Les surprises des banques centrales en prélude à la pause estivale

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Les surprises des banques centrales en prelude a la pause estivale[reuters.com]
(Crédits : Reuters Staff)

PARIS (Reuters) - Après une quinzaine animée - et parfois agitée - par les réunions des grandes banques centrales de la planète, la semaine à venir s'annonce plus calme, offrant aux investisseurs un répit bienvenu pour digérer les annonces sur l'évolution à venir des politiques monétaires.

La Réserve fédérale américaine, en dévoilant les modalités de la réduction à venir de son bilan, et la Banque d'Angleterre, en révélant que trois membres de son Comité de politique monétaire étaient désormais favorables à une hausse de taux, ont surpris les marchés mercredi et jeudi, favorisant la hausse du dollar, la remontée des rendements obligataires et un nouveau repli marqué des valeurs technologiques à Wall Street.

Le Nasdaq porte ainsi à près de 1% son recul en cinq séances, après avoir perdu 1,8% sur la seule séance de vendredi dernier, un début de correction qui a fait souffrir des poids lourds de la cote, comme Apple, dont la capitalisation a fondu de 56 milliards de dollars en une semaine, mais aussi des nouveaux-venus comme Snap, la maison mère de Snapchat, retombé jeudi à son prix d'introduction.

Cette baisse des "techs", dont les valorisations avaient atteint des niveaux de plus en plus difficiles à justifier, ne s'est toutefois pas propagée à d'autres secteurs et l'indice Stoxx européen 600 limite son repli sur la semaine à 0,5% environ.

La casse est donc limitée mais elle incite certains à se montrer plus prudents sur les marchés actions, qui pourraient marquer le pas au cours des mois à venir.

LES ACTIONS EUROPÉENNES TOUJOURS PRIVILÉGIÉES

"Nous sommes toujours en mode 'risk on', il n'y a pas lieu de s'inquiéter mais des arbitrages seront à faire selon les zones géographiques", explique ainsi le directeur général de Degroof Petercam, Laurent Gaetani.

"Nous pensons que le moment est venu de voir les Etats-Unis progresser un peu moins et les autres régions faire un peu mieux. On le constate en termes de dynamique macroéconomique, et on pense que la même chose peut se réaliser sur les marchés."

Cette prudence ne remet toutefois pas en cause l'intérêt pour les actions, notamment celles de la zone euro.

"En Europe, l'amélioration de la dynamique économique, la remontée des anticipations d'inflation et la poursuite de l'assouplissement budgétaire devraient soutenir l'EuroStoxx 50, et nous avons une préférence pour les actions françaises et italiennes", expliquent ainsi les responsables de la stratégie de Société générale dans leur "Best Of" des opportunités d'investissement pour le troisième trimestre.

De son côté, Anton Brender, chef économiste de Candriam, souligne que la dynamique de la croissance mondiale reste solide, en dépit des inquiétudes que suscitent le Brexit et les difficultés de Theresa May, la Première ministre britannique, autant que les turbulences politiques à Washington et les incohérences de la politique économique et budgétaire de l'administration Trump.

"Rarement les grandes économies se sont aussi bien portées toutes ensemble", souligne-t-il.

De ce point de vue, les indices d'activité PMI "flash" de la zone euro, vendredi prochain, pourraient confirmer cette tendance, le consensus les donnant tout près des plus hauts de plus de six ans atteints récemment.

RESSERREMENT DES POLITIQUES MONÉTAIRES À L'HORIZON

Ce climat au beau fixe laisse donc le champ libre à la normalisation des politiques monétaires, qui semble devoir s'imposer comme le grand thème de la fin 2017 et du début 2018, au moins pour la Fed et la Banque d'Angleterre, et sans doute aussi pour la Banque centrale européenne (BCE).

Engagé depuis 18 mois maintenant dans un cycle de hausse de taux, la Fed pourrait amorcer avant la fin de l'année la réduction de son bilan, en dépit d'indicateurs conjoncturels mitigés et des signes de faiblesse de l'inflation, que sa présidente Janet Yellen semble considérer comme un simple phénomène ponctuel.

Le moral des ménages américains s'est dégradé de manière inattendue en juin et les prix de détail aux Etats-Unis ont accusé une baisse imprévue en mai, ont notamment appris cette semaine les investisseurs. et

La Banque d'Angleterre, elle, pourrait franchir le Rubicon du relèvement des taux dans les prochains mois, justement pour endiguer une inflation nourrie par la baisse de la livre depuis le vote il y a tout juste un an en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Si le processus de normalisation des politiques monétaires était inéluctable, son calendrier pourrait donc être resserré par rapport aux anticipations initiales des investisseurs, au risque de provoquer de nouvelles turbulences.

"Maintenant que la situation économique est remise d'aplomb, la question est de savoir s'il ne faut pas craindre que les banques centrales resserrent trop les conditions financières, cassant ainsi l'activité économique et provoquant l'effondrement des marchés", met ainsi en garde Oddo BHF, même si "force est de constater qu'on n'en est pas encore là".

(Marc Angrand, avec Patrick Vignal, édité par Blandine Hénault)