Une deuxième chance pour l'extrême droite en Autriche

reuters.com  |   |  629  mots

par Francois Murphy

VIENNE (Reuters) - L'Autriche pourrait devenir ce dimanche le premier pays de l'Union européenne à élire un chef d'Etat appartenant à l'extrême droite.

Candidat du Parti de la liberté (FPÖ), hostile à l'immigration et eurosceptique, Norbert Hofer, 45 ans, incarnerait en cas de succès une preuve supplémentaire de la défiance populaire à l'égard des élites politiques dans les démocraties occidentales après le vote en faveur du Brexit en Grande-Bretagne et la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine.

Un autre coup pourrait venir simultanément d'Italie si le président du Conseil Matteo Renzi est désavoué à l'occasion d'un référendum constitutionnel ce dimanche.

En Autriche, Norbert Hofer bénéficie d'une deuxième chance après avoir été battu de justesse en mai par son adversaire écologiste Alexander Van der Bellen. Le résultat de ce scrutin a été annulé par la Cour constitutionnelle en raison d'irrégularités dans le dépouillement des votes par correspondance, qui pourraient une nouvelle fois s'avérer décisifs tant l'écart dans les intentions de vote est serré.

Les premières projections devraient être publiées dès la fermeture des bureaux de vote à 17h00 (16h00 GMT) mais le résultat définitif pourrait n'être connu que mardi si les deux candidats sont effectivement coude à coude.

La progression du FPÖ en Autriche précède largement le vote pour la sortie de la Grande-Bretagne de l'UE ou la victoire de Donald Trump mais les ressorts de son succès paraissent identiques. Les classes populaires et rurales soutiennent largement Norbert Hofer tandis que les milieux éduqués et urbains penchent plutôt pour Alexander Van der Bellen.

Ce dernier, âgé de 72 ans, a placé l'exemple du Brexit au coeur de sa campagne en accusant son adversaire de vouloir faire subir à l'Autriche un "Öxit" qui serait périlleux pour son économie et pour l'emploi.

EFFONDREMENT DES DEUX PARTIS TRADITIONNELS

"Ne jouons pas avec le feu. Ne jouons pas avec un Öxit", a dit le candidat écologiste lors de leur dernier débat télévisé, en référence au projet de Norbert Hofer, sur lequel ce dernier est ensuite revenu, d'organiser dans un délai d'un an un référendum sur l'appartenance de l'Autriche à l'UE.

Comme ailleurs en Europe, le vote contestataire en Autriche s'est nourri de la crise migratoire, qui a alimenté des craintes identitaires s'ajoutant aux inquiétudes relatives aux conséquences économiques et sociales de la mondialisation.

Les deux candidats se retrouvent ainsi à briguer la présidence à la faveur d'un effondrement des deux partis traditionnels, les sociaux-démocrates du SPÖ et les conservateurs de l'ÖVP, qui dominent la vie politique autrichienne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et gouvernent actuellement au sein d'une grande coalition.

Le chef de l'Etat en Autriche, pays de près de neuf millions d'habitants, joue traditionnellement un rôle protocolaire mais il dispose de certains pouvoirs, comme celui de nommer le chancelier et de révoquer le gouvernement, et il est le chef des armées.

Les prochaines élections législatives sont prévues en 2018 et une victoire de Norbert Hofer pourrait placer le FPÖ en position de l'emporter en cas de scrutin anticipé.

Alexander Van der Bellen a annoncé que s'il était élu, il empêcherait la formation d'un gouvernement par le patron du FPÖ, Heinz-Christian Strache, ce qui lui a valu d'être traité de "fasciste écologiste" par Norbert Hofer.

Le candidat écologiste, qui est professeur d'économie, a pour sa part accusé Norbert Hofer de chercher à trouver n'importe quel prétexte pour destituer le gouvernement en place et le remplacer par un cabinet de droite.

(Gilles Trequesser et Bertrand Boucey pour le service français)