Le ralentissement des crédits immobiliers se confirme

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Le ralentissement des credits immobiliers se confirme[reuters.com]
(Crédits : Philippe Wojazer)

PARIS (Reuters) - Le ralentissement du marché du crédit immobilier entamé en avril s'est confirmé au troisième trimestre en France dans un contexte d'accélération de la hausse des prix des transactions qui pénalise les jeunes et les plus modestes, selon les données publiées jeudi par l'Observatoire Crédit logement/CSA.

Sur les trois mois à fin septembre, le montant global des crédits accordés accuse un recul de 0,2% par rapport à un an plus tôt et leur nombre diminue plus encore (-6,3%).

Par comparaison, la production affichait encore des hausses trimestrielles de 29,9% à fin mars et de 4,1% à fin juin.

La tendance reste très favorable sur douze mois, grâce aux chiffres élevés de début de 2017, avec des montants en hausse de 15,3% et un nombre de crédits accordés en progression de 9,1%.

"Nous avons un effritement, qui commence a être visible sur tous les marchés, du nombre de prêts", a souligné lors d'une présentation Michel Mouillard, professeur d'économie à l'Université Paris-Ouest et responsable des travaux de l'Observatoire.

"Nous ne sommes pas en période d'effondrement, nous ne sommes pas en ouverture de récession, nous sommes en période d'atterrissage de la production et des marchés, nous sommes encore en 'soft' landing", a-t-il ajouté.

Selon lui, la raison n'est pas à trouver dans les conditions de financement toujours favorables - le taux moyen des crédits (1,56% en septembre) est pratiquement stable depuis avril, juste au-dessus des plus bas (1,31%) de novembre - mais dans la hausse rapide des coûts des transactions financées par emprunt.

Elle atteint 5,9% sur les neuf premiers mois de 2017 par rapport à la même période de 2016, après avoir déjà augmenté de 4,3% l'an passé, pendant que les revenus des ménages qui réalisent ces opérations n'ont progressé que de 1,7% (après +0,6% en 2016).

UN MARCHE PLUS DIFFICILE POUR LES MOINS RICHES

En conséquence, le coût relatif des opérations immobilières est monté à 5,0 années de revenus, soit le niveau le plus élevé constaté depuis le lancement de l'Observatoire au début des années 2000, contre 4,86 l'an passé à la même époque, et 4,48 en 2007, le sommet d'avant-crise.

Cette situation est particulièrement pénalisante pour les catégories les plus jeunes et les plus modestes, les principaux bénéficiaires des aides à l'accession à la propriété dans le neuf, qui ont alimenté le rebond du marché jusqu'en 2016.

La part des moins de 35 ans pour les emprunteurs dans le neuf est passée en un an de 50,1% à 49,2% et celle des accédants modestes (moins de 3 smic) de 37,8% à 37,1%. Par comparaison, elles se situaient à respectivement 54,7% et 43,9% en 2009.

"Il y a une dégradation pour les clientèles les plus modestes", souligne Michel Mouillard, "ceux qui ont porté l'expansion des marchés ces dernières années, notamment dans le neuf, sont en train de sortir progressivement".

L'universitaire ne voit pas pour l'instant d'inflexion du marché lié aux récentes annonces du gouvernement en matière de logement, comme le recentrage des dispositifs de soutien à l'investissement locatif et l'accession à la propriété (prêt à taux zéro, PTZ, et aides publiques, APL) sur les zones tendues.

Mais il s'inquiète de la disparition du dispositif "APL accession" et de la division par deux du montant des PTZ - une concession du président Emmanuel Macron, qui voulait à l'origine le supprimer complètement - dans les zones rurales, qui toucheront les prétendants à l'accession les moins riches.

"Le risque, c'est que ces catégories disparaissent", dit Michel Mouillard en soulignant que, si le prix de l'immobilier est moins cher dans les campagnes, le coût relatif (prix de la transaction rapporté aux revenus) des opérations réalisées "est exactement le même" que dans les grandes agglomérations, hors Paris.

(Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)