La croissance, priorité du budget 2015, devant le déficit

reuters.com  |   |  977  mots

par Jean-Baptiste Vey

PARIS (Reuters) - Le projet de budget de l'Etat pour 2015, présenté mercredi au conseil des ministres, met au second plan le redressement des comptes publics pour conforter l'objectif prioritaire du gouvernement: préserver la croissance et enrayer la hausse du chômage, coûteuse politiquement.

Pour y parvenir, l'exécutif baisse les prélèvements sur les entreprises et les ménages, à rebours du mouvement de hausse amplifié depuis l'élection de François Hollande, mais dans la droite ligne de la politique de compétitivité mise en oeuvre depuis avec le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE).

Comme le projet de budget de la sécurité sociale, qui sera présenté le 8 octobre au conseil des ministres, le texte sera regardé de près par la Commission européenne, qui dira en novembre si les choix de la France sont conformes aux règles européennes, en dépit d'une nouvelle violation par Paris de son engagement de ramener le déficit à 3% du PIB.

"Le rythme de consolidation budgétaire doit être adapté à la situation économique de la zone euro", marquée par la faible croissance et la faible inflation, a déclaré le ministre des Finances, Michel Sapin, en présentant le budget à la presse.

"Notre politique économique ne change pas mais le déficit se réduira plus lentement que prévu du fait des circonstances économiques", a-t-il ajouté, en disant avoir "tout à fait bon espoir" quant à l'issue des discussions avec la Commission.

Confronté à la double panne de croissance et d'inflation, l'exécutif a renoncé à ramener le déficit public à la limite européenne de 3% fin 2015, ce qu'il s'était engagé à faire après avoir obtenu un délai de deux ans. Le retour à 3% est désormais prévu fin 2017, soit après la prochaine élection présidentielle.

Le déficit public, qui comprend les comptes de l'Etat, les comptes sociaux et ceux des collectivités territoriales, ne devrait quasiment pas baisser l'an prochain, atteignant 4,3% du PIB, après un dérapage à 4,4% cette année au lieu des 3,8% prévus. Son montant s'élèverait à 93 milliards d'euros fin 2015, dont 75,7 milliards pour l'Etat (après 87 milliards en 2014).

Le déficit baisserait par la suite à 3,8% du PIB en 2016 et 2,8% en 2017. Il était de 4,1% en 2013.

DISCUSSION COMPLIQUÉE AVEC BRUXELLES

Le gouvernement a expliqué ce dérapage -plus de 6 milliards d'euros en 2014 par rapport aux objectifs et plus de 25 milliards en 2015- par la panne de croissance et d'inflation.

Il a ainsi baissé ses prévisions de croissance à 0,4% cette année et 1,0% en 2015, au lieu de 1,0% et 1,7% auparavant, et ses prévisions d'inflation à 0,6% et 0,9%. La croissance accélèrerait ensuite à 1,7% en 2016 et 1,9% en 2017.

La dette publique devrait quant à elle continuer d'augmenter jusqu'en 2016, atteignant 97,2% du PIB fin 2015, après 95,3% fin 2014, puis 98,0% fin 2016 et 97,3% fin 2017.

Le Haut Conseil des finances publiques a prévenu mercredi que le respect de la nouvelle trajectoire des comptes publics n'était "pas acquis" et que les hypothèses macroéconomiques pour 2016-2017 étaient trop favorables.

Pour atténuer la colère des Européens -dont certains ont consenti d'importants sacrifices pour réduire leurs déficits- et échapper à des sanctions financières, le gouvernement devra démontrer que la dérive des comptes résulte des circonstances économiques "exceptionnelles" et non du manque d'efforts.

Il mettra en avant la réduction du déficit structurel, une notion désormais au coeur de l'examen des budgets par la Commission et qui gomme l'impact du cycle économique sur les comptes publics, même si elle moins importante que prévu.

Ce déficit devrait reculer à 2,2% en 2015, après 2,4% en 2014, puis 1,9% en 2016 et 1,4% en 2017. L'ajustement structurel serait de 0,5 point en 2014 et de 0,6 en 2015, au lieu des 0,8 promis sur chacune de ces deux années par Paris, un décalage mis sur le compte de la faiblesse de l'inflation par l'exécutif.

Malgré ces chiffres, "pour 2014, tous les efforts qui avaient été demandés à la France sont faits", a insisté Michel Sapin et, pour 2015, "l'effort que nous avions annoncé au printemps, c'est l'effort que l'on retrouve aujourd'hui".

21 MILLIARDS D'EUROS D'ÉCONOMIES

Les textes budgétaires prévoient 21 milliards d'euros d'économies l'an prochain, dont 7,7 milliards sur l'Etat, 9,6 milliards sur les comptes sociaux (dont 3,2 milliards sur l'assurance maladie) et 3,7 milliards sur les collectivités territoriales.

De 2015 à 2017, le gouvernement promet 50 milliards d'euros d'économies, soit l'équivalent d'environ 4% du total des dépenses publiques.

L'Etat et ses agences devraient ainsi réaliser 19 milliards d'euros d'économies d'ici fin 2017, les collectivités locales 11 milliards et la protection sociale 20 milliards, dont 10 milliards pour l'assurance maladie.

Ces économies ne signifient pas que les dépenses baisseront mais qu'elles augmenteront moins que leur progression "tendancielle" calculée par Bercy. La Cour des comptes estimait en juin qu'avec ces 50 milliards d'économies, les dépenses publiques augmenteraient de 62 milliards au lieu de 112.

Ces économies viendront en regard des baisses d'impôts qui entreront en vigueur l'an prochain, avec la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Ce pacte accentuera la baisse des prélèvements sur les entreprises commencée avec le CICE, dans l'espoir qu'elles investissent et embauchent davantage.

Les entreprises bénéficieront notamment l'an prochain d'une exonération des cotisations sociales patronales totale au niveau du smic et dégressive jusqu'à 1,6 smic (4,5 milliards d'euros) et de la suppression partielle de la C3S (un milliard).

Pour les ménages, la première tranche de l'impôt sur le revenu sera supprimée, ce qui devrait faire sortir 3 millions de foyers de l'impôt et baisser l'impôt de 6 millions d'autres.

Le geste pour les ménages représentera 3,2 milliards d'euros, a précisé le secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert. Pour les entreprises, la baisse des prélèvements devrait représenter environ 12 milliards d'euros l'an prochain.

(Edité par Marc Joanny)

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