Syrie : Nouveau veto de la Russie, fin de la commission d'enquête ?

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Syrie : nouveau veto de la russie, fin de la commission d'enquete ?[reuters.com]
(Crédits : Lucas Jackson)

par Michelle Nichols

NEW YORK (Reuters) - La Russie a opposé vendredi son veto contre une résolution présentée par le Japon qui visait à renouveler de 30 jours le mandat de la commission d'enquête sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie.

C'est le deuxième veto russe en deux jours et la onzième fois que la Russie utilise son droit de veto au sein du Conseil de sécurité de l'Onu pour bloquer l'action internationale en Syrie depuis le début du conflit en 2011.

La Russie avait déjà opposé jeudi son veto contre un projet de résolution des Etats-Unis pour prolonger de deux ans le mandat de la commission d'enquête de l'Onu et de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OAIC), appelée Mécanisme d'enquête conjoint (Joint Investigative Mechanism, Jim).

Le mandat du Jim, créé en 2015 à l'unanimité des 15 membres du Conseil de sécurité et prolongé d'un an en 2016, prend fin ce vendredi.

"DES ACCUSATIONS SANS FONDEMENT" SELON LA RUSSIE

L'ambassadeur de la Russie auprès des Nations Unies, Vassily Nebenzia, a dit que l'enquête pouvait seulement être prolongée si des "failles déterminantes dans son travail" étaient corrigées.

Le Jim a depuis deux ans "porté des accusations sans fondement contre la Syrie", a-t-il ajouté.

Un rapport de la commission d'enquête internationale publié fin octobre a imputé au gouvernement syrien l'utilisation de gaz sarin sur Khan Cheikhoun, dans la province d'Idlib, une attaque qui a fait plus de 80 morts le 4 avril dernier.

Le projet de résolution du Japon, soumis tard dans la soirée de jeudi après le veto russe contre la proposition des Etats-Unis, a obtenu 12 fois en faveur tandis que la Russie, la Chine et la Bolivie ont voté non.

Jeudi, la proposition américaine de prolonger le mandat du Jim pour deux ans avait obtenu 11 voix en faveur. La Russie et la Bolivie s'étaient prononcées contre, et la Chine et l'Egypte s'étaient abstenues.

Une résolution doit obtenir neuf votes favorables et ne pas se voir opposer le veto de l'un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, France, Russie, Grande-Bretagne, Chine) pour être adoptée.

LES ETATS-UNIS BLÂMENT ENCORE LA RUSSIE

Ce nouveau veto de la Russie est un "message clair" que Moscou n'accorde aucune importance aux victimes des attaques chimiques en Syrie, lit-on un communiqué publié vendredi par la Maison blanche sitôt le vote du Conseil de sécurité terminé.

"La Russie nous fait perdre notre temps", a affirmé l'ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley.

"Les actions de la Russie aujourd'hui (vendredi) et durant les dernières semaines n'ont eu pour but que de retarder, détourner et en définitive anéantir les efforts pour que soient rendus des comptes sur les attaques au gaz chimique en Syrie", a ajouté Nikki Haley, qui soulignait jeudi que "la Russie a tué le Mécanisme conjoint d'enquête".

L'ambassadeur de la Suède auprès des Nations unies, Olof Skoog, a demandé des discussions à huis clos après le vote vendredi soir afin que les membres du Conseil de sécurité soient "absolument convaincus d'avoir épuisé tous les recours".

L'ambassadeur français auprès des Nations Unies, François Delattre, estimait avant le vote de la proposition japonaise vendredi qu'elle pouvait "permettre d'éviter la mort du Jim".

"Ce sera un moyen de gagner un peu de temps... pour travailler dur et essayer de trouver une cohésion absolument nécessaire alors que l'avenir même de la non-prolifération nucléaire du régime (de Bachar el-Assad) est en jeu", ajoutait François Delattre.

LES EATS-UNIS PRÊTS A FRAPPER DE NOUVEAU LA SYRIE

L'ambassadrice américaine auprès de l'Onu, Nikki Haley, rappelait jeudi que les Etats-Unis pourraient, "s'il le faut", frapper de nouveau les bases aériennes syriennes, comme ils l'avaient fait après l'attaque de Khan Sheikhoun.

"Le régime de Bachar el-Assad doit être clairement prévenu, les Etats-Unis n'acceptent pas l'utilisation d'armes chimiques par la Syrie", ajoutait-elle.

"Nous avons besoin d'un mécanisme robuste, qualifié, pour aider à empêcher la prolifération de menaces d'attaques terroristes au gaz dans la région, et vous (les puissances occidentales, ndlr) avez besoin d'une structure qui soit une marionnette pour manipuler l'opinion publique", répondait jeudi l'ambassadeur russe auprès des Nations unies, Vassily Nebenzia.

"Nous condamnons l'utilisation d'armes chimiques par quiconque", avait-il poursuivi Nebenzia.

La Syrie avait accepté de détruire ses armes chimiques en 2013 suite à un accord négocié par la Russie et les Etats-Unis.

(Jean Terzian pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)