La Cour des comptes évoque un trou de 9 mds en 2017

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PARIS (Reuters) - L'audit des finances publiques que la Cour des comptes doit rendre public jeudi a identifié un trou de neuf milliards d'euros dans le budget 2017 et de 17 milliards en 2018 par rapport à la trajectoire des finances publiques du précédent gouvernement, rapporte Le Canard enchaîné à paraître mercredi.

Les neufs milliards évoqués par l'hebdomadaire satirique, qui dit avoir consulté le rapport de la Cour, correspondent selon les calculs de Reuters à environ 0,4 point de PIB, soit un déficit public atteignant 3,2% du produit intérieur brut (PIB) en fin d'année.

Un chiffre déjà évoqué par TF1 lundi soir mais que le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a refusé de commenter et également avancé mardi dans un article publié par le site internet des Echos.

Selon le quotidien économique, qui cite une source proche du dossier, l'audit de la Cour soulignerait l'impact de différents facteurs - dont certains ont été relevés par l'opposition dès la présentation du budget 2017 à l'automne dernier - comme la recapitalisation à venir d'Areva.

Sont également citées, pour expliquer le décalage entre les prévisions et la situation actuelle, des dépenses sous-budgétées (comme les emplois aidés) ou des recettes moins importantes qu'attendu dans la lutte contre la fraude fiscale au niveau du service qui gère les "repentis fiscaux", le STDR (service de traitement des déclarations rectificatives).

MESURES D'ÉCONOMIES

Interrogé mardi par des journalistes en marge d'un déplacement à Paris, Bruno Le Maire a une nouvelle fois botté en touche.

"Je recommande, même si c'est une lecture peut-être un peu plus aride, de lire le rapport de la Cour des comptes qui sortira jeudi pour avoir des chiffres exacts plutôt que de lire Le Canard enchaîné", a déclaré Bruno Le Maire.

Son prédécesseur à Bercy, Michel Sapin, contacté par l'hebdomadaire, a déclaré qu'un déficit de 3,2% avait bien été prévu par la direction du Budget en février mais que, pour compenser, le gouvernement avait alors gelé pour 10 milliards de crédits, ce dont la Cour n'aurait pas tenu compte.

Bruno Le Maire, mais aussi le Premier ministre, Edouard Philippe, et le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, ont multiplié ces dernières semaines les déclarations suggérant que le déficit public de la France serait supérieur aux 2,8% du PIB visés par le précédent gouvernement, voire au seuil de 3% sous laquelle la France s'est engagée à le contenir en fin d'année.

Pour respecter ses engagements européens et préserver sa crédibilité, l'exécutif - qui a affirmé à plusieurs reprises son intention de ne pas avoir recours à une loi de finances rectificative cet été - prévoit donc des mesures d'économies.

"Nous ferons avec Gérald Darmanin, au Premier ministre, au président de la République, un certain nombre de propositions qui concerneront tous les secteurs de la dépense publique. On ne va pas passer le rabot sur un ministère ou sur un autre. Il faut que l'Etat, les collectivités locales, les dépenses sociales, chacun fasse un effort", a ainsi déclaré Bruno Le Maire lundi sur TF1.

"ACCOMMODEMENTS CRITIQUABLES"

Dans le programme de stabilité présenté mi-avril, le ministre des Finances et le secrétaire d'Etat au Budget de l'époque, Michel Sapin et Christian Eckert, tablaient sur un déficit ramené à 2,8% du PIB en fin d'année mais le Haut conseil des finances publiques (HCFP) s'était à l'époque montré dubitatif.

La Cour a déjà estimé le mois dernier que les conditions propices de l'année 2016 n'avaient pas été suffisamment mises à profit pour rétablir les finances publiques et que l'accélération durable des dépenses ainsi que des reports de charges et des "accommodements critiquables" faisaient peser "un risque sur l'exécution 2017".

Elle avait également estimé que l'accélération des dépenses observée l'an dernier, en lien avec le plan d'urgence pour l'emploi, les recrutements dans la police et l'armée ou encore les effets différés des mesures en faveur des fonctionnaires, se manifesteraient au-delà de l'année 2017.

De fait, les 17 milliards d'euros manquants pour 2018 évoqués par Le Canard enchaîné représentent un écart de 0,7 point de PIB, ce qui aboutirait à un déficit public à 3,0% en fin d'année, contre 2,3% dans les prévisions du précédent gouvernement.

Le programme économique d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle repose sur un déficit public à 3% du PIB à fin 2017 - un niveau comparable aux prévisions des grands organismes internationaux - et prévoit de maintenir le solde public sous ce seuil des 3% (hors mesures exceptionnelles) tout au long du quinquennat.

Le chef de l'Etat a présidé mardi une réunion ministérielle sur la situation des finances publiques à l'Elysée, avec Edouard Philippe, Bruno Le Maire et Gérald Darmanin.

(Myriam Rivet, édité par Simon Carraud)