Le rassemblement façon Sarkozy, un défi incertain

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par Sophie Louet

PARIS (Reuters) - L'ambition de Nicolas Sarkozy de créer un "rassemblement" par-delà les clivages politiques fait écho à une aspiration des Français, mais l'entreprise risque de se heurter à la personnalité même de son inspirateur, qui continue de diviser autant dans son camp que dans l'opinion publique.

L'ancien président, qui s'est engagé à transformer "de fond en comble" l'UMP s'il est élu à sa tête le 29 novembre, s'est inscrit dimanche soir sur France 2 dans une filiation et une stratégie gaullistes en appelant à une réponse collective à la crise et à la progression du Front national.

"Une alternative crédible qui rassemble les Français bien au-delà des clivages habituels droite-gauche, centre-droite, écologistes-libéraux qui n'ont plus aucun sens", a-t-il expliqué en faisant l'apologie du référendum.

Le dessein, officiellement déconnecté de la présidentielle de 2017, rappelle "l'ouverture" de 2007, quelque prises de guerre à gauche et une alliance avec les centristes qui fit pourtant long feu et heurta une partie de l'électorat de droite.

Cette ouverture nouvelle manière "correspond à une envie des Français de renverser la table", relève Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion et Stratégies de l'Ifop.

"Les Français veulent davantage de pragmatisme pour sortir le pays de l'ornière, peu importe la couleur idéologique de la réforme ou des mesures à prendre."

Nicolas Sarkozy, qui a esquivé dimanche tout bilan critique de son quinquennat, est resté très évasif sur les remèdes qu'il préconise et a manié l'ambiguïté sur sa ligne économique - non à une "thérapie de choc", comme l'avance François Fillon, mais oui à une refonte totale du modèle français - comme pour élargir au maximum le champ des possibles.

DES RÉFRACTAIRES À DROITE ET AU CENTRE

"Le clivage gauche-droite est élimé comme un vieux tapis qui aurait trois siècles", a dit l'ancien président.

Le constat prend un relief particulier à l'heure des débats au sein de la majorité socialiste sur la "politique de l'offre" engagée par François Hollande et Manuel Valls.

Nicolas Sarkozy, qui paraît écarter la radicalité "thatchérienne" de son ancien Premier ministre (on lui prête cette phrase : "Bon courage à celui qui veut se faire élire là-dessus!"), se ferait l'avocat d'une forme de "blairisme" à la française ("Il n'y a pas de solutions de droite ou de gauche, il y a celles qui marchent et celles qui ne marchent pas").

"Sur le plan économique, la définition des mesures à prendre ne dépend pas de savoir si l'on est libéral ou social-démocrate, mais de savoir ce que font nos concurrents ou partenaires", déclarait-il en août à Valeurs actuelles.

"Sarkozy veut plaire à tous, alors c'est le grand flou artistique, mais il faudra bien trancher la ligne à un moment ou un autre", juge un cadre de l'UMP.

Dominique de Villepin, François Baroin, Laurent Wauquiez, Jean-Pierre Raffarin, Nathalie Kosciusko-Morizet ont consenti à emprunter son "long chemin", de même que Jean-François Copé ou les tenants de La Droite forte.

Reste à trouver le plus grand dénominateur commun entre ces alliés contradictoires et à amadouer les réfractaires à droite et au centre, qui sont nombreux. Le défi paraît pour l'heure hors de portée au vu de l'hostilité, au mieux de la tiédeur, des réactions lundi à droite et à l'extrême droite.

"VOUS EN AVEZ VU DES SARKOZYSTES DE GAUCHE?"

"On aura besoin de tout le monde", a plaidé Nicolas Sarkozy, non sans un soupçon de condescendance à l'égard de ses principaux rivaux pour 2017, qui laisse perplexe sur son inclination nouvelle à la collégialité.

Le frêle rameau d'olivier tendu à Alain Juppé et François Fillon, ravalés implicitement au rang de futurs collaborateurs, ne plaide pas en faveur de la paix des familles, puisque de "famille", et non plus d'UMP, il est désormais question.

Le maire de Bordeaux, candidat à la primaire de 2016 dont Nicolas Sarkozy ne dit mot depuis sa déclaration de candidature, a salué lundi les "paroles aimables" de l'ancien président tout en marquant son indépendance.

"Je vais lancer une plate-forme coopérative. (...) Si j'ai des adhésions, ce sera par désir, pas par la peur", déclare Alain Juppé dans Sud Ouest à paraître mardi.

"Il sera intéressant de voir comment sera rebaptisée l'UMP. On pourrait avoir une référence au Rassemblement du peuple français, le RPF, sous la IVe République", note Jérôme Fourquet.

Le RPF, "c'est le métro à six heures du soir", déclarait André Malraux pour souligner la diversité de la nébuleuse gaulliste. C'est le rêve de Nicolas Sarkozy, mais est-il le mieux placé pour l'incarner? Jérôme Fourquet en doute.

"Il n'est pas quelqu'un de totalement neuf, il a un passif, il a beaucoup agacé ou mobilisé contre lui à gauche, il a aussi déçu en partie à droite par une politique qui n'allait pas au bout de ce qu'il avait annoncé", rappelle-t-il.

Un sondage BVA pour Public Sénat diffusé lundi au lendemain de son interview sur France 2 montre que Nicolas Sarkozy demeure "toujours aussi clivant".

Au-delà de la personne de Nicolas Sarkozy, "le clivage gauche-droite demeure structurant. François Bayrou a payé cher pour le voir", note Jérôme Fourquet.

"Vous en avez vu, vous, des sarkozystes de gauche?", s'amuse un élu UMP.

(Edité par Yves Clarisse)

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