Le duel entre Valls et Hamon vire à l'aigre

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PARIS (Reuters) - "Paresse intellectuelle" contre "marchand de sable" : Benoît Hamon et Manuel Valls, les deux finalistes de la primaire du Parti socialiste, ont échangé mardi des piques par médias interposés à cinq jours du deuxième tour d'un scrutin qui verra s'affronter des visions économiques et sociales antagonistes.

Deuxième du scrutin avec 31% des voix, l'ancien Premier ministre de François Hollande est l'outsider du deuxième tour d'une élection qui a vu l'ex-ministre de l'Education nationale (36%) se muer en favori.

Manuel Valls avait lancé l'offensive dès dimanche soir en accusant Benoît Hamon, qui avait quitté son gouvernement en août 2014 pour protester contre l'orientation politique du couple exécutif, de représenter "une défaite assurée" à l'élection présidentielle.

Sur franceinfo mardi, l'ancien chef du gouvernement, qui a pour l'heure reçu mardi le soutien implicite du Premier ministre Bernard Cazeneuve [nL5N1FE540], a une nouvelle fois épinglé le programme de son adversaire, notamment le revenu minimum universel, qu'il juge irréaliste.

"Quand on propose 350 milliards d'euros même à l'horizon d'un quinquennat, c'est irréaliste", a-t-il déclaré. "Quand on bâtit le succès de sa campagne sur cette idée-là, alors on est en effet un marchand de sable, un marchand d'illusions, parce que ça va créer des désillusions".

"Moi je propose la société du travail, la défiscalisation des heures supplémentaires, la fiche de paie, l'engagement pour l'emploi, le soutien à la compétitivité des entreprises", a-t-il poursuivi. "Il y a un vrai débat, il faut qu'il soit tranché, il faut qu'il soit clarifié", a-t-il ajouté.

"PARESSE INTELLECTUELLE"

Dans une interview à Ouest France, Benoît Hamon a déploré mardi le climat "violent" dans lequel baigne selon lui la campagne, fustigeant Manuel Valls qui l'attaque "avec des accusations très graves, comme le communautarisme, le fait que je ruinerais la France, étayées par rien".

"Je m'en inquiète, car cela laissera des traces et ne servira que nos adversaires", a-t-il ajouté en regrettant que l'ancien Premier ministre ait refusé mardi de répéter qu'il voterait pour lui s'il remporte le scrutin interne.

Auparavant, Benoît Hamon avait jugé sur Europe 1 qu'il était "assez irresponsable de la part d'un ancien Premier ministre de parler comme il le fait".

"J'aimerais savoir quel est le futur qu'il propose sinon le statu quo et de continuer avec les solutions d'hier (...) je respecte ce qu'il dit mais cela ne marchera pas parce que ça n'a pas marché jusqu'ici", a-t-il dit.

"Je mets sur la table des propositions nouvelles, elles semblent aujourd'hui rassembler les électeurs de gauche très largement, et bien au-delà et parlons de cela, plutôt que de procéder par ce qui relève davantage de la paresse intellectuelle que de la volonté de faire vivre le débat démocratique", a poursuivi le député des Yvelines, qui a reçu le soutien d'Arnaud Montebourg, arrivé troisième dimanche dernier.

Autre point de discorde entre les représentants des deux lignes antagonistes au Parti socialiste, la laïcité, l'ancien Premier ministre accusant de nouveau Benoît Hamon d'"ambiguïtés" sur le sujet.

"Il y a des ambiguïtés, des risques d'accommodements, oui en effet, de sa part", a-t-il dit. "Ce débat devra être évidemment précisé (...) La laïcité est là pour protéger, pour permettre à ceux qui croient comme ceux qui ne croient pas de vivre ensemble (...) Il ne peut pas y avoir le moindre compromis avec le communautarisme."

Invité sur RFI, Benoît Hamon a riposté aux accusations de son adversaire, dénonçant un "procès".

"On me fait le procès de quoi ? D'être élu de banlieue, d'être confronté à la réalité de ce communautarisme que je combats, autrement que par des mots", a-t-il dit. "Ce n'est pas moi qui ai une version dévoyée de la laïcité", a-t-il ajouté, rappelant que c'était "le Conseil d'Etat qui lui a rappelé [à Manuel Valls] ce qu'était la loi sur le burkini quand il s'est porté au secours des maires interdisant le burkini".

(Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse)