plus crucial de la politique asiatique de cette administration", pense Richard Jacobson, analyste basé à Manille pour TD International, cabinet de conseil en risques stratégiques pour les entreprises.

PACTE DE SÉCURITÉ

Les responsables américains affirment que le "pivotement", ou le "rééquilibrage" selon le terme désormais plus fréquemment utilisé, est bel et bien engagé en direction de l'Asie, malgré l'attention que réclament la crise en Ukraine et les troubles persistants dans le monde arabo-musulman.

Certains en doutent toutefois.

"Cela a été un changement politique bienvenu mais vont-ils le faire?" s'interroge Yukio Okamoto, ancien conseiller diplomatique du gouvernement japonais. "Nous ne voyons aucun signe concret" de sa mise en oeuvre, ajoute-t-il.

Lors de l'annonce de ce choix stratégique, son illustration la plus spectaculaire devait être le déploiement dans le nord de l'Australie de 2.500 "marines" pour réagir rapidement aux éventuelles crises régionales. Il a fallu attendre ce mois-ci pour que le contingent américain à Darwin atteigne 1.150 marines et ses effectifs ne devraient pas être complets avant 2017.

"Le pivotement américain vers l'Asie a eu très peu de traductions tangibles, concrètes jusqu'à présent", remarque Adam Lockyer, expert des questions de diplomatie et de défense à l'Université de Nouvelle-Galles-du-Sud, en Australie.

A Manille, les autorités philippines s'attendent à ce que Barack Obama paraphe un pacte de sécurité qui fournira aux forces américaines un accès élargi aux bases de l'archipel.

Cette acceptation d'une présence militaire américaine renforcée témoigne de l'importance des craintes philippines à l'égard de la Chine.

Dans un pays soucieux de son indépendance, le Sénat philippin avait décidé le départ de l'armée américaine en 1991, mettant ainsi fin à 94 ans de présence militaire des Etats-Unis aux Philippines. Il n'a ensuite que progressivement autorisé un retour des forces américaines pour des opérations limitées au cours de la décennie écoulée.

ENLISEMENT DES NÉGOCIATIONS COMMERCIALES

Les Philippines sont soumises à une pression militaire directe de la Chine autour d'un chapelet d'îlots, baptisé Second Thomas Shoal, qu'elles occupent mais que Pékin revendique, comme 90% de cette mer.

L'administration Obama a promis un redéploiement des forces navales américaines afin que 60% de leurs bâtiments de guerre soient stationnés dans la région Asie-Pacifique d'ici la fin de la décennie, contre 50% actuellement. Mais dans un contexte de réduction du budget militaire, cela pourrait n'être qu'une part plus grande d'un gâteau plus petit.

Les collaborateurs de Barack Obama balaient ces critiques.

"Les interrogations de nos alliés de la région Asie-Pacifique sont une composante permanente de notre relation depuis plus de 60 ans. Ce n'est pas nouveau", dit un responsable américain sous le sceau de l'anonymat. "Cela ne signifie pas que les Etats-Unis ne vont pas en faire davantage pour collaborer avec eux."

Barack Obama a lui-même contribué au scepticisme ambiant en octobre en annulant soudainement sa participation prévue de longue date à deux sommets régionaux en Asie, en raison de la crise politique à Washington sur le financement des services fédéraux américains.

Depuis, les négociations sur un pacte commercial baptisé Partenariat trans-pacifique (TPP), axe économique majeur du "pivotement" vers l'Asie, se sont enlisées.

Dans ce contexte tendu, Barack Obama devrait inviter ses interlocuteurs à garder foi en son pays et dans sa détermination à ne pas laisser croire à la Chine qu'elle peut imiter la Russie en prenant à ses voisins des îles ou des archipels contestés.

"Parmi les pays d'Asie, il y a un degré croissant d'anxiété sur les leçons que pourrait tirer la Chine de la Russie et de l'Ukraine", admet ce même responsable américain. Il assure toutefois que face à ces craintes, Barack Obama mettra en garde la Chine sur le fait qu'"elle ne devrait pas recourir à l'intimidation ou à la contrainte" contre ses voisins.

(Avec Greg Torode à Hong Kong, Linda Sieg à Tokyo, Matt Siegel à Sydney, David Brunnstrom et Mark Felsenthal à Washington; Bertrand Boucey pour le service français)

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