Le Mexique exprime inquiétude et agacement face aux projets US

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Visite de rex tillerson au mexique dans un contexte de tension[reuters.com]
(Crédits : Carlos Jasso)

par Alexandra Alper et Anahi Rama

MEXICO (Reuters) - Le Mexique a fait part jeudi de son inquiétude et de son agacement devant les projets annoncés par le gouvernement américain à l'occasion de la venue à Mexico de deux de ses membres, le secrétaire d'Etat Rex Tillerson et le secrétaire à la Sécurité intérieure John Kelly.

"Il y a des inquiétudes et de l'agacement chez les Mexicains sur la manière dont ils perçoivent des politiques qui pourraient se révéler dangereuses pour les intérêts nationaux et pour les Mexicains, ici et à l'étranger", a déclaré le ministre mexicain des Affaires étrangères, Luis Videgaray, à l'issue d'un entretien avec les deux responsables américains.

Ces derniers, chargés de rassurer les autorités mexicaines, ont employé un ton modéré, Kelly excluant tout usage de la force dans les opérations d'immigration et toute expulsion massive d'immigrés.

Le visage grave, Luis Videgaray s'est exprimé aux côtés des deux visiteurs, évoquant des "heures difficiles" pour les relations américano-mexicaines qui se sont considérablement détériorées depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump.

Le département américain de la Sécurité intérieure (Homeland Security) a dévoilé mardi une série de dispositions qui reviennent à envisager l'expulsion de tous les migrants sans papier.

La mesure vise notamment les ressortissants mexicains entrés illégalement sur le territoire américain. Luis Videgaray a estimé que la proposition d'expulser tous les étrangers sans papiers était "unilatérale" et "sans précédent" et qu'elle serait le principal sujet des discussions avec ses deux hôtes américains.

"Le gouvernement mexicain prendra toutes les mesures légales possibles pour défendre les droits de l'homme des Mexicains à l'étranger, en particulier aux Etats-Unis", a affirmé Videgaray.

DES RELATIONS "PHÉNOMÉNALES"

L'enjeu de cette visite est important pour Washington car le Mexique a annoncé que si une rupture intervenait dans les relations, elle aurait des conséquences sur la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le trafic de drogue et le contrôle des migrants en provenance d'Amérique centrale.

"Le Mexique a besoin des Etats-Unis et les Etats-Unis ont besoin du Mexique. Nos pays seront toujours voisins alors le mieux est d'avoir des accords qui fonctionnement équitablement pour les deux", a déclaré le ministre mexicain de l'Intérieur, Miguel Angel Osorio Chong.

L'espoir d'un réchauffement des relations est minime tant les récents contacts entre les deux pays ont été compliqués depuis le mois dernier et n'ont fait qu'accroître les tensions.

"Les relations sont à un niveau historique tellement bas que ce serait un voeu pieux de penser que de nouvelles questions concrètes puissent être abordées actuellement", a déclaré Jason Marczak, directeur du département des questions économiques latino-américaines du centre d'études Atlantic Council.

Tillerson et Kelly ont tout de même rencontré le président mexicain Enrique Peña Nieto, qui avait brusquement annulé un sommet à Washington prévu en janvier après que Donald Trump eut déclaré que la visite du président mexicain était inutile si ce dernier refusait de payer la construction d'un mur à la frontière entre les deux pays.

L'opposition avait réclamé que le chef de l'Etat refuse d'accueillir les deux hommes et le ministre de l'Economie avait prévenu que la tenue de la rencontre dépendrait du contenu des discussions de la matinée.

Donald Trump a également promis de dénoncer l'Accord de libre-échange nord-américain (Aléna) avec le Canada et le Mexique si ses dispositions ne peuvent être renégociées pour devenir plus favorables aux Etats-Unis.

Le porte-parole de la Maison blanche Sean Spicer s'est voulu rassurant avant la visite, affirmant que les relations entre Mexico et Washington étaient "phénoménales en ce moment".

(Pierre Sérisier, Nicolas Delame et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)