Berlin réexamine les projets d'armements avec la Turquie

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(Crédits : Axel Schmidt)

BERLIN (Reuters) - Le gouvernement allemand réexamine actuellement l'ensemble des demandes de projets émanant de la Turquie dans le domaine des armements, a annoncé vendredi le ministère allemand de l'Economie, sur fond de tensions entre Berlin et Ankara.

Excédé par l'incarcération de six militants des droits de l'homme en Turquie, un ministre allemand a comparé le comportement du gouvernement turc à celui de l'ancienne Allemagne de l'Est, incitant le président Recep Tayyip Erdogan à prier Berlin de "se ressaisir".

Depuis le début de l'année, les tensions sont vives entre l'Allemagne et la Turquie, Berlin reprochant notamment au pouvoir turc d'avoir multiplié les prises de parole politique sur le territoire allemand alors que Recep Tayyip Erdogan menait campagne pour faire adopter son projet de réforme constitutionnelle.

L'arrestation de six militants des droits de l'homme a encore envenimé les relations entre les deux pays.

Le ministre turc de l'Economie, Nihat Zeybekci, s'est de son côté employé à calmer le jeu, estimant que la crise avec Berlin, liée entre autres à l'arrestation en Turquie de six militants des droits de l'homme, dont un Allemand, ne serait que temporaire.

"Il faut s'abstenir d'employer des mots qui causeraient un tort durable (...) aux économies", a-t-il dit à Reuters. "L'Allemagne doit peser ceux de ses propos qui sont inadaptés".

L'Allemagne, où vivent près de trois millions de personnes ayant des attaches avec la Turquie, va réexaminer toutes les demandes de la Turquie en matière d'armement, a annoncé une porte-parole du ministère de l'Economie.

En 2016, l'Allemagne a exporté pour 83,9 millions d'euros d'armements vers la Turquie. Au cours des quatre premiers mois de 2017, 22 millions d'euros de commandes ont été approuvées.

Jeudi, c'est le chef de la diplomatie allemande, Sigmar Gabriel, qui avait invité les Allemands à la prudence en Turquie et menacé de prendre des mesures susceptibles de freiner les investissements allemands là-bas.

"Si la Turquie n'arrête pas de jouer à ce jeu-là, nous devrons dire aux gens: 'Vous vous rendez en Turquie à vos risques et périls. Nous ne pouvons plus garantir votre sécurité", a dit à Bild le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble.

Et ce dernier de comparer la Turquie à l'ex-RDA: "La Turquie procède désormais à des arrestations arbitraires et ne respecte plus les règles consulaires élémentaires. Cela me rappelle la façon dont les choses se passaient en RDA".

Ceux qui se rendaient en RDA avant son effondrement en 1990 savaient que "s'il vous arrivait quelque chose, nul ne pourrait vous aider", dit-il.

OPERATIONS CLANDESTINES

Les autorités allemandes reprochent à Ankara de ne pas leur avoir accordé le plein accès consulaire pour rencontrer Peter Steudtner, accusé de terrorisme par la Turquie, un chef d'accusation qualifié d'absurde par Berlin.

Parallèlement, le chef du service de renseignements intérieurs allemand (BfV), Hans-Georg Maassen, affirmait que les services secrets turcs multipliaient les opérations clandestines en Allemagne, tout particulièrement depuis le coup d'Etat manqué de juillet 2016.

"Depuis la tentative de coup d'Etat et les bouleversements politiques qui se sont passés là bas, nous ne considérons plus uniquement les services de renseignements turcs comme des partenaires, mais également comme des adversaires", a-t-il déclaré.

Ces opérations clandestines visaient notamment des Turcs basés en Allemagne et elles ont parfois consisté à intimider des adversaires du président Erdogan.

(Andreas Rinke, Orhan Coskun et Michelle Martin; Eric Faye et Nicolas Delame pour le service français)