Appel à la grève générale illimitée en Guyane

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PARIS (Reuters) - Les Guyanais sont appelés ce lundi à la grève générale illimitée pour réclamer un plan d'investissement massif pour leur collectivité territoriale, théâtre d'un mouvement de grogne sociale à moins d'un mois du premier tour de l'élection présidentielle.

La grève, qui a conduit Air France et Air Caraïbes à annuler leurs vols et poussé les Etats-Unis à déconseiller tout voyage vers ce territoire à leurs ressortissants, a été votée samedi à l'unanimité par les 37 syndicats réunis au sein de l'Union des travailleurs guyanais (UTG).

Afin de tenter de déminer le conflit, une mission interministérielle de haut niveau est arrivée samedi à Cayenne mais s'est vue opposer une fin de non recevoir par les élus locaux qui réclament la venue d'un membre du gouvernement avant d'entamer toute négociation.

"Les conditions du dialogue ne sont pas réunies", a estimé lundi matin la ministre des Outre-mer Ericka Bareigts sur RTL. "Nous ne fermons aucune porte, il peut y avoir la possibilité de mon départ pour la Guyane, mais je souhaite que les conditions soient réunies pour une rencontre efficace".

"J'en appelle au calme pour la Guyane, parce que nous devons absolument être dans le dialogue", a-t-elle ajouté.

A l'issue d'une réunion dimanche soir à Matignon, elle avait assuré, dans un communiqué commun avec le ministre de l'Intérieur Matthias Fekl, que le gouvernement était "pleinement à la tâche, mobilisé pour parvenir à l'amélioration rapide de la situation sur le terrain."

"La mission interministérielle sera rapidement amenée à annoncer un certain nombre de mesures immédiates répondant à des revendications déjà identifiées", ont souligné les deux ministres. "Elle entendra tous ceux qui, dans le cadre de l'Etat de droit et dans un esprit républicain, souhaitent, comme le gouvernement, trouver les meilleures réponses pour la Guyane."

CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE

Le territoire français d'Amérique du Sud, qui abrite la base spatiale de Kourou et compte quelque 250.000 habitants, est confronté à un manque d'équipements publics et un taux de délinquance élevée. La Guyane est le territoire de France où l'on compte le plus d'homicides - 42 en 2016 - et le taux de chômage (22,3%) y est deux fois plus élevé que la moyenne française.

A l'origine du mouvement de protestation, qui s'est traduit ces derniers jours par la mise en place de barrages routiers, le collectif "Pour que la Guyane décolle" qui réunit des salariés d'EDF, des mouvements citoyens de lutte contre l'insécurité, des transporteurs ou encore des artisans.

A un mois de l'élection présidentielle, le conflit social en Guyane s'est invité dans la campagne électorale.

Le candidat de la droite et du centre François Fillon a estimé que la situation dans le territoire était "la conséquence de l'échec de la politique de François Hollande". La présidente du Front national Marine Le Pen a pointé elle le "service cruellement minimum" des gouvernements successifs à l'égard de la Guyane.

Le candidat socialiste Benoît Hamon a pour sa part estimé que la Guyane avait droit "à l'égalité et la sécurité" quand le leader d'En Marche! Emmanuel Macron a lancé un appel au calme lors d'un déplacement à la Réunion.

Face à ces prises de position, le gouvernement a mis en garde dimanche soir contre toute "instrumentalisation d'une crise sociale, ni à des fins de trouble à l'ordre public ni à des fins électoralistes".

"L'invective, l'outrance et l'approximation dont (certains candidats-NDLR) ont fait preuve contribuent à attiser les désordres qui perturbent la vie de nos concitoyens guyanais", soulignent Matthias Fekl et Ericka Bareigts.

"Ces mêmes candidats, qui ne semblent découvrir les outre-mer qu'à l'occasion des campagnes électorales, portent des propositions dangereuses qu'il convient de rappeler comme la modification de la rémunération des fonctionnaires ou de la défiscalisation des aides à l'investissement", ajoutent-ils dans leur communiqué commun.

(Marine Pennetier, édité par Eric Faye)