Génocide rwandais : Une plainte déposée contre BNP Paribas

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PARIS (Reuters) - Trois associations de défense des droits de l'homme ont annoncé jeudi avoir déposé une plainte avec constitution de partie civile contre BNP Paribas pour complicité de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre au Rwanda.

Sherpa, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) et Ibuka France accusent la banque d'avoir débloqué en 1994 des fonds qui ont servi au financement de livraisons d'armes au gouvernement du Rwanda, en plein génocide rwandais et malgré un embargo décrété par les Nations Unies.

Selon l'Onu, les massacres commis entre avril et juillet 1994 par le gouvernement rwandais de l'époque, constitué de Hutus, ont fait quelque 800.000 morts, en majorité Tutsis.

"Nous apprenons par voie médiatique le dépôt d'une plainte", a déclaré BNP Paribas dans une déclaration transmise par mail.

"A l'heure actuelle, nous ne disposons pas des éléments suffisants la concernant pour être en mesure de la commenter."

Marie Dosé, avocate de Sherpa, a précisé à Reuters que la plainte avait été déposée mercredi après-midi sur le bureau du doyen des juges d'instruction.

C'est au parquet de Paris qu'il reviendra de décider de l'ouverture ou non d'une information judiciaire, quand il aura eu communication de cette plainte.

Dans leur communiqué et un dossier de presse, les trois associations s'en tiennent prudemment au conditionnel.

Elles précisent que la BNP, aujourd'hui BNP Paribas, aurait autorisé en juin 1994 le transfert de 1,3 million de dollars d'un compte rwandais vers un compte suisse appartenant à un marchand d'armes sud-africain, Willem Ehlers.

Accompagné par le colonel Hutu Théoneste Bagosora, qui sera condamné par le tribunal pénal international pour son rôle dans le génocide, celui-ci aurait conclu quelques jours plus tard l'achat des armes aux Seychelles, ajoutent les associations.

Ces armes auraient transité par la ville zaïroise de Goma vers Gisenyi, au Rwanda, les 16 et 20 juin 1994.

Selon les trois associations, les témoignages et rapports d'enquête joints à la plainte montrent que la BNP, seule banque à avoir accepté à l'époque un tel transfert de fonds, aurait eu "nécessairement connaissance" de leur destination finale.

Les trois associations soulignent que c'est la première plainte de ce type déposée en France contre une banque.

Une loi du 27 mars 2017 oblige désormais les grandes sociétés à mettre en oeuvre un "plan de vigilance" pour prévenir toute implication dans des atteintes aux droits de l'homme, à des dommages environnementaux graves ou des risques sanitaires.

(Gilles Guillaume et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)