L'UE s'efforce d'avancer dans la lutte contre l'évasion fiscale

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L'ue s'efforce d'avancer dans la lutte contre l'evasion fiscale[reuters.com]
(Crédits : Francois Lenoir)

par Francesco Guarascio

BRUXELLES (Reuters) - Les ministres des Finances de l'Union européenne ont conclu mardi un accord censé empêcher les multinationales de profiter des différences entre les fiscalités nationales pour échapper à la taxation des dividendes, un pas de plus dans la lutte contre l'évitement fiscal.

Les nouvelles règles, qui doivent entrer en vigueur en 2020, devraient dissuader les entreprises de déclarer leurs bénéfices dans des pays qui les imposent peu ou pas du tout.

"Nous sommes parvenus à une approche générale", a déclaré le ministre maltais des Finances, Edward Scicluna, dont le pays occupe jusqu'à la fin juin la présidence tournante de l'UE, en saluant une avancée dans la lutte contre les disparités entre régimes fiscaux nationaux, les "disparités hybrides" dans le jargon de l'UE.

"L'accord intervenu aujourd'hui permettra de garantir que les dispositifs hybrides sous toutes leurs formes ne puissent pas être utilisés pour éluder l'impôt dans l'UE, même lorsque ces dispositifs font intervenir des pays tiers", s'est félicitée la Commission dans un communiqué.

L'application des nouvelles règles a été repoussée à janvier 2020 car certains pays ont dit craindre un impact sur la compétitivité en cas de mise en oeuvre trop rapide. Dans certains cas, l'entrée en vigueur devra même attendre 2022.

En décembre, l'Ecofin n'était pas parvenu à s'accorder sur le sujet, une proposition de la présidence slovaque d'alors, soutenue par la Grande-Bretagne, ayant été jugée trop édulcorée par d'autres pays.

Edward Scicluna a déclaré que de nouvelles propositions seraient présentées au cours des prochains mois pour faire en sorte que les multinationales ne soient pas imposées deux fois.

VERS UNE LISTE EUROPÉENNE DES PARADIS FISCAUX

Les ministres des Finances ont aussi trouvé un terrain d'entente sur les critères de définition des paradis fiscaux, officiellement dénommés "juridictions non coopératives", objet d'un désaccord persistant entre les pays membres de l'UE qui permettait à certains d'entre eux de s'en tenir à leur propre liste, parfois vide.

Le principe de la rédaction d'une liste unique a gagné des soutiens après les révélations des derniers mois sur l'évasion fiscale à grande échelle impliquant des pays comme Panama ou les Bahamas.

L'UE pourrait imposer des sanctions aux pays inscrits sur cette liste.

L'Ecofin s'est accordé sur le principe selon lequel un pays qui ne taxe absolument pas les bénéfices ne sera pas forcément considéré comme un paradis fiscal mais devra se soumettre à des vérifications selon d'autres critères, comme le niveau de coopération avec l'UE en matière fiscale ou l'existence de structures offshore dans ses juridictions.

"Le fait que l'UE accepte désormais qu'un taux d'imposition zéro soit potentiellement néfaste est une bonne chose", a réagit l'organisation non-gouvernementale Oxfam, qui dit toutefois redouter que le choix de ne pas sanctionner automatiquement les pays concernés ne permette à certains d'entre eux de passer entre les mailles du filet.

La liste européenne des paradis fiscaux devrait être dressée d'ici la fin de l'année. Pour l'instant, des lettres ont été adressées à 92 pays, dont les Etats-Unis, pour recenser les pratiques susceptibles d'être considérées comme facilitant l'évitement fiscal.

(Francesco Guarascio; Marc Angrand pour le service français, édité par Véronique Tison et Bertrand Boucey)